HUNTINGTON BEACH ™
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 ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia

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Bianca Hoogendijk
Bianca Hoogendijk
lama en évolution


› MESSAGES : 193
› EMMENAGEMENT LE : 21/04/2015
› AGE : 44
› STATUT CIVIL : Amoureuse d'Indiana Jones. Donc ouais, célibataire.
› QUARTIER : Palm Avenue
› PROFESSION/ETUDE : Chef d'orchestre au LACO.
› DOUBLE COMPTE : Saskia & Gidéon
› CELEBRITE : Bryce Dallas Howard
› COPYRIGHT : Sparkling Lux & Neechoue & Schizophrenic
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MessageSujet: ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia   ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia EmptyDim 16 Aoû 2015 - 19:41

' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line '
Cordelia & Bianca



L'après-midi laissait place à un début de soirée ensoleillé, où le bruit de la ville se faisait entendre en son centre. Dans les quartiers résidentiels, les habitants rentraient peu à peu de leur travail, garant leur voiture devant leur logement. On était en pleine semaine et les commerçants, employés, ouvriers, étaient fatigués par la chaleur et le labeur que leur emploi nécessitait des journées durant.
Pourtant, à Huntington Beach, toute expérience désagréable du quotidien devenait plus facile à vivre et accepter. Le léger vent marin parcourait la ville, offrant à ses habitants et touristes une brise rafraîchissante et reposante.

Bianca, elle, venait de rentrer de Los Angeles. On avait beau être en milieu de semaine, elle n'avait pas de répétition avant quelques jours. La réception à laquelle elle avait assisté la veille l'avait fatiguée ; elle avait nécessité trop d'organisation, d'empressement après sa répétition déja éreintante. La musicienne avait donc préféré, dès le lendemain, retrouver sa soeur et le calme d'Huntington Beach, sa grande demeure qu'elle considérait malgré tout comme son lieu d'habitation principal, parce qu'elle était proche de Delia, qu'elles s'y voyaient très souvent.
Elle travaillerait quelques morceaux, seule, chez elle. Elle boirait un thé sur sa terrasse ou derrière sa baie vitrée, admirerait sa reproduction de Monet, au-dessus de son large canapé de salon, alors qu'elle avalerait ses repas bio dans la douceur sonore de Mozart. Elle éviterait les rues bondées de Los Angeles, la stress de diriger le Los Angeles Chamber Orchestra, même s'il ne s'agissait "que" d'un orchestre de chambre. Elle retrouverait son amour premier du violon, de la musique comme elle l'avait toujours connue et vécue, irait profiter de son temps loin de son lieu de travail pour aller faire du tennis sous un soleil qu'elle avait avait, avec les années, apprivoisé.
Elle s'allongerait paisiblement le soir, avalerait ses anxiolytiques avant de plonger dans un sommeil sans rêve et surtout sans cauchemar.
Et Delia passerait, dès son arrivée, admirer le paysage ... ou surtout, savourer ses clopes sur le large balcon. Elle râlerait du repas que lui préparerait Bianca, mais peu importait. La présence de sa jumelle était toujours rassurante pour l’éternelle solitaire qu'elle était. Cordelia était sa confidente, sans doute la personne qui pouvait se vanter de mieux la connaitre que quiconque.

Et leurs différences faisaient leur force ; elles se complétaient et là où l'une était assurée, l'autre était timide. La seule chose qui semblait les unir était l'amour de la cigarette et de la crème solaire. Pourtant, comme à leur habitude, elles allaient se retrouver, telles deux meilleures amies inséparables ; se souvenir d'en quoi elles étaient si proches mais si éloignées. En quoi leur relation complexe était un souffle de vie dans leur existence.

Bianca se versa un grand verre de vin, parcourut sa spacieuse pièce de vie en prenant ses premières gorgées du précieux breuvage, puis s'installa sur son beau balcon regardant la vie s'activer au loin. Le verre posé sur la table en bois, elle s'alluma une cigarette. C'était son moment de quiétude ; elle avait fui Los Angeles. Et si son frère lui manquait déja, elle savait qu'il n'était pas bien loin, et que dans quelques instants, il l’appellerait sans doute pour la remercier poliment du repas qu'elle lui avait laissé au frigo, même s'il n'allait pas le finir, elle le savait bien. Wilson avait cette attitude, si différente de lorsqu'ils étaient enfants. Il était devenu très protecteur, poli, respectueux. Il voulait que sa soeur prenne confiance en elle-même, et ses capacités. Pour cela, il était prêt à beaucoup, la violoniste devait bien l'admettre. Et jamais, d'ailleurs, elle ne s'était sentie aussi fusionnelle avec son frère ainé, qui avait, pour elle, toujours préféré Delia. La tendance semblait s'être inversée, et pour la première fois de son existence, Bianca semblait trouver sa place dans la fratrie Hoogendijk.
En ce qui concernait ses parents, par contre...

Anna Hoogendijk, cette maman qui avait pourtant tenté d'être proche d'elle lorsqu'elle était enfant, elle le savait, s'était bel et bien éloignée. Bianca avait beau lui montrer son amour au quotidien et ce depuis des années, à travers cet amour du violon né d'un besoin de reconnaissance maternelle, elle savait bien que c'était peine perdue. Anna préférait son métier, son mari. Peut-être Wilson, aussi, son fils ainé, sa fierté. Ses relations avec les jumelles, en revanche, étaient plus chaotiques, et il n'était pas rare que son nom revienne dans les conversations des deux trentenaires, qui ne pouvaient s'empêcher de nourrir une haine relativement contenue envers leur génitrice.
L'esprit de la violoniste se perdait dans des contrées inconnues alors que le soleil se couchait doucement vers l'horizon. Bianca aimait ces instants, lorsqu'elle reposait pied dans cette jolie ville, redécouvrait le plaisir de cette agréable et grande maison et de la sensation de liberté que lui apportait cette indépendance et le fait de savoir que Cordelia n'était pas loin. Elle savait que la mer n'était pas loin, que la vie y était douce.

* * *

" Au fait, merci pour le saumon et les haricots verts dans le frigo! " s'exclamait Wilson à l'autre bout du fil. Bianca ne put s'empêcher de sourire. C'était leur rituel, un peu. Lorsqu'elle lui abandonnait son appartement le temps de quelques jours, elle lui laissait un repas préparé avec amour et soucis de qualité. Elle savait que ces dits repas n'étaient pas toujours du goût de son grand frère, et pourtant, il appréciait le geste de sa petite soeur avant qu'elle ne le fuit. Il était en train de préparer une éventuelle mutation et n'avait, de toute façon, guère le temps pour papoter chiffons avec Bianca, même une jolie soirée telle que celle-ci.
Cette fois-ci n'avait pas dérogé à la règle. Ses haricots verts frais et le saumon étaient d'ailleurs en train de fondre dans sa bouche alors qu'il téléphonait à sa rousse de soeur. " De rien Wil. Fais attention aux arrêtes. " le taquina-t-elle, heureuse de pouvoir jouer, parfois, le rôle de la grande soeur protectrice. Bon, souvent, cela s'arrêtait aux arrêtes de poisson ou à l'eau glissante sur les carrelages de la salle de bains. " Parce que tu n'as pas enlevé les arrêtes ? " surrenchérit pourtant Wil, qui semblait sourire derrière sa mastication de poisson.
Soudain, on sonna à la porte. " Ca doit être Delia ! " expliqua la rousse à son frère qui devait avoir entendu un son tonitruant au bout du combiné. " Y'a qu'elle pour me faire avoir une crise cardiaque à autant de distance... " rit-il, plantant sa fourchette dans quelques haricots. " Donne-lui le bonsoir. Profitez bien! Oublie pas ce que je t'ai dit ! " Bianca s'était levée et se dirgeait vers la porte d'entrée, les talons claquant au sol. Elle ouvrit à sa sœur tout en répondant à son frère. " Oui oui " fit-elle avant de s'adresser directement à sa soeur. " T'as le bonjour de Wil, tout ça! " Puis, elle claqua la porte derrière elle, avant d'attraper une cigarette.
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MessageSujet: Re: ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia   ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia EmptyJeu 20 Aoû 2015 - 2:41

❝ Someone said they saw you,
said they saw it as a sign ❞
Bianca & Cordelia Hoogendijk


Les weekends étaient les seuls moments de la semaine où Delia s'autorisait un peu de lest dans la gestion de son stand de tir. Même cinq ans après avoir acquis les lieux, elle était loin d'en maîtriser tous les aspects; elle s'efforçait cependant de garder un œil vigilant sur tous ses employés. Elle préférait ne laisser aucune place au hasard et évitait prudemment toute confiance excessive, même celle qu'elle pourrait avoir en des employés qu'elle avait elle-même engagés en reprenant l'affaire. Delia connaissait pertinemment les circonstances qui avaient poussé l'ancien propriétaire des lieux à s'en débarrasser, quitte à les brader, et ce en dépit de la valeur sentimentale qu'ils pouvaient avoir à ses yeux. Elle n'avait jamais réellement oublié Edelstein et le regard empreint de jugement qu'il avait posé sur elle en lui donnant, à contrecœur, les clés du bâtiment. Car non, Cordelia n'y connaissait rien en armes, et ce malgré l'impression qu'elle voulait donner. Elle aimait cette sensation de liberté et de contrôle qui s'emparait d'elle lorsqu'elle tirait, mais elle était clairement incapable de réciter les spécificités d'une arme et de déterminer les préconisations de son utilisation. Pourtant, elle gérait son stand d'une poigne de fer. En semaine, le stand n'était ouvert que de midi à vingt-deux heures, mais le weekend, il ouvrait deux heures plus tôt. Ce n'était pas pour autant que Delia se refrénait sur les loisirs en fin de semaine. Malgré la fermeté dont elle faisait preuve en tant que propriétaire, gérante et manager du stand, elle avait appris à déléguer. Son quotidien, sinon, s'avérerait insupportable. Le weekend n'était souvent pas favorable à des retrouvailles avec sa sœur, qui était souvent en représentation le samedi. Aujourd'hui, cependant, Bianca était un peu plus tranquille que d'habitude. Delia avait donc profité de cette occasion pour faire voir du paysage à Spirit, la faisant parcourir la distance pourtant négligeable qui séparait les résidences des deux trentenaires. Elle avait l'impression de ne pas avoir sorti l'animal depuis deux jours tant elle semblait excitée à mesure qu'elles s'éloignaient de son petit appartement. Elle avait sans doute l'impression de partir pour une grande aventure. Il fallait avouer qu'il était rare pour la jeune femme de prendre le temps de se rendre chez Bianca à pieds. Elle prenait souvent son pick-up, et promenait Spirit comme à l'accoutumée, en faisant un petit tour de quartier, que ce soit du côté de Palm Avenue ou de retour chez elle, vers Pacific Lane, non loin de la plage. Lorsqu'elle frappa à la porte de Bianca, Spirit ne tenait plus en place, ne réalisant sans doute pas qu'elle et sa maîtresse étaient à présent arrivées à destination. Elle entendait vaguement sa sœur parler à l'intérieur, mais il n'y avait pas à dire : son isolation était bien meilleure que la sienne. De chez elle, elle pouvait entendre sa voisine amatrice de thé allumer sa télévision pour regarder son feuilleton quotidien, tout comme elle pouvait entendre le jeune couple nouvellement arrivé faire des cochonneries dans leur chambre une fois monsieur rentré du travail. Ici, l'atmosphère était beaucoup plus calme et sereine, et même si Bianca était loin de cette promiscuité qui faisait maintenant partie du quotidien de Delia, cette dernière avait appris, au fil des ans, à apprécier la communauté qui l'entourait. Elle disait d'ailleurs de sa résidence qu'elle était cosy et chaleureuse, même si elle lui trouvait souvent des points négatifs. Au moins, ses voisins ne pouvaient pas lui faire de réflexions les rares fois où ils entendaient Spirit aboyer, ou lorsqu'elle mettait les Foo Fighters un peu plus fort que de raison. A chaque fois qu'elle arrivait chez sa sœur, par contre, elle était troublée par le contraste entre leurs environnements, tout autant que leurs modes de vie d'ailleurs. Même si elles partageaient un même génome, Bianca et Cordelia semblaient aux antipodes l'une de l'autre sur bien des aspects. Ces différences faisaient leur force comme leur faiblesse ; elle ne se comprenaient pas forcément, mais elles se complétaient. Aucune ne pouvait picorer dans l'assiette de l'autre. Tandis que Delia aimait la viande et les plats aberrants en termes de calories, sa sœur se contentait de manger des graines élevées en plein air et assaisonnées à l'eau déminéralisée. Pourtant, à s'être démarquées l'une de l'autre pendant leur jeunesse, elles n'en étaient ressorties que plus attachées l'une à l'autre, chacune prête à apprendre des conseils de vie que l'autre avait accumulés.

Lorsque la porte de Bianca s'ouvrit, sa jumelle était accroupie auprès de Spirit, la cajolant pour la calmer. Delia savait pertinemment que l'ordre instauré dans la propriété de sa sœur n'était pas fait pour être perturbé, même par un être aussi parfait que sa jolie chienne-louve. « Salut » s'exclama la rousse, caressant une dernière fois Spirit avant de se redresser. Elle passa le pas de la porte sans attendre plus longtemps, appelant l'animal à sa suite, et laissa Bianca la fermer derrière elles. Elle mit quelques instants à comprendre que sa sœur ne s'adressait pas tant à elle qu'à son téléphone. « T'as le bonjour de Wil, tout ça! » Machinalement, en s'asseyant sur le canapé de sa sœur, elle caressa son chien. Elle jeta un regard concerné au téléphone que tenait toujours la chef d'orchestre. « Rends-lui », répondit-elle plus par politesse qu'autre chose. Depuis quelques années, Delia avait l'impression que la relation complice qu'elle avait toujours entretenue avec leur grand frère s'était fragilisée, et elle s'en rendait surtout compte lorsque Bianca, d'une manière ou d'une autre, mettait en avant celle qui l'unissait à lui. Wilson avait toujours su la protéger, elle, Cordelia, et c'était grâce à lui qu'en grandissant, elle avait su se trouver quelques avantages, elle avait su s'affirmer et se démarquer de sa sœur. Elle n'était pas parfaite, elle n'avait pas été au bout de ses aspirations, mais grâce à son grand frère, elle avait appris à devenir celle qu'elle était aujourd'hui, avec ses forces, ses faiblesses, ses défauts et ses fragilités. Delia n'était pas bête, pourtant, elle savait très bien qu'il était plus aisé pour Wilson de rester chez Bianca, à Los Angeles, le temps que dure sa visite en Californie. C'était là-bas qu'il travaillait, c'était là-bas que tout se passait pour lui. Pourtant, même s'il l'avait déjà côtoyée toute la semaine, c'était Bianca qu'il appelait. Cordelia n'était pas de ceux qui passaient leur vie pendus à leur téléphone, loin de là, et elle n'était que très rarement la première à prendre des nouvelles de ceux qui lui étaient chers, mais elle connaissait suffisamment pour son frère pour savoir qu'il n'avait pas cette mauvaise habitude de laisser les autres l'appeler et prendre de ses nouvelles. Mais ce n'était pas de ses nouvelles à elle qu'il prenait; c'était celles de sa sœur. Elle n'avait pas tiré de conclusion abracadabrante; ce serait ridicule de le faire. Mais elle était particulièrement amère à chaque fois qu'elle constatait cette complicité qui unissait son frère et sa sœur. Elle était laissée de côté. Peut-être qu'elle devrait mieux tolérer la cuisine de Bianca, que c'était un espèce de rite qui lui permettrait de retrouver une place dans leur fratrie...

Sans rien dire, la rousse sortit son paquet de Winston de son sac à main, dont elle tira une clope. Elle l'alluma rapidement, relevant son regard bleuté vers sa sœur, qui avait fait de même. « Ça se passe bien à LA ? » demanda-t-elle par politesse, comme pour tenter de s'intégrer à la conversation qu'ils partageaient sans elle. Elle posa un bras désinvolte sur le dossier du canapé, croisant les jambes avec un raffinement qui était bien celui des Hoogendijk. Elle souffla de la fumée avant de se pencher vers la table basse pour attraper la télécommande. « Au fait, t'as regardé un peu les infos, aujourd'hui ? » Son sourire s'était fait espiègle, amusé. Elle alluma la télévision et zappa pendant quelques instants avant de tomber sur une chaîne d'informations locales. Chez elle, lorsqu'elle n'écoutait pas de musique, Cordelia avait bien souvent la télévision allumée sur les infos. Ce qu'elle avait vu ce matin l'avait doucement fait sourire, mais elle n'était pas sûre qu'il en serait de même pour sa sœur. Jusqu'à présent assise à côté d'elle, Spirit se redressa pour trotter vers la télévision, qu'elle regarda d'un drôle d'air, avant de s'asseoir près de la grande baie vitrée qui la fascinait à chaque fois qu'elle venait chez sa tante d'adoption. Delia était rassurée, constant une fois de plus que la brave bête savait être sage et calme lorsqu'il le fallait, et qu'elle s'adaptait à chaque situation et à chaque environnement avec une aisance phénoménale. A la télé, on parlait du travail du nouveau conseil municipal, mais elle savait pertinemment que les informations tournaient en boucle, et que sa sœur ne pourrait que constater ce qu'elle avait constaté elle-même le matin, avant de partir au travail. En attendant, elle tira une nouvelle fois sur sa clope, attendant patiemment que sa sœur raccroche pour savourer le bref reportage qui serait consacré à la soirée de gala organisée la veille à Los Angeles. « T'as fait quoi à manger ? » demanda-t-elle comme un mari machiste et affamé qui rentrait auprès de sa femme après une journée de dur labeur. « T'as pensé à Spirit, j'espère ? T'as encore de quoi, pour elle ? Au fait, faudra peut-être que tu nous ramènes, ce soir, on est venues à pieds, ça dépend à quelle heure on rentre... Demain, je commence à dix heures, j'te rappelle. » C'est qu'à force de libertés qu'elle s'accordait peut-être un peu trop, elle avait tout de même un peu de travail à rattraper. Autant le faire pendant les heures d'ouverture du stand, lorsque l'agitation de ses clients et employés la motiverait à s'atteler à sa paperasse. « Mes dimanche de congés me manquent... » soupira-t-elle en repensant à cette période salvatrice où elle n'était pas son propre patron. Ces horaires strictes et confortables lui manquaient, parfois. Surtout lorsqu'elle travaillait le weekend. « T'as pas un cendar, s'il te plait ? T'as fait quoi de celui qui était sur la table ? Il y avait une clope dedans, du coup il est passé en chambre de stérilisation ? » Elle se moquait avec un petit sourire malicieux et entendu, jetant un coup d'oeil à l'écran de télévision, sur lequel venait de réapparaître le présentateur. A l'image qui s'affichait près de sa tête, Delia devina aussitôt que c'était le moment. Elle monta le volume et regarda du coin de l’œil Bianca s'approcher.



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Bianca Hoogendijk
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MessageSujet: Re: ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia   ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia EmptyMar 13 Oct 2015 - 20:19




Cordelia et Bianca faisaient partie de ces soeurs jumelles qui partageaient tout de leur vie ; si elles avaient grandi en permanent conflit, elles avaient fini par faire de leurs différences un atout. L'une était le soutien de l'autre, et il ne passait pas un jour sans qu'elles ne se donnent de nouvelles. D'ailleurs, bien souvent, Delia venait rendre visite à sa soeur. Elles étaient inséparables malgré une relation parfois violente. Jamais la vie ne les avait séparées, et elle avaient vaincu leurs différents avec la force qui était la leur.

Le calme de sa demeure était apaisant. Delia, elle n'était pas toujours de cet avis et ajoutait sa touche rock'n'roll, à chaque fois qu'elle et Spirit débarquaient chez elle. Bianca ne savait que penser de la chienne de sa soeur. Elle laissait des poils partout et demandait beaucoup d'attention. Pourtant, la rousse était heureuse de voir sa soeur épanouie en sa compagnie; Spirit s'était peu à peu fait sa place entre elles deux. Compagne attentionée, elle était bien dressée et faisait, malgré tout, sourire Bianca lorsqu'elle venait se frotter contre ses jambes dans la cuisine.

Ce soir-là, Bianca avait eu leur grand frère au téléphone. Il lui manquait énormément. Elle ne savait comment leur relation avait pu évoluer de la sorte, mais elle en était fortement heureuse. Il représentait la seule compagnie masculine de la trentenaire. Déçue par les hommes, celle-ci s'était décidée à une vie posée, sans aucun damoiseau pour l'empêcher de continuer de vivre son rêve. Pourtant, aujourd'hui, elle se demandait si son rêve était vraiment ce qui importait le plus dans sa vie. Certes, ses moments sur scènes étaient sans doute les seuls où elle arrivait à lâcher prise, les seuls moments où elle s'aimait dans son corps. Pourtant, elle le savait bien, si elle prenait confiance en elle dans ces instants de grâce, c'était parce qu'elle se transformait en une femme totalement différente. Comment pouvait-elle être capable de s'aimer si elle n'arrivait à s’apprécier qu'en étant quelqu'un d'autre ? Et c'était un problème que sa soeur ne semblait guère pouvoir comprendre. Bianca voyait sa soeur comme un roc invincible, indestructible par la vie. Elle, à côté, était un fardeau pour la famille. Delia la protégeait, Wilson devait la rassurer chaque soir ou presque. Son père ne lui donnait pas de nouvelles parce que leur mère avait décidé que les jumelles pouvaient vivre leur destinée sans elle. Bianca était solitaire et appréciait sa solitude parce qu'elle n'avait pas réellement le choix. Elle était cet être renfermé sur lui-même, cette femme qui buvait quotidiennement son vin hors de prix, qui admirait ses tableaux de son regard triste ou qui pleurait son existence sur les cordes de son violon. Elle n'était rien. Elle n'était qu'un amas d'argent, de gloire, de tristesse. Et parfois, cette vérité lui revenait en pleine face. Elle ne savait plus qui elle était, qui elle souhaitait devenir. Elle aurait voulu trouver un homme digne de confiance, ne pas se retrouver seule dans cette immense demeure à ses trente-cinq ans. Elle aurait aimé qu'on l'aime autrement. Elle aurait aimé être moins timide, moins angoissée. Plus folle. On aimait bien les folles, aujourd'hui. Elle, avec ses tresses enroulées parfaites, ses robes strictes, son allure trop élégante, ne marquait pas les esprit.

Elle n'était rien, et Delia était tout.
Elle était sûre d'elle, belle, provocatrice, brillante, entreprenante. On l'aimait. elle n'avait pas peur de dire les choses telles qu'elles étaient, le monde lui appartenait si elle le désirait. Au fond, Bianca ne pouvait s'empêcher de la jalouser. Mais son amour pour elle était plus fort que tout. Elle était sa famille ; sa moitié. Elles avaient partagé le ventre de leur génitrice, elles avaient eu ces enfances si semblables et pourtant si différentes.

Bianca répondit à sa soeur qui avait lancé un "Salut" énergique dont elle avait le secret. " Salut! " avait-elle fait sur un ton plus calme et serein. Elle avait rendu son bonjour à Wilson qui avait souri au bout du il - elle l'avait entendu jusque là.

"  Ça se passe bien à LA ? " demanda Delia après avoir allumé sa cigarette. Bianca lui prit le briquet des mains et fit claquer ses talons sur le parquet alors qu'elle avançait vers sa table base pour le poser. Elle tira une latte de sa clope et répondit à sa frangine. " Ca va. Comme d'habitude, tu sais. De la musique pour vieux, tout ça. " fit-elle avait un sourire et un regard vers sa soeur. Elle savait très bien ce que cette dernière pensait de son métier. La musique classique, très peu pour elle. Pourtant, elle avait ce talent pour être son soutien, son pilier principal dans sa carrière sans en être fan. Pour ça, jamais Bianca ne la remercierait assez. Bianca se dirigeait vers la cuisine pour leur servir du vin lorsqu'elle entendit, à quelques mètres d'elle, sa soeur lancer un espiègle : " Au fait, t'as regardé un peu les infos, aujourd'hui ? "
La musicienne revint dans le salon, sans al bouteille de vin, fronça les sourcils et jeta un oeil interrogateur à sa jumelle. Celle-ci avait allumé le poste de télévision et Bianca se tourna vers l'écran. Elle vit le mouvement de Spirit mais ne sourit pas, pour une fois. Vu le regard de sa soeur, elle avait peur de ce que cela signifiait. Mon dieu, que s'était-il passé, encore...?
Son frère ne disait plus grand chose au téléphone, elle l'entendait mâcher son saumon. " Wil, j'te laisse! " fit-elle à son frangin, qui répondit par un marmonnement et un supposé "bisous". Elle posa le combiné sur la table basse et pour s'empêcher de piétiner debout près de son canapé, alla chercher cette tant attendue bouteille de vin et deux verres.
Lorsqu'elle revint, sa soeur se fit fidèle à elle-même et lui demanda avec la plus grande élégance du monde.
"  T'as fait quoi à manger ? T'as pensé à Spirit, j'espère ? T'as encore de quoi, pour elle ? Au fait, faudra peut-être que tu nous ramènes, ce soir, on est venues à pieds, ça dépend à quelle heure on rentre... Demain, je commence à dix heures, j'te rappelle. "
Bianca soupira calmement en levant les yeux au ciel, se servit un verre de vin, puis un à sa soeur, avant d'en boire une gorgée. Elle retira sur sa clope et finit par répondre de sa douce voix:

" Carottes rappées et Tian de courgettes. J'ai pas eu le temps de faire plus. Spirit a ses croquettes de la dernière fois, elle avait l'air d'aimer, non ? " demanda-t-elle presque avec un regard inquiet. Elle aimait sa soeur, elle aimait Spirit, elle ne voulait pas les décevoir. (Oui, voilà la vie de Bianca : l'angoisse permanente).

" Octroie-toi quelques vacances, tu en as bien besoin. Personne ne peut te reprendre le temps d'une semaine ou deux ? " demanda-t-elle avec bienveillance. Sa soeur bossait toujours comme une dingue, et elle ne la voyait jamais vraiment reposée. En plus de son alimentation précaire, elle n'allait pas pouvoir continuer comme cela...
Lorsque sa soeur lui parla de son cendrier, elle leva de nouveau les yeux au ciel. Etait-elle psychorigide à ce point ?
" Non, y'avait pas mal de clopes, je l'ai javélisé et laissé sécher sur le balcon. Et puis je m'en suis resservi tout à l'heure... "
Elle se dirigea vers ledit balcon, fit quelques caresses à Spirit en passant puis récupéra son cendrier. La nuit tombait. C'était une sensation agréable, de se dire que la vie changeait dans les rues, dans les foyers. Que c'était un instant de quiétude, où les choses devenaient autres. Les choses, pas les gens. Bianca, elle, sentait encore cette boule dans son estomac et ses larmes perdues dans ses entrailles.
" Tiens " fit-elle tendant le cendrier propre, avec un seul mégot pour l'habiter. Ses talons cliquetèrent de nouveau alors qu'elle allait s’asseoir auprès de sa soeur. Et comme à chaque fois qu'elles se voyaient, Bianca se devait demander avec un regard rempli d'espoir mais aussi de désespoir : " Des nouvelles des parents ? "
Oui, c'était une question quasi quotidienne, et dont la réponse ne changeait pas bien souvent. Mais sa soeur, elle, fixait l'écran avec un sourire que Bianca ne lui connaissait que trop bien. Et Bianca Hoogendijk tourna la tête vers l'écran. Et effectivement, ce qu'elle vit, elle, la fit moins sourire. Elle avança sa main devant sa bouche rouge, hébétée, et son dos pourtant d'ordinaire si droit, se laissa tomber dans le canapé. Sa clope, elle continuait de se consummer dans son autre main, peu consciente qu'elle assistait à une scène de drame.
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MessageSujet: Re: ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia   ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia EmptyJeu 15 Oct 2015 - 20:52


La gémellité n'est pas chose aisée. Malgré tout ce qu'un jumeau peut prétendre pour laisser passer ce sujet de conversation, la gémellité n'est pas une chose simple. Elle signifie que la plupart de ce que les autres considèrent comme leur étant propre et leur donnant leur identité ne l'est pas pour vous. Votre anniversaire ? Vous le partagez. Votre quotidien ? Il est le même. Votre prénom ? Il n'existe plus vraiment... vous êtes votre nom de famille. Avec le terme jumeau qui est y constamment rattaché. Même votre visage n'est pas vraiment le vôtre ; vous partagez jusqu'à la moindre base nucléotidique avec celui que l'on peut appeler votre clone, pourquoi la nature s'embêterait-elle à vous donner deux visages distincts ? Même si vous ne l'admettez pas, vous vous réjouissez toujours un peu lorsque, aux côtés de votre jumeau, on arrive à vous donner le bon prénom. On vous connaît selon des caractéristiques qu'on semble vous avoir trouvées, juste pour vous différencier un peu mieux. Oui, c'est vous, celui des deux qui déteste le chocolat. Avoir un jumeau, c'est voir son identité diminuer de moitié, devoir la partager et, d'une manière ou d'autre, arriver à en ressortir prêt à affronter une vie individualiste. Et votre progression dans la vie ? Elle se fait en parallèle de quelqu'un qui est parti avec les mêmes chances que vous. La comparaison est alors inévitable, et si vos proches sont les premiers qui, innocemment, en font usage, vous vous retrouvez, inexorablement et inconsciemment, emporté dans cette spirale infernale. Les parents ont commencé, la famille en général, puis se sont ajouté les professeurs. Bianca est douée en cours, disait leur professeur d'histoire. Elle aime apprendre, ça se voit. Elle a un rythme régulier et sérieux. Rien à dire. Et puis, il y a vous... Bianca est douée en cours, disait leur professeur d'histoire. Cordelia ? Et bien... oui, elle écrit bien. Et les comparaisons continuent, pour tout et pour rien. Vous êtes moins bon en histoire, mais oh, c'est marrant, vous êtes meilleur lorsqu'il s'agit de faire rire la galerie. Et si... et si on arrêtait de comparer les jumeaux, de temps en temps, juste pour voir si ça le permet d'avoir un peu plus confiance en eux, une fois l'âge adulte arrivé ? Pour Bianca et Cordelia, c'était bien trop tard. Ces comparaisons constantes faisaient partie de leur relation, à présent. Elles s'étaient construites en tant qu'individus, l'une et l'autre, autour de ces idées pré-conçues, de ces attentes à peine palpables et de cette envie d'être meilleure que l'autre, sans que l'autre soit moins bonne qu'elle. Une perpétuelle recherche de perfection et de victoire, confrontée, constamment, à l'amour qu'elles éprouvent l'une pour l'autre. Les relations entre jumeaux ne sont jamais simples ; c'est sans doute le cas pour beaucoup de frères et sœurs qui n'ont que la moitié des gènes en commun, mais, pour une paire de jumeau, cet effet semble encore amplifié, comme catalysé par toutes ces similitudes biologiques qui leur collent à la peau. Et il n'y a aucun dérogation possible. Il avait fallu à Cordelia, comme à Bianca, apprendre à vivre comme étant la seconde moitié d'un tout qui, à en croire tout le monde, ne pouvait pas réellement avoir d'identité propre. Pourtant, les deux jumelles s'était démarquées l'une de l'autre dès leur plus jeune âge, par réflexe, peut-être, ou par simple interaction environnementale. Quelque chose, quelque part, avait contré l'effet de ces gènes qui étaient similaires chez l'une et chez l'autre : même si on les comparait constamment, même si on ne pouvait s'empêcher de les aligner et de les classer, c'était indéniable. Chacune d'entre eux avait développé un caractère bien différent. Dans la vie, leurs bagages, dès à présent, n'étaient plus les mêmes. Il y avait Bianca, cette jolie rêveuse, un brin timide, perdue dans toutes ces pensées qui la paniquent à chaque instant. Elle était calme et posée, Bianca; il faisait bon l'avoir à ses côtés. Elle arrivait à vous apaiser d'un regard. Dans ses yeux, vous lisiez aussi cette passion dévorante qu'était la sienne : son amour pour la musique grandissait chaque jour un peu plus. Son imaginaire faisait d'elle la plus fiable des deux. De l'autre côté, il y avait Cordelia, cérébrale et terre-à-terre, énergique à outrance. Elle, ses rêves, c'était toutes choses concrètes qui, au loin, attendaient encore d'être découvertes. Et elle, on l'appréciait... parce qu'elle faisait rire.

Vous le voyez, le problème ? Chacune enviait à l'autre ce qu'elle n'avait pas, sans se douter un seul instant de la réciprocité de cette étrange rivalité. A trente-cinq ans maintenant, il fallait bien qu'elles se fassent une raison. Elles étaient aussi fusionnelles et proches que distinctes et singulières. Elles fonctionnaient de la même manière qu'un système stellaire binaire. Bianca était une géante bleue; majestueuse, brillante. A l'image des géantes bleues qui passent à l'état de supergéantes rouges, Bianca créait l'unique, elle créait ce qui bâtit le présent et l'avenir : ces éléments rares, précieux. Elle créait le rêve, l'imaginaire, la réflexion. Un jour, elle exploserait en une magnifique supernova : Bianca serait l'apogée de sa carrière, étincelante, épanouie. Cordelia, quant à elle, semblait suivre la vie d'une naine noire. Inéluctablement, elle était vouée à perdre son éclat et à s'éteindre. Elle était trop imposante pour que l'événement soit bref : le temps était son pire ennemi. Le processus avait déjà commencé. Et ces deux étoiles que sont la géante bleue et la naine noire se tournaient autour, inexorablement, comme deux comparses et meilleures amies, comme deux ennemies qui s'influencent à chaque caprice de son opposée. C'était électrique, constamment. Les forces gravitationnelles agissaient entre le duo d'étoiles comme ces drôles de forces étranges agissaient entre les jumelles. Deux meilleures amies, deux meilleures ennemies. Deux étoiles antagonistes qui, pourtant, ne brillent que davantage lorsqu'elles dansent ensemble.

Mais leur duo, elles le connaissaient. Elles se connaissaient par cœur, l'une et l'autre. Elles se faisaient confiance aveuglément, de façon stupide diraient certains. Elles n'avaient pas réussi à apprendre à vivre séparément, mais la plus belle des prouesses était sans doute qu'elles aient réussi, au contraire, à vivre ensemble. A trente-cinq ans, elles semblaient avoir trouvé un équilibre parfait : si Bianca vivait à Los Angeles une bonne partie de la semaine, elles profitaient des moments plus calmes pour se retrouver, toutes les deux, à Huntington Beach. Elles qui avaient vécu en colocation pendant quelques années, savaient pertinemment comment leur duo fonctionnait. Elles avaient trouvé le compromis parfait. Et ce compromis résidait en grande partie dans la simplicité de leurs retrouvailles hebdomadaires. Si elles se retrouvaient à l'immense villa de la chef d'orchestre, Delia savait pertinemment qu'elle allait probablement devoir manger en rentrant chez elle. Elle savait aussi que Spirit devait être sage ; même si Bianca avait fini par l'adopter, la rousse avait totalement conscience du sacrifice que cela lui demandait de ne pas nettoyer ses textiles et sols dès que la chienne était passée. Mais au moins, maintenant, face aux plats en plastique de sa sœur, Delia avait un soutien de taille. L'animal comprenait sa souffrance d'un regard, mais le plus triste était sans doute que Bianca nourrissait mieux encore Spirit que sa propre sœur. La chienne, elle, semblait aimer ses croquettes d'un amour fou. Cordelia et les choux de Bruxelles secs de l'autre rousse, par contre...

Ce qui arrivait un peu moins souvent, par contre, ou tout du moins qui arrivait depuis peu de temps seulement, c'était les nouvelles de Wilson. Les nouvelles de Wilson par l'intermédiaire de Bianca, plus précisément. Leur pauvre grand frère avait toujours été un peu perdu entre ses deux cadettes. Il n'avait jamais supporté de rester sur le bas-côté pendant leurs chamailleries, et, Delia devait bien l'admettre, pendant leur enfance, il avait pris sa défense à de bien nombreuses reprises. Pourtant, les choses, à présent, semblaient aller à l'opposé de ce qu'elles avaient toujours connu. Si Bianca gagnait en complicité avec Wilson, Delia avait l'impression de perdre toute proximité avec son frère. Quelque chose semblait être brisé entre eux, mais Delia n'arrivait pas à déterminer quelle pourrait être la raison de cet éloignement. « Ca va », répondait donc sa sœur, calmement, sans saisir les sous-entendus un brin irrités et déçus de la rousse. «Comme d'habitude, tu sais. De la musique pour vieux, tout ça. » Oui, elle ne savait que trop bien. Leurs mondes étaient différents. Ils l'avaient toujours été, et peut-être que Wilson était celui qui avait changé, finalement. A préférer le saumon sauvage hors de prix de Bianca à un paquet de chips goût barbecue proposé par Delia. Elle était indubitablement cette espèce de paria de la famille; de ce que les parents lui avaient inculqué au cours de son éducation n'avait subsisté que la politesse, le savoir-vivre, la courtoisie et l'allure. Elle n'adhérait pas à ces cocktails sans fin imposé par la bourgeoisie et les professions où l'apparence prime; elle se moquait de sa santé, des bienfaits des légumes, des antioxydants et des vitamines ABC, X ou W; elle n'avait rien à faire non plus de tous ces musiciens morts, qui se ressemblaient, qui avaient composé des symphonies interminables, soporifiques, grinçantes. « De la musique pour morts, ouais », rit Delia en haussant les épaules. Elle s'imagina un instant à un concert des Foo Fighters. Incomparable. Comment avaient-elles pu développer des goûts aussi discordants ? Était-ce inné, ou l'environnement avait-il joué un rôle là-dessus ? Ces penchants musicaux étaient-ils nés naturellement, ou les avaient-elles forcés à apparaître sous la pression de cette démarcation qu'elles souhaitaient s'imposer entre elles ? Par chance, et fort heureusement, Bianca partageait tout de même l'un de ses vices avec elle : la cigarette... Et si chacune avait ses préférences concernant la marque de clopes qui était la sienne, elles n'en demeuraient pas moins aussi dépendantes l'une que l'autre. Dès qu'elles se retrouvaient, c'était une occasion de plus d'allumer une cigarette. Et même en préparant son petit vin rouge hors de prix, loin des bouteilles bon marché que s'offrait parfois Cordelia, sa sœur avait une cigarette entre les doigts. Cela faisait quelques jours qu'elles ne s'étaient pas vues; elles avaient des tas de choses à se dire. Delia avait des anecdotes de son travail à partager, et puis il y avait aussi toutes ces nouveautés du côté de Pluton qui la rendaient euphorique. Pourtant, quelque chose de plus important encore avait retenu son attention. Elle allait rire. Encore. Bianca, elle, allait déchanter. Cette dernière avait du percevoir au ton de la trentenaire que cette annonce ne présageait rien de bon; elle était revenue sans sa bouteille de vin, ce qui, en langage Biance, ne pouvait signifier qu'une chose seulement : l'instant était grave. « Wil, j'te laisse! » La sourire de Delia s'allongea. Wilson était laissé tout seul à Los Angeles avec son saumon bio, sauvage, non trafiqué, pêché au naturel et câliné pendant son asphyxie au contact de l'air. Mais le plaisir de l'instant ne faisait que commencer. La chaîne d'informations locale n'était qu'au début de ses titres, qui, cycliques, allaient finir par revenir à cette soirée de gala qui s'était déroulée, la veille, à Los Angeles, en compagnie des grands noms de la culture régionale. Delia n'attendait que ce moment, mais en attendant, elle avait faim, aussi. Et elle regardait Bianca, le regard ampli d'un espoir bien naïf. Elle attrapa le verre de vin que lui tendait la rousse sans la quitter du regard. Peut-être que la fixer aurait un effet quelconque sur ce qui l'attendait dans le frigo. « Carottes rappées et Tian de courgettes. J'ai pas eu le temps de faire plus. Spirit a ses croquettes de la dernière fois, elle avait l'air d'aimer, non ? » Cordelia plongea dans son verre de vin, émettant un grognement mêlé à un soupir désespéré. Puis une latte de cigarette. Elle remonta ses pieds sur le canapé en cuir, attendant déjà une réflexion de la part de sa propriétaire, qui tolérait difficilement que des pieds nus puissent entrer dans un contact direct avec ses meubles, qui tenaient plus de la décoration que de la praticité. La trentenaire posa finalement son verre de vin sur la table basse, l'air bien attristé, et attrapa son portable dans son sac à main, posé à côté d'elle. « Oui, Spirit aime bien manger chez toi, elle. » Elle lança un regard chagrin à sa chienne, qui les regardait sagement, assise près de la télévision, la langue pendante depuis qu'elle avait compris qu'on parlait de nourriture. Son regard se porta à nouveau sur son smartphone, qu'elle déverrouilla pour retrouver, en une seconde à peine, un numéro abrégé. Elle porta une nouvelle fois sa Winston à ses lèvres, soufflant en l'air, comme si ça avait une quelconque incidence sur l'atmosphère déjà toxique de la pièce. « Octroie-toi quelques vacances, tu en as bien besoin. Personne ne peut te reprendre le temps d'une semaine ou deux ? » embraya Bianca, toujours aussi bienveillante. Cordelia gardait toujours un œil sur les infos, qui allaient bien finir par dévoiler cette image quelle voulait présenter à sa sœur. Mais, à dire vrai, même si elle était reconnaissante de l'attention que Bianca lui portait, elle n'arrivait pas à entendre raison. Le travail, c'était sa vie. C'était tout ce qu'elle avait. « Ouais, bah toi aussi, alors, hein » ironisa-t-elle avec un sourcil arqué. Elles savaient parfaitement, l'une comme l'autre, que leurs carrières, aussi brillante soit-elle pour Bianca, et aussi triste soit-elle pour Delia, étaient tout ce qu'elles avaient. A trente-cinq ans, elles étaient aussi célibataires et solitaires l'une que l'autre. Des vacances ? Leur phobie, sans doute autant à l'une qu'à l'autre -avec les micro-organismes pour Bianca et la bouffe saine pour Delia. Finalement, Delia soupira, et reporta son attention sur son portable l'espace d'une seconde, pour finalement le porter à son oreille. D'un air désolée, elle jeta un coup d'oeil à sa sœur. « Désolée, tu m'as obligée... » Une taffe. Et quelqu'un qui répond à l'autre bout du fil. « Salut Steve, c'est Delia. Une Margherita, s'il-te-plait, 4194 Palm Avenue, merci ! » Ses lèvres figées dans un sourire, elle éclata de rire à ce que lui dit le réceptionniste. « Oui, chez ma sœur... elle fait votre fortune, hein ! Allez, à la prochaine. Ouais, bye ! » Elle leva son regard bleuté vers la fameuse sœur et haussa les épaules avec une petite mine désolée. « J'ai presque pas mangé à midi... » Pour les personnes ne parlant pas couramment le Delia, cela signifiait : j'ai besoin de graaaas, donnez moi du gras, du fromage, de la viaaaande, du suicide diététique, de la viande élevée en batterie et de la torture intestinaaaale. Une petite Margherita comme elle les aimait, de sa pizzeria préférée de la ville.

Elle tira une dernière fois sur sa cigarette, qui arrivait à son filtre. Le cendrier ? « Non, y'avait pas mal de clopes, je l'ai javélisé et laissé sécher sur le balcon. Et puis je m'en suis resservi tout à l'heure... » Oui, bon, d'accord, en fait, tout ce qu'elle voulait, c'était le cendar en face d'elle. Ce qui se concrétisa quelques instants plus tard, lorsque Bianca le posa sur la table basse. Elle écrasa son mégot et reprit son verre de vin, qu'elle sirotait sans réellement apprécier toutes ces saveurs qui devaient s'y mélanger à merveille. Spirit, elle, s'était redressée lorsque Bianca l'avait caressée en passant, attendant sans doute ces fameuses croquettes dont parlaient les deux sœurs un instant plus tôt. Et puis, il fallait bien l'admettre : la chienne aimait bien le clone de sa maîtresse. Et voilà qu'elle la rejoignait, sagement, près du canapé où elle s'était assise, la regardant fixement, le regard brillant. « Des nouvelles des parents ? » Delia hocha la tête en avalant une nouvelle gorgée de vin. « Non... » soupira-t-elle en regardant sa sœur d'un air entendu. Les fois où ils étaient venu les voir en Californie depuis qu'elles s'y étaient installées, plus de quinze ans auparavant, pouvaient se compter sur les doigts d'une main. « Mais j'ai pas eu de faire-part de décès, donc je suppose qu'ils sont encore vivant », ironisa-t-elle en riant jaune. Mais, à dire vrai, Delia était concentrée sur tout autre chose : la télé. Le reportage commençait, et elle en gloussait d'avance.

Sur l'écran de la chef d'orchestre était en train de se dérouler une scène assez cocasse : un jeune acteur de théâtre était interviewé, promouvant sa pièce, tandis qu'en arrière-plan, une rousse remontait la bretelle de sa somptueuse robe de cocktail verte, qui avait glissé, laissant entrevoir certaines parcelles de peau qu'elle aurait sans doute préféré garder privées. « T'as vuuuu ? Bah alors, on se dénude à une soirée de gala ? » rit-elle en se tournant vers Bianca. « Pourquoi tu m'as rien dit ? Tu voulais draguer qui, heiiin ? » Elle continuait de glousser et semblait même partie dans un fou rire. Elle devinait la paralysie de sa sœur, à côté. « C'est bon, Bianca, personne a... » Mais elle n'arrivait pas à rester sérieuse. « Personne a vu, regarde, le mec continue de parler de sa pièce de théâtre contemporaine ! » Bianca, immobile, semblait être en plein arrêt sur image. « Allez, panique pas, ça arrive aux plus grands... » Un nouveau rire incontrôlable. Elle essuya une larme au coin de son œil. Mais elle savait comment réveiller sa sœur de ce drôle d'état léthargique. « Eh, tu vas brûler ton canapé avec ta clope. »
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Bianca Hoogendijk
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MessageSujet: Re: ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia   ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia EmptyVen 28 Oct 2016 - 17:40




On confondait bien souvent - trop souvent - les deux soeurs. Pour certains jumeaux, les traits communs s'estompaient avec le temps. Pour les deux rousses, leur visage avait beau avoir trouvé leur propre personnalité, et puis elles aussi, il n'empêchait que leur chevelure devait en perdre plus d'un, parce qu'il arrivait bien souvent à Bianca, au supermarché, d'être appelée Cordelia. Certains partenaires de jeu, au tennis (au tennis!! Vous imaginez Delia faire du tennis ? La blague !!), se demandaient même parfois où était son "si beau chien". Pour rire, parfois, Bianca disait "je l'ai filé à ma soeur", puis elle se sentait coupable rien qu'à l'idée d'avoir menti, même pour une blague, et son sourire s'effaçait doucement avant qu'on l'entendre murmurer, à peine audiblement parce que perdu dans la honte : "non, je rigole". D'ailleurs, ça se voyait, qu'elle rigolait.
Pourtant, avec le temps; Bianca avait appris à être moins dérangée par le fait d'être confondue avec sa soeur. Oh, pas qu'elle appréciait particulièrement qu'on ne la reconnaisse pas en tant qu'individu propre, mais parce qu'elle se détestait suffisamment pour préférer, l'espace d'un instant, être sa soeur. Voilà pourquoi, sans doute, faisait-elle, de temps en temps croire, que la chienne de Delia était la sienne. Et voici aussi la raison pour laquelle, il fallait l'admettre, l'on pouvait apercevoir son regard triste. Car non, elle n'était pas sa soeur. Et ne le serait jamais.

Alors oui, elle avait une belle carrière, une belle maison, un joli compte en banque aussi. Elle avait tout - ou presque - pour être heureuse. Elle avait réalisé son rêve, celui de devenir musicienne émérite, et chef d'orchestre reconnue. Elle avait rencontré des idoles de jeunesse, joué dans des endroits somptueux. Oui, mais à quel prix ? Car ce rêve, c'était sa mère qui le lui avait donné comme un cadeau empoisonné. Elle était enfermée dans son piège depuis sa plus tendre enfance. A présent, comment devenir elle-même. N'était-elle pas devenue ce rêve d'une autre ? D'une femme qui ne l'appelait même pas une fois par mois ?

Alors, comment pouvait-elle s'empêcher de jalouser, ne serait-ce qu'un peu, cette soeur qui avait tout compris ? Qui avait compris sa vie . Evidemment, il y avait des choses que Bianca ne savait pas et ne saurait sans doute jamais. Mais Delia s'était trouvé sa propre identité, avait réussi à se construire au-delà de la famille Hoogendijk. Elle était une femme indépendance, volontaire, forte. Beaucoup plus forte que Bianca. Bianca, accro à son vin, ses cachets, ses clopes, sa superstition d'enfant, à l'image propre et digne qu'elle devait renvoyer aux autres. Bianca était cet être fragile, qui jouait l'être puissant et invincible. Tout cela n'était qu'armure. Une armure qui menaçait de se rompre chaque soir, lorsque la musicienne remplissait un verre de vin ou avalait une de ses petites pilules magiques. Dans son regard régnait la perdition, les questions sans fin. La petite fille était toujours présente, perdue dans le monde adulte, dans une maison qui n'était pas vraiment la sienne, avec pour colocataire, son violon. Aucun homme pour l'aimer. Sa meilleure amie était sa soeur, qu'elle voulait devenir, dont elle était si fière. Cette soeur qui n'avait même pas besoin d'elle. Parfois, elle se demandait pourquoi encore maintenant, Delia choisissait de trainer avec Bianca, cette femme ennuyeuse, ennuyante, vieux-jeu, alcoolique, dépressive sans doute, dans le fond, et souvent trop silencieuse et calme pour être vraie.

Alors la chef d'orchestre profitait de chaque instant avec sa soeur, en priant pour que cette dernière n'ait pas une révélation avant de la revoir la prochaine fois. Le genre de révélation qui briserait leur duo. Celui du "elle n'est pas assez bien pour moi, elle me fait chier". Delia avait des amis, un business, une vie.
Bianca n'avait que sa solitude sur laquelle pleurer.

Après un échange de banalités classique (" Quoi, tu trouves que j'ai l'air morte ? " blagua Bianca, même si au fond, à force, ça la blessait que sa soeur puisse vraiment trouver sa vie chiante. Un jour, elle allait vraiment partir, elle le savait.), il y avait les banalités suivantes : le repas du soir. Delia avait du mal à manger sain, équilibré. Mais à chaque fois qu'elle venait chez Bianca, cette dernière se faisait un honneur de lui faire gouter ses petits plats maison en espérant un jour, trouver la perle rare qu'elle pourrait lui faire manger régulièrement. Vous savez, ce plat avec les ingrédients sains, mais qui sont, en plus, bons au goût pour des papilles comme celles de Delia, abimées par le sucre et l'alcool? Oh, oui, un jour, elle y arriverait. Elle ne voulait pas voir Delia diabétique, bon sang!

" Ouais, bah toi aussi, alors, hein "
Aaaah, les vacances. Ces jours de répi professionnel, qui étaient censés vous requinquer en un rien de temps, sur une plage, à la montagne, ou dans une grande et jolie ville, remplie de cultures et de rencontres hasardeuses et souvent agréables. Ces sourires à longueur de journées, cachés derrière un livre, sous un parasol, dans un verre de vin ou une pinte de bonne bière, ces sourires adressés à ses proches, à sa famille, qui vous auront accompagné.

Ah, les vacances...
Tout ce qui n'était pas possible pour les deux rousses. Inenvisageable. Leur travail étaient tout ce qu'elles avaient, et Bianca, de son côté, savait que la seule personne pour peut-être partir avec elle était Delia, et ... well, Bianca et Delia, choisir la même hôtel ? Le même endroit où manger ? La même ville ? Impossible.
Donc non. Pas de vacances. Et puis, en avaient-elles vraiment envie ? De prendre le temps de se poser, de réfléchir à leur vie ? Franchement ?
" Un jour." finit-elle par répondre, se rêvant à trouver quelqu'un pour voyager à ses côtés. Un jour. Peut-être.
Sa cigarette se rapprocha de ses lèvres alors que Delia s'excuser. Bianca savait ce qu'elle allait faire. Commander de la mal-bouffe. Encore.

Lorsque sa soeur eut raccroché, la violoniste fronça les sourcils et pointa sa cigarette vers son double. Elle était calme, mais comme d'habitude, voulait trop bien faire.
" Tu n'as même pas goûté mon plat! A chaque fois, tu commandes autre chose! Tu sais que c'est mauvais pour toi! Bon Dieu, tu vas être diabétique dans quelques années, à te faire des piqures avant chaque repas, à devoir te priver à tout jamais de ce que tu aimes tant, le sucre, ce sucre qui t'abimes tant! "

Elle tira une nouvelle latte après avoir fini son discours de maman poule, regarda les pieds de sa soeur.

L'écran de télévision était allumé, mais Bianca attendait la réponse de sa jumelle concernant leurs parents. A chaque fois, elle avait cet espoir, cette once d'espoir. Vous savez, cet tout petit espoir, que vous savez illogique, mais quel vous vous raccrochez comme à un fil de pêche pour éviter la noyade. Elle espérait que sa soeur, un jour, réponde par un triste mais presque réconfortant "Oui, ils te donnent le bonjour". Mais même lui donner le bonjour, de loin, ils ne pouvaient pas.
Parce que Delia non plus n'avait jamais de nouvelles.
Bon, au moins, elles avaient Wilson...
Bianca leva tristement les yeux vers l'écran... diffusant des images qui la laissèrent bouche-bée.
Sans sa bouteille de vin dans les mains, la rousse avait le regard fixé sur la télévision, ses doigts serrant sa cigarette, aplatissant le pauvre filtre, l'air ahuri. Etait-ce son monde qui s'écroulait, là, comme ça, dans son salon, avec sa soeur morte de rire à ses côtés ?
Ses mains commencèrent à trembler. Elle se sentait comme cette étudiante, ou même cette femme qu'elle était à présent, cette femme fragile, qui, avant de monter sur scène, sentait ses jambes défaillir, son regard s'embuer, son coeur menacer de lâcher ?
Elle tourna lentement la tête vers sa soeur, ses yeux clairs mouillés.
" Tu trouves cela drôle ? "
Elle était calme. Bianca Hoogendijk ne s'énervait pas souvent.
" Enlève tes pieds de mon canapé, s'il-te-plait. "
Elle marque une pause, ses mains tremblant encore. Son cauchemar se réalisait. Tout ce qu'elle avait, son image, s'évanouissait devant ses yeux. Et sa soeur en riait.
" Je peux savoir ce qui te fait rire, exactement ? "

Son coeur battait la chamade, et alors qu'elle se levait brusquement, une larme coula doucement sur sa joue. Elle rejoint sa bouteille de vin et se servit un immense verre, entier avant d'en boire une dizaine de gorgées.
" Comment est-ce qu'une chose comme cela a pu arriver ? Comment ? "
Debout, la main devant les yeux comme se cacher de la réalité, la musicienne était perdue, affolée, tremblante, apeurée.

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MessageSujet: Re: ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia   ' Someone said they saw you, said they saw it as a sign . Well every single second catches up the next in line ' ;; Cordelia EmptySam 29 Oct 2016 - 19:38





Someone said they saw you
Cordelia & Bianca Hoogendijk



Cordelia se demandait parfois ce qui pouvait les unir, toutes les deux. Il n'y avait guère que leur physique qu'elles partageaient; tout le reste sonnait comme une dissonance désagréable, une relation forcée dans laquelle aucune des deux ne prenait de plaisir. Ne vous y trompez pas, pourtant : les deux jumelles étaient unies comme peu de personnes pouvaient l'être. Elles se connaissaient l'une l'autre mieux que personne. Leur amitié était étrange, peut-être incompréhensible, mais elle était réelle. Elles étaient unies par ce lien étrange qu'était la gémellité, et rien encore n'avait eu le pouvoir de les séparer. Il semblait pourtant qu'elle avait déjà tout vécu côte à côte et l'une face à l'autre, mais rien n'arrivait à se mettre en travers de leur amitié. Car c'était ce qu'elles étaient avant tout autre chose : elles étaient des amies, des meilleures amies. Elle pourraient tout se pardonner, elles le savaient. Rien ne serait assez fort pour les séparer : le sacrifice que Cordelia avait fait de quitter Philadelphie pour suivre et épauler sa soeur n'avait pas entaché l'affection qu'elle lui portait; Roy avait tenté de s'interposer entre elles, mais rien n'y faisait. Elles seraient toujours prioritaires l'une pour l'autre. Leur relation était complexe, incompréhensible aux yeux de la plupart de ceux qui pouvaient les côtoyer. Elles étaient si différentes et pourtant si proches. Il semblait qu'elles partageaient quelque de presque mystique tant leur lien tenait du mystérieux. Pourtant, elles se retrouvaient toujours, parce qu'elles se perdaient jamais vraiment.

Il n'y avait guère que pour ses concerts que Cordelia traînait des pieds. C'était là que s'arrêtait l'amour qu'elle pouvait portait à sa soeur jumelle : son indifférence à cette musique de chambre prenait forcément le dessus, accompagnée incontestablement de ce monde d'apparats dans lequel elle se sentait paria, au même titre que dans sa famille. Pourtant, la rousse estimait chacune de leurs rencontres. Bianca était sa meilleure amie avant d'être sa soeur, sa confidente avant d'être son clone. La majorité de leurs proches ne pouvait pas comprendre tout ça; personne, d'ailleurs, ne pouvait comprendre ce qui les unissait. Elles avaient été forgées par cette gémellité, mais aussi par tout ce que la vie avaient pu faire de l'une comme de l'autre. Le temps les avait unies au lieu de les séparer, et elles étaient aujourd'hui la plus grand force l'une de l'autre. « Un jour. » Toutes les deux savaient très bien ce que cela signifiait. Cela faisait des années qu'elles se promettaient des vacances, mais qui pourrait tomber dans cette illusion qu'elles forgeaient à travers ces fausses promesses ? Aucune d'elles ne prendrait de vacances, probablement jamais. Elles vivaient, l'une pour l'autre, pour leur travail, et peu importe ce qu'il pouvait signifier pour elles. Cordelia imaginait Bianca épanouie dans sa musique, comme Bianca devait l'imaginer épanouie à tenir ce stand de tir miteux. Elles n'étaient plus grand chose d'autre que leurs professions respectives, parce que l'une comme l'autre n'avait jamais réussi à accorder d'importance à quoi que ce soit d'autres. « Un jour », approuva la rousse avec un sourire pincé. Jamais, hurlait son sourire. Et puis, avec qui pourraient-elles prendre des vacances ? Oseraient-elles le faire ensemble ? Trouveraient-elles une destination idéale pour elles deux ? Elles n'avaient pas les mêmes aspirations, elles n'avaient pas la même définition même du mot vacances. Elles finiraient probablement par tomber d'accord sur un retour aux sources, auprès de leurs parents, à Philadelphie, et en ressortaient aussi détruites l'une que l'autre. Elles avaient trouvé ici, sous le soleil californien, une stabilité réconfortante mais fragile que Cordelia n'était pas prête à prendre le risque de perdre, même au nom du repos. Elle n'avait pas besoin de repos, elle avait besoin d'être épanouie dans tout ce que pouvait être son quotidien. Et son quotidien, depuis bien trop longtemps déjà, s'était transformé sous ses yeux impuissants à une suite sans fin d'obligations fades, si ce n'était douloureuse. Elle se demandait parfois ce qui avait pu la pousser à mettre toutes ces modiques économies dans ce stand de tir miteux. Elle n'était même pas propriétaire de l'appartement pitoyable qui lui servait de foyer; le seul prêt que la banque avait daigné lui accorder avait été entièrement dédié à ce stand de tir.

Et comme à chaque fois qu'elles se retrouvaient, le même schéma se mettait doucement en place : Cordelia commanda sa pizza préférée de sa pizzeria préférée. Elle ne faisait même plus attention au regard que lui lançait Bianca; elle ne le connaissait que trop bien. Son regard se posa sur la cigarette menaçante que brandissait sa soeur. Elle savait d'ores et déjà ce qu'elle allait dire. « Tu n'as même pas goûté mon plat! Blabla blablabla blabla » Le regard de la rousse était hypnotisée par les lèvres de Bianca, qui bougeaient sans qu'elle ne se préoccupe pour autant de ce qu'elle pouvait bien être en train de raconter. Elle tenait sans aucun doute possible le même discours que d'habitude. Ce n'est que lorsqu'elle s'arrêta de parler qu'elle lui lâcha la même chose que d'habitude, comme si ce petit jeu était devenu une tradition presque nécessaire. « Si je finis diabétique, c'est que j'aurais profité. Si j'arrête de profiter, j'aurais pas profité » lâcha-t-elle avec une lassitude amusée. Le regard que posa sa soeur sur ses pieds manquèrent de la faire soupirer. Elle se demandait parfois comment elles avaient pu évoluer de façon si différente l'une de l'autre. L'appartement de Cordelia était à peine rangé, tandis que celui de Bianca pourrait servir de bloc chirurgical sans aucun soucis. Non, pas de nouvelles de leurs parents... mais était-ce vraiment une si mauvaise nouvelle de ne pas en avoir ? Cordelia en était venue à apprécier ce silence pour ce qu'il était : une absence de critiques et reproches.

Mais cette fois-ci, si les traditions n'en étaient pas oubliées, Cordelia savait que quelque chose serait encore différent. Les nouvelles locales n'avaient pas manqué de mentionner le gala de la veille auquel avait été conviée sa soeur... et Delia avait vu les images. Gênée d'abord, puis amusée à l'idée que sa soeur en profite à son tour. Elle porta sa cigarette à ses lèvres, son regard clair voguant calmement de l'écran de télévision à sa soeur, puis de sa soeur à l'écran de télévision. Sa mine déconfite lui fit un peu de peine, mais elle ne put empêcher son sourire de s'étirer. « Tu trouves cela drôle ? » La voix de Bianca était lisse et calme, presque effacée. « Bah oui » éclata de rire Cordelia. Elle se refréna aussitôt, obéissant presque docilement à sa jumelle en retirant ses pieds de son canapé, non sans lever les yeux au ciel. « Je peux savoir ce qui te fait rire, exactement ? » Bianca n'en démordait pas, et Delia lui donna un coup d'épaule amical pour la réconforter, presque plus amusée par la catastrophe que semblait représenter l'événement aux yeux de la musicienne que par l'événement lui-même. « C'est bon, t'es en arrière-plan, personne a rien vu... à part moi ! Dis-donc, t'es encore bien faite pour ton âge. » Mais Bianca n'était pas réconfortée; ses yeux embués firent mal à Delia, qui masqua cette drôle d'empathie qu'elle ressentait beaucoup trop facilement lorsqu'il s'agissait de sa confidente. Elle tendit son verre à Bianca pour qu'elle la resserve dans la foulée. Son regard s'était accroché à la télévision, fuyant à tout pris celui de sa soeur. « Bah écoute, c'est arrivé parce que tu portais pas de soutien-gorge. Mais en même temps, regarde ta robe, t'allais pas mettre un soutien-gorge ! T'as pris la bonne décision. » Elle hochait gravement la tête, comme pour accentuer chacun de ses mots. « Personne a rien vu sur place », ajouta-t-elle avant de souffler de façon à peine audible : « sinon on te l'aurait fait remarquer. » Elle se racla la gorge, et se redressant sur le canapé pour fixer sa soeur, ajouta : « Et puis ton instinct de survie a pris le dessus, t'as pas paniqué ni rien ! En plus on te reconnaît à peine à la télé, t'étais trop loin ! C'est pas un drame... » C'est Spirit qui entra dans la partie en trottant jusqu'aux pieds de Bianca pour s'asseoir à quelques centimètres d'elle, la regardant tendrement, la langue pendante. « Calme-toi, ça va creuser tes rides », lâcha Cordelia durement, avant de sourire, la tête penchée. « Toi qui te languissais de maman, t'as vu, je me mets à parler comme elle juste pour tes beaux yeux ! »
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