FLASH BACK

*Clap, clap, clap, clap…*Les talons de mes chaussures résonnaient sur le trottoir. Mes longues et fines jambes n'étaient couvertes que par un mince collant. Ma jupe à sequins argentés et mon top noir au décolleté sexy étaient cachés sous mon manteau. Emmitouflée, j'avançais rapidement. J'avais quitté le club quelques instants auparavant, refusant de me faire raccompagner. J'avais toujours été indépendante, un peu trouillarde c'est vrai, mais je ne voulais pas me retrouver seule avec le gros lourd qui avait passé sa soirée collé à mes baskets. Je préférais rentrer toute seule plutôt que de lui demander de m'escorter jusqu'à ma voiture. La rue était déserte et sombre malgré la lumière des réverbères. Je devais encore parcourir quelques mètres pour rejoindre le parking souterrain où mon cabriolet m'attendait. Pour éviter de flipper, je me mis à chantonner tout doucement pour me rassurer. J'ai toujours détesté le noir. J'atteignis finalement la porte menant aux escaliers, je priais pour qu'il n'y ait pas de clochard ou de mec louche et écorché. Je n'avais pas vraiment envie de me faire embêter ce soir. Heureusement j'avais dans mon sac un spay anti-agression et je savais donner des coups de pieds. Cela dit, je n'étais pas non plus très lourde, j'étais même ce qu'on appel communément un "poid-plume". Un gros type bien baraqué pourrait faire de moi son diner s'il le voulait. Je me dépêchais de descendre jusqu'au niveau -2 du parking. J'ouvris la porte et je me retrouvais au milieu des rangés de voitures. Je baissais les yeux sur mon sac en même temps que j'y cherchais mes clés avec ma main droite. Un bruit de pas se fit entendre. Je me tournais brusquement. Personne. Une boule commençait à se former dans mon ventre. J'accélérais la cadence. J'apercevais ma voiture. Mes clés en mains, j'entendis plusieurs pas cette fois. " Qui est là? " Demandais-je à tue-tête. Je commençais à flipper. Je fis volte face pour reprendre ma marche et je vis alors un homme en tenue sombre se jeter devant moi. "Bouh!" Je laissais tomber mes clés au sol sur le coup de la peur. " Je… Je … Prenez mon sac si vous voulez, prenez ma voiture! Je vous donne tout!" Vachement courageuse hein? On m'avait toujours dit que dans ces cas là, le mieux à faire si on ne voulait pas risquer de se mettre encore plus en danger était encore de céder ses possessions. De toute façon entre ma voiture, mon portable ou encore ma carte bleue et ma vie, le choix est vite fait. " Voyons Leah… Tu sais bien que ce n'est pas ce que je suis venu chercher! " Mon prénom? Il connaissait mon prénom. Sa voix et son visage découvert ne me rappelaient rien. "Tu ne me reconnais pas, pas vrai?" je hochais la tête, paralysée par la peur. J'essayais d'évaluer mes possibilités. M'enfuir semblait difficile, où pourrais-je me cacher? Je devais rejoindre la rue… Crier? Peut-être que cela l'énerverait encore plus… Tant pis. Alors qu'il fit un pas vers moi j'ouvris la bouche et je me mis à hurler le plus fort possible. Il s'élança sur moi tandis que je me mis à courir. Je sentis sa main attraper mes cheveux et me propulser en arrière. Plus aucune pensée claire ne me traversait l'esprit. Tout était brouillon. Alors que j'étais sur le sol, allongée sur le dos, j'essayais de me relever mais il se mit au dessus de moi. Je me mis à le supplier, je ne me rendais même pas compte que j'étais en train de pleurer. " Pitié… " Il caressa mon visage avec la paume de sa main. "Chut!" Son visage s'approcha du mien. Je sentais son souffle sur ma peau, il me dégoûtait. " Pitié!" Je répétais. " La ferme pauvre conne! " Il me gifla violemment et souleva mes épaules du sol pour les y replacer dans un coup brusque la seconde suivante. " Tu te tais, c'est clair?!" Un sanglot m'étrangla. Qu'allait-il me faire? Il se mit alors à me chuchoter ces mots: " T'as pas arrêté de me chauffer sur ton blog, dans tes émissions débiles, tu crois que j'ai pas compris ton petit jeu? Quand je t'ai vu à ta séance de dédicace t'as fait semblant de ne pas me reconnaitre, ça m'a mit hors de moi… Et tu recommences aujourd'hui! " Sa voix allait crescendo, il commençait à crier. Je sentais que je l'avais, malgré moi, mis très en colère. Soudain je me rappelais avoir reçu des commentaires haineux, je me souviens clairement avoir déjà vu de sacrés troll sur mon blog mais il n'y en avait qu'un qui avait déjà menacé de me tuer. Je ne l'avais pas pris au sérieux. Je me mis à trembler, je pleurais toujours, je sentais la crise de panique arriver. "Pourquoi tu pleures salope?" Il se releva d'un bond. Je restais figée sur le sol. Soudain, je pris un énorme coup de pied dans les côtes, un autre dans le ventre. ll se pencha et m'attrapa par le col de mon manteau. Je tenais à peine debout tant la douleur et la peur m'avaient endolori. Je gémissais alors qu'il collait son front sur le mien. Je voulais qu'il cesse de me toucher. Je voulais qu'il parte. Mais a cet instant précis j'étais sûre qu'il allait me tuer. Je pensais alors vaguement à ma famille: Marissa, Eden, et Faith. Emma. Papa et maman. Mais aussi à mes amis: Adam, Lissa et Harper. Noah. Winnie. Charles et les autres. A quel point j'aurais aimé que l'un d'eux soit là pour me sauver. Je sentis une énorme gifle venir m'assommer. Je cru perdre connaissance mais en réalité j'étais encore bel et bien réveillée. J'aurais voulu qu'on en finisse maintenant, qu'il m'achève et que je n'ai pas a en supporter d'avantage en étant consciente. Il me balança à nouveau sur le sol, ma tête frappa le béton. Je pleurais en silence. L'aggression sembla s'éterniser durant des heures encore. En réalité elle avait duré moins de soixante minutes. J'étais dans un état pire que lamentable lorsqu'on me découvrit enfin après avoir gisée sur le sol durant un certain temps. Mes vêtements étaient en lambeaux et couverts de sang. J'avais le corps meurtri, ensanglanté, le visage douloureux et j'avais l'impression que chaque os qui me constituait avait été brisé, mes muscles étaient terriblement endoloris. Je sentis des gens s'approcher. Il me semble qu'une femme hurla en me voyant. Un homme lui ordonna d'appeler les secours. Il s'approcha de moi et se mit à me parler très doucement. "Ça va aller mademoiselle, ça va aller. Les secours vont arriver… Ça va aller." À bout de force je me mis à sangloter dans ses bras. L'homme me prit la main pour me rassurer. Ensuite j'ai dû perdre connaissance car je ne me souviens pas avoir été mise sur un brancard, ni même avoir fait le trajet jusqu'à l'hôpital.

FIN DU FLASH BACK

J'ouvris les yeux. À peine la lumière de ma chambre atteignit-elle mes paupières que je me mis à gémir. Je ne pouvais plus bouger. J'essayais de me relever un peu et c'est alors que j'aperçu Marissa dans un siège. Elle était endormie, une couverture à moitié mise sur ses jambes. Je ne voulais pas la réveiller. J'essayais de deviner l'état de mon visage. Je tentais d'ouvris la bouche mais le côté gauche de ma face me faisait si mal que je me résignait. Je soulevais légèrement mon bras pour m'aider de ma main à appuyer doucement sur mon ventre où je me souvenais avoir pris les coups. Le pique de douleur se fit ressentir au niveau des côtes, lesquelles, j'en était sûre, étaient brisées. Je gémissais à nouveau, plus fort cette fois. Marissa ne bougea pas. Déplacer mes jambes relevait du véritable défis surhumain. Soudain, j'avais terriblement peur. Et si j'étais salement amochée, au point où j'étais complètement défigurée? Et si je gardais des séquelles physiques de mon agression? Je fermais les yeux une seconde pour essayer de me détendre mais le visage de mon agresseur apparu à nouveau et je ne pu retenir un cri d'effroi. Je rouvris les yeux, Marissa de son côté avait été brusquement réveillée. Je me mis alors à sangloter comme une enfant. Je voulais être forte, mais j'avais eu tellement peur. J'avais d'ailleurs du mal à croire que je n'étais pas morte. À moitié assise dans mon lit d'hôpital j'étais complètement traumatisée, aux pleurs vinrent se joindre les tremblements. Je ne m'étais jamais sentie aussi mal de toute ma vie. Pourtant, la personne que j'aimais le plus au monde se tenait dans la pièce . Que se passerait-il si même elle n'avait plus le pouvoir de me faire me sentir bien? Arriverais-je encore à me sentir en sécurité? Marissa était la plus apte à me calmer et me réconforter car elle était celle qui m'avait toujours le plus soutenue. Le retour d'Emma était encore récent, nous n'étions pas tout à fait à l'aise l'une avec l'autre, mais honnêtement j'étais tellement mal et j'avais tellement mal qu'une paire de bras réconfortants en plus ne me ferait que du bien, je me demandais si elle était là, et si mes parents étaient là eux aussi. Mais je me rappelais in extremis qu'ils étaient partis en croisière pour le mois et qu'ils ne pouvaient tout bonnement pas être là. Je regardais Marissa, les yeux remplis de larme, telle une petite fille en détresse, j'étais dévastée, anéantie et je ne voulais qu'une seule chose: qu'elle me prenne dans ses bras et qu'elle me dise que tout irait bien même si pour le moment je ne pouvais pas y croire. Je n'avais plus vingt cinq ans, je n'étais plus une adulte avide de conversations coquines avec sa grande soeur et meilleure amie, non, j'étais cette petite chose fragile, meurtrie et apeurée, et ce que je voulais le plus au monde étaient l'étreinte réconfortante de mon aînée. Je me sentais si minuscule, si petite, si insignifiante. J'avais honte. Honte de pleurer, honte que Marissa me voit ainsi, honte de me comporter comme une enfant, honte d'avoir peur, honte d'avoir mal, honte d'avoir été agressée. Mes sanglots étaient trop gros, trop violents, ils me faisaient mal au ventre, je n'arrivais pas à respirer à cause des côtes cassées et des larmes qui m'étouffais. En un mot, j'étais à l'agonie.

marissa, leah and emma

« Goodnight, featuring Stewart Co'»

Assise sur un brancard se trouvant dans le couloir, la jolie brune balançait ses pieds dans le vide tandis qu’elle notait rapidement quelques mots sur des pages administratives. Ce n’était pas ce qu’elle préférait dans son boulot, mais elle dirigeait son service et n’avait donc pas le choix que de vérifier chaque dossier, revoir les dosages des patients, guider au mieux son équipe, valider les sorties de certains tandis qu’elle signait l’acte de décès d’autres… Baillant légèrement elle posa son regard sur la montre se trouvant à son poignet, cinq heures du matin, de quoi la déprimer encore plus. Elle descendit du brancard se dirigeant vers son bureau, traînant légèrement les pieds se moquant un peu du bruit que provoquez ses talons du coup. Une fois dans son bureau elle se posa sur le canapé, retirant ses talons elle s’allongea sur toute la longueur avant de fermer les yeux. S’il y avait une urgence on la biperait ! Les soirs de garde étaient difficiles, la jolie brune avait beau être responsable de son service ça ne lui donnait pas tout les droits, même quand elle était de repos elle pouvait être appelé, c’était usant par moment mais d’un autre côté elle était tellement fière d’être la meilleure ! Alors qu’elle dormait profondément, la porte du bureau s’ouvrit rapidement, ouvrant ses yeux elle aperçu une infirmière qui lui indiqua rapidement qu’un accouchement tournait mal et qu’on avait besoin d’elle. Se relevant rapidement, elle posa sa main sur son front fermant les yeux quelques secondes quelque peu étourdit, il fallait qu’elle pense à manger quelque chose, à se forcer pour au moins tenir debout ! Elle délaissa ses talons, passant des chaussures adaptées avant de courir tout en s’attachant les cheveux en une queue de cheval rapide. Elle fut rejointe rapidement par deux hommes qui venaient également en renfort, montant dans l’ascenseur l’un d’eux expliqua la situation à la jolie brune qui avala un chewing-gum le mastiquant nerveusement.

Fermant les yeux quelques secondes elle soupira avant de déclarer l’heure du décès à son équipe, elle quitta la salle d’opération balançant sa blouse par terre avant de s’engouffrer dans le sas pour se laver les mains, le visage et retirer le sang de sa patiente décédée. Sortant du bloc elle du affronter son mari en pleure avant de comprendre que jamais il ne rêverait sa femme et qu’il devrait élever sa fille seul, il l’insulta tandis qu’elle resta de marbre ne montrant aucun sentiment. L’un de ses collègues reprit la suite éloignant cet homme, elle passa ses mains dans ses cheveux retirant son élastique se demandant ce qu’elle foutait encore là à tenter de sauver des vies alors qu’elle ne faisait qu’échouer ! Une infirmière courait en sa direction et elle s’apprêtait à aller à nouveau dans le bloc mais cette dernière lui apprit autre chose que ceux à quoi elle s’attendait. Face aux paroles de l’infirmière, elle relâcha sa main laissant tomber au sol son élastique avant de perdre l’équilibre et par chance elle tomba sur les chaises qui se trouvaient dans le couloir. Posant sa main sur sa poitrine, elle n’arrivait plus à respirer, elle tentait de se concentrer sur ce que lui disait la jeune femme mais c’était impossible, elle ne retenait que le début. Leah venait d’être hospitalisé en urgence après une agression et les mots qu’elle utilisait Marissa les connaissaient assez pour savoir que sa sœur était dans un sale état. Se relevant brusquement elle parti en courant, poussant deux, trois personnes sur son passage, des charriots avant de débarquer dans un ascenseur qu’elle insulta de tout les noms car il était trop lent. Une fois les portes ouvertes elle reprit sa course avant d’arriver à destination, elle se stoppa net en apercevant des policiers. Un collègue vint vers elle, ils ne se connaissaient pas vraiment mais bon les « grands » de cet hôpital se connaissaient au moins de vus. Il lui expliqua la situation rapidement, ne perdant pas de temps car il ne parlait pas à un simple membre de famille mais bel et bien à un médecin.

Elle avait prit place aux côtés de sa sœur attendant son réveil, avant de se décider à s’installer dans un fauteuil. La jolie brune avait essayé de luter contre le sommeil sans succès, elle parti loin très loin même. Se fut un cri qui la réveilla brusquement, se rendant compte qu’elle s’était endormi elle posa aussitôt son regard sur sa petite sœur. En croisant son regard elle tenta de lui adresser un sourire mais il fut de courte durée, remplacée rapidement par des larmes Marissa ne pouvait pas se contenir, on avait fait du mal à sa petite sœur et ça lui était insupportable. Ce montre devait payer ! Se levant du fauteuil elle avança vers Leah rapidement, prenant place sur le bord du lit avant de l’entourer de ses bras faisant attention à ne pas lui faire de mal. « Ça va aller, tout va bien se passer je suis là ma puce. » Caressant les cheveux de sa sœur de façon douce, elle posa son front contre la chevelure de la petite dernière des Stewart tentant de la calmer comme elle pouvait. Leah était en sanglot, elle souffrait tellement ce qui était insupportable à la jeune femme qui pleurait également. Elle releva sa tête posant son regard sur sa sœur « respire, ça va aller. Calme toi chérie, inspire doucement et expire… » Non ça n’allait pas et ça n’irait pas, mais elle ne pouvait pas lui dire une telle chose, elle se devait de la consoler.

Sentir la présence de Marissa à mes côtés me soulagea un peu. Je me sentais forcément moins seule, mais les souvenirs de l'agression restaient encrés en moi et pire encore, même si on m'avait sans doute bourré de calmants pour la douleur, j'avais mal. Je ne pouvais pas parler, pas encore. A la minute où elle s'était levée, elle aussi en larmes, je savais que s'en était fini de moi. A peine sentis-je sa main me toucher, caresser mes cheveux, je voulais me blottir contre elle. Elle répétait que tout irait bien, qu'elle était là et j'avais tellement envie de la croire. En un instant, mon monde venait d'être changé. Je n'étais plus sûre de rien, je ne me sentais plus en sécurité, ni rassurée, ni quoique ce soit et j'avais l'impression qu'on avait pris toute la joie de vivre qui se trouvait en moi. Je me sentais salie et atteinte au plus profond de moi-même. Qu'avais-je fais pour mériter cela? Je n'étais peut-être pas la fille la plus sympa, la plus adorable, la plus parfaite… mais je n'avais jamais pensé pouvoir provoquer tant de haine. Cet homme dont la voix raisonnait encore dans mon esprit, il me détestait. Il me haïssait au point même de vouloir me faire endurer les pires supplices, de me voir souffrir et de me laisser pour morte. Marissa essayait de me calmer tant bien que mal, je tentais à mon tour de faire ce qu'elle me disait mais même respirer était devenu difficile. Je manquais tellement d'air, même une chose aussi naturelle que cela me demandait un effort surhumain, et pas seulement à cause de mes blessures, aussi parce qu'à cet instant précis, j'aurais voulu mourir dans les bras de ma soeur. Si on m'avait arraché le coeur pour le piétiner, l'effet aurait été le même. Je ressentais un trou béant, le vide à l'intérieur de moi-même. Mes pensées étaient toutes chamboulées, je me perdais d'autant plus dans le regard de Marissa. Je cherchais en elle quelque chose qui me donnerait la force de continuer. On pouvait rester ainsi encore quelques instants, j'avais besoin de me lâcher, juste encore un peu… Finalement j'arrivais à articuler quelques mots alors que les larmes se calmaient. " Je suis désolée… tellement désolée. " Ma voix se brisa en un sanglot que je réprimais aussitôt. Il allait falloir que j'arrête de pleurer. Je ne pouvais pas continuer ainsi, d'autant plus que cela m'épuisait d'avantage. J'essuyais mes yeux avec ma main. Je pouvais sentir des fils sur ma pommette droite, j'avais été recousue… Mon Dieu! J'inspirais doucement, puis j'expirais. Je tentais de reprendre le contrôle. J'avais tellement de chose à dire à Marissa: tout d'abord je voulais la remercier d'être là pour moi, comme toujours. Le simple fait de la voir, d'entendre le son de sa voix… tout cela m'aidait à me ramener à la réalité, cela m'aidait à m'échapper de l'enfer que mon esprit était devenu. Je me retrouvais prisonnière de mes propres souvenirs. Les flashbacks de la nuit passée se rejouaient en boucle dans ma tête. J'avais tellement envie que cela s'arrête!

FLASH BACK

"Chuuuuuuuuut!" murmura-t-il, sa bouche presque collée à mon oreille. Je détournais la tête, mais il commença à me caressait le visage. Entre violence et tendresse, il ne savait pas sur quel pied danser. Si j'osais faire un mouvement brusque, il me battait, si je restais immobile il venais se frotter à moi. J'avais l'impression d'être son jouet, mais au delà de l'impression c'était bien une réalité. Il pouvait faire de moi ce qu'il voulait. De toute façon, avec les coups qu'il m'avait déjà porté, je n'allais pas tenter de lutter d'avantage. "Douce petite Leah… Je savais bien que ta peau serait agréable… Au moins tu ne me déçois pas trop sur ce point là." Il me dégoûtait tellement, j'avais envie de vomir. Déjà que les coups de pieds que je m'étais pris dans le ventre m'avait retourné l'estomac, rien que de sentir son souffle sur ma peau j'avais des haut-le-coeur. "Cela dit… J'avoue que je suis déçu sur un autre point! Tu as voulu me semer compagnie, ce n'était pas très gentil." Je gémissais tandis qu'il glissait ses doits sur mes jambes. Mon collant était sans doute arraché parce que je pouvais sentir le sol froid sous mes cuisses et la chaleur de ses mains… "Est ce que tu es désolée? Dis moi, t'es prête à te faire pardonner? Il faut s'excuser quand on fait une bêtise tu sais…" Il me parlait comme à une enfant, avec sa voix de psychopathe. Je hochais la tête pour lui faire plaisir et qu'il cesse de me toucher d'avantage. J'espérais que des excuses serait suffisante pour qu'il me laisse tranquille même si au fond de moi j'avais bien conscience que cela ne serait sans doute pas assez. "Dis le!" M'ordonna-til soudainement plus agressif. Ce type avait de sérieux problèmes de bipolarité… Il se plaça au dessus de moi, ses yeux tombant juste sur les miens. Il me fixait et j'avais beau tenter de regarder ailleurs, il m'attrapa le menton pour me forcer à le regarder à mon tour. " Je suis désolée" soufflais-je. Je me remis alors à pleurer et il me gifla, une fois de plus.

FIN DU FLASH BACK

Je fermais les yeux tout en laissant échapper un long gémissement. Qu'on me crève les yeux, qu'on me perce les tympans, que l'on m'empêche de penser! Qu'on le fasse maintenant! J'attrapais la main de Marissa et la serrais, glissant mes doigts entre les siens. Je restais encore silencieuse avant de lever les yeux vers elle. Ma lèvre inférieur se mit à trembler. Je ne voyais pas d'issue pour moi mais peut-être que raconter ce qui s'était passé à quelqu'un m'aiderait à ne plus y penser, ou en tous cas à ne plus revivre cela à l'infini. " Il … Il connaissait mon prénom. " Je parlais lentement, bégayant un peu, des sanglots pris au fond de ma gorge ne demandaient qu'à sortir mais je les ravalais tant bien que mal. J'essuyais une larme qui coulait le long de ma joue avec la paume de ma main. " J'ai essayé de m'enfuir… mais il … il … Il était tellement en colère. " Je marquais une pause. J'essuyais une nouvelle larme. " Il m'a couru après et il m'a mise au sol… Je n'ai rien pu faire… Je … j'avais tellement peur. ". Je fixais mon lit, évitant de croiser le regard de ma soeur. Je me sentais tellement humiliée que j'en arrivais au point j'avais la sensation d'être la coupable de l'histoire. J'ai toujours pensé que si un truc du genre m'arrivait je ne serais pas du genre à me culpabiliser, je pensais que j'aurais totalement conscience d'être une victime, mais vivre la situation pour de vrai… C'était différent. Je n'arrivais pas à chasser cette part de responsabilité que j'éprouvais. D'une façon ou d'une autre j'avais bien dû faire quelque chose pour mériter ce qui m'était arrivé. Rien n'arrive par hasard.

marissa, leah and emma

« Goodnight, featuring Stewart Co'»

Marissa ne pouvait retenir ses larmes, elle était abattu par ce qu’avait subit sa sœur et ce qu’elle continuerait à subir durant quelques temps. Comment pouvait-on faire du mal à quelqu’un, homme ou femme peu importe il ne fallait pas être humain pour oser faire une telle chose. La jolie brune n’imaginait même pas une seule seconde qu’on pouvait vouloir faire du mal à sa petite sœur, elle est douce, agréable et toujours là pour les gens comment lui faire subir de telles choses ? Marissa n’arrivait pas à accepter cette réalité, c’était beaucoup trop difficile à admettre et elle n’imaginait même pas comment leurs parents allaient réagir. Leah agit subit une agression importante, Marissa n’avait pas les détails malgré son statut de sœur le secret médical était bien protégé cependant elle n’avait qu’à poser son regard sur cette dernière pour voir avec horreur les marques qu’il avait laissé de son passage. Leah souffrait, ses gestes semblaient être difficile à faire, le simple fait de pleurer semblait être une vraie torture pour elle. La jeune femme s’excusa, elle était désolée de ce qui s’était passé apparemment et ça c’était hors de question. Marissa éleva le ton « Je t’interdis de t’excuser Leah, tu m’entends ? Tu ne t’excuseras pas pour tout ceci, tu es une victime… et c’était à nous de te protéger. » Hors de question que sa sœur se sente fautive, il n’y avait qu’un seul coupable dans cette histoire et c’était l’homme qui avait commis ce crime et elle espérait bien qu’il paie tout ceci. Si seulement elle pouvait savoir qui il était, si seulement elle pouvait se venger pour le mal qu’il avait fait subir à sa petite sœur…

Leah semblait être parti dans ses pensées, la jeune femme l’observait se demandant si elle voudrait un jour parler de son agression. Il était peut être trop tôt et Marissa ne voulait pas la forcer, il était peut être préférable qu’elle en parle avec un professionnel. Ça faisait penser à la belle brune qu’elle n’avait pas été chez son psychologue depuis pas mal de temps, elle ne cessait de repousser son rendez-vous depuis des semaines. En même temps que pouvait-elle lui dire ? Qu’elle était perdue au point qu’elle était capable de prendre sa voiture et de partir n’importe où, qu’elle voulait revenir en arrière au point de tout recommencer ou qu’elle avait couché avec son meilleur ami et qu’elle ne savait plus quoi faire ? Non c’était préférable de ne pas aller à ce rendez-vous ! La jeune femme sortit de ses pensées en attendant un gémissement crée par sa sœur, elle posa son regard très inquiète sur Leah. Serrant sa main dans celle de sa sœur, elle essaya de lui adresser un sourire rassurant pour lui montrer qu’elle était là, près d’elle. Elle sentit une nouvelle larme couler sur sa joue alors que sa petite sœur lui avouait que son agresseur connaissait son prénom, passant sa main dans les cheveux de la jeune femme elle prit la parole. « Ils vont le retrouver, la police va le retrouver… je sais que ce n’est pas suffisant mais je t’assure qu’il paiera ! » Si cet agresseur connaissait le prénom de la jeune femme ça voulait sûrement dire qu’il la surveillait, et peut être depuis longtemps ce qui faisait froid dans le dos à la jeune femme. Leah continua de lui expliquer ce qui s’était passé, sans trop en dire mais ces simples mots étaient déjà difficiles à sortir pour la jeune femme. Marissa la prit une nouvelle fois des ses bras, si il le fallait elle la garderait contre elle des heures. « C’est normal Leah, tu ne pouvais rien faire, quoiqu’on dise dans ce genre de situation on reste impuissante. Je ne veux pas que tu te sentes coupable, que tu imagines que tu aurais pu faire quelque chose pour que ça ne se termine pas ainsi… je sais que tu as fais de ton mieux, que tu t’es battu comme tu as pu et c’est pour ça qu’il ne faut pas que tu t’en veuilles. »

« DRinnnnnnnggggggg » C’était la sonnerie de son téléphone qui retentissait. Il était tard, très tard et Emma se demandait qui pouvait bien l’appeler à cette heure-là. Elle reconnut sans mal le numéro de l’hôpital, sans attendre elle décrocha se demandant qu’est-ce qu’on lui voulait. « Allo… » Dit-elle d’une voix encore un peu endormie. « C’est Jess… Il est arrivé quelques choses à ta sœur… » Emma se redressa d’une bon l’estomac à présent noué par l’inquiétude. « Laquelle ? Qu’est ce qui s’est passé ? » Elle avait des milliers de question. Jess répondit : « Leah… Elle s’est fait agresser. Tu devrais venir. » Ni une ni deux Emma était debout et elle répondit : « J’arrive ! » Et elle raccrocha, pas de temps à perdre elle chopa les premières fringues qui lui passèrent sous la main et les enfila. Elle fila dans la chambre de Lilou qui dormait à point fermer. Elle réveilla doucement sa fille et lui enfila simplement son manteau et une paire de basket. Elle n’avait pas franchement le temps de l’habiller convenablement. Elles étaient prêtes toute les deux, elle sortit en trombe de chez elle et installa lilou dans le porte bébé de son vélo. Et hop direction l’hôpital. Emma ne se souvenait pas avoir un jour pédalé aussi vite. Elle arriva à l’hôpital en quelques minutes, elle posa son vélo contre un mur sans prendre le soin de l’attacher elle n’avait pas vraiment le temps. Le temps d’arriver à l’hôpital Lilou s’était déjà rendormie. Elle attrapa sa fille et fila jusqu’au service dans lequel Leah se trouvait. Elle croisa Jess qui l’emmena jusqu’à la chambre de sa petite sœur. Elles étaient à présent devant la porte et elle pouvait entendre la voix de Marissa retentir. « Laisse moi ta fille je vais la coucher dans la nurserie et tu la reprendras tout à l’heure… Je te bip si elle te réclame. » Emma adressa un sourire à sa collègue et lui donna Lilou : « Merci. »

Elle frappa ensuite un coup à la porte de la chambre de Leah et entra dans la chambre sans vraiment attendre qu’on lui dise d’entrée. Mais l’angoisse était insoutenable elle voulait voir comment se sentait Leah. Et mieux elle voulait être simplement présente pour sa petite sœur. Elle était de retour et Emma avait bien dit à sa petite sœur qu’elle serait là pour elle. Emma se dirigea droit sur ses petites sœurs qui étaient enlacée l’une contre l’autre. Elle ne manqua pas de remarqué que sa petite sœur était salement amoché… Il n’en fallait pas plus pour qu’elle soit dans une colère noire, elle masqua cependant sa rage. Elle l’a réservait à l’homme qui avait osé toucher sa petite sœur, il fallait qu’il paie… Marissa avait finalement lâché Leah, et Emma vint déposer un baiser sur le front de sa petite sœur comme elle le faisait quand celle-ci était petite. Elle demanda alors à sa sœur : « Comment tu te sens ma puce ? » Inutile de demander comment ça c’était passé, elle ne voulait pas obliger sa sœur à lui raconter comment c’était arrivé. Tout ce qui importait c’était qu’elle soit en vie. Emma avait appelé Leah par son surnom, celui qu’elle lui donnait quand elle était petite. Elle avait toujours utilisé ce surnom quand elles étaient plus jeunes. Elle avait l’impression d’avoir fait un bon de 10 ans dans le passé, là où elle était encore au chevet de sa sœur nuit et jour quand celle-ci était malade. Em’ posa ensuite son regard sur Marissa, pour le coup elle ne savait pas vraiment quoi dire à sa sœur. Mais bon c’était pas le moment de s’embrouiller avec sa petite sœur elle dit alors : « Salut… » C’était court, simple, neutre…

Le ton de Marissa se faisait plus ferme mais pas dur. Elle n'était pas en train de m'engueuler, et encore heureux! On ne se criait jamais dessus, ça n'allait pas commencer aujourd'hui… surtout pas aujourd'hui. Mais je savais qu'elle avait raison. J'étais une victime et je n'avais pas à m'excuser. Pourtant c'était dur de ne pas répéter encore et encore ces quelques mots. "Je suis désolée". C'était tout ce qui me venait à l'esprit. Sentir la présence de Marissa, entendre sa voix et pouvoir la serrer contre moi c'était tout ce qui me rattachait à la réalité de l'instant présent. "Pardon." soufflais-je avant de me corriger pratiquement aussitôt. "Non pas pardon… Je… " Je n'arrivais pas à trouver mes mots. Dans ma tête les idées n'étaient même pas claires. Je pris une respiration profonde. "Je suis…" En fait je savais ce que je voulais dire mais je n'y arrivais pas. Je sentais une boule se former dans ma gorge. Je ne pouvais pas le dire sans pleurer à nouveau et Dieu sait que j'étais épuisée de pleurer. En quelques heures j'avais déjà plus pleuré que ces dix dernières années… Si je disais à voix haute ce que j'étais, ça rendrait les choses d'autant plus réelles. J'avais peur. Peur de voir la vérité en face. J'avais été agressée comme une sauvage par un monstre et j'étais une victime. Une victime. UNE VICTIME. UNE V-I-C-T-I-M-E. Même en me l'hurlant à moi-même dans ma tête je n'arrivais pas à imprégner ce mot. Il fallait qu'il sorte mais il semblait bloqué dans le fond de ma gorge. Je regardais mes bras couverts de bleus et soudain je tirais la couverture pour voir mes jambes. C'était horrible. J'ouvris la bouche sous le coup de la surprise. Des égratignures, des bleus, et encore des bleus… J'avais la chance de ne pas avoir de membre cassé. Enfin, sans réfléchir je repris la parole et tout en gardant les yeux figés sur mes blessures je dis: "Une victime." J'eu comme l'impression de prendre un coup de poignard dans le ventre en laissant échapper ces mots. Et pourtant l'instant d'après ce fut presque du soulagement qui s'empara de moi. J'avais les yeux humides, les larmes coulaient peut-être sur mes joues mais je n'en étais pas sûre. Je revoyais dans ma tête tout ce qui s'était passé, encore et encore. Je pouvais sentir ses coups m'atteindre, je pouvais sentir son souffle sur ma peau. Tout. Je me rappelais de tout. Certains détails étaient trop durs. Je ne pouvais pas supporter d'y penser alors que ma soeur se tenait là, devant moi. Ce monstre m'avait frappé et s'il avait continué il m'aurait sans doute tué mais quelque chose l'en avait empêché. Ou peut-être n'avait-il pas eu envie de me voir disparaitre. Il voulait que je souffre et pour le moment il avait gagné. Je souffrais aussi bien au sens propre qu'au sens figuré. Moralement, physiquement, j'étais détruite. Mais une Stewart se relève toujours pas vrai? Demain est un autre jour… J'aurais aimé pouvoir me dire ça sur le coup, j'aurais aimé en rire et passer à autre chose. Mais pour le moment c'était impossible. Le choc était trop intense. Je tombais de haut, de très haut, de trop haut. La reine n'était plus qu'une petit tas de poussière…

J'avais toujours été bavarde, parler était mon remède contre tout. Je ne savais pas vraiment si dans le cas présent ça m'aiderait, je ne m'étais encore jamais sentie aussi désarmée. Mais j'avais envie d'essayer parce que Marissa était là et que je ne pouvais rester à pleurer alors qu'elle était morte d'inquiétude. Je ne pouvais pas ne rien lui dire et d'un autre côté je ne pouvais pas tout lui dire non plus. Trop difficile. Et puis je voulais la préserver elle aussi, elle n'avait pas besoin de connaitre tous les détails. Je lui avouais donc que mon agresseur connaissait mon prénom. A ce moment là Marissa reprit la parole à son tour pour me dire que la police allaient s'en charger, qu'ils allaient le retrouver… J'avais tellement envie de la croire. Je continuais en lui disant que j'avais tenté de m'enfuir mais qu'il m'avait plaqué au sol et que je n'avais pas réussi à lui échapper. Je baissais les yeux, je fuyais le regard de ma soeur comme on fuit la peste. Je ne pouvais pas affronter ses yeux, son regard. Je l'aimais trop et je ne voulais ni la faire souffrir, ni la voir souffrir. C'était tellement injuste de lui imposer ça… Elle avait déjà eu sa dose de malheurs pour les dix prochaines années, au moins! Elle essayait encore de me rassurer. Au fond de mon coeur je remerciais mes parents, Dieu, la vie, tout ça à la fois, de m'avoir offert une soeur en or comme elle. Elle était tout pour moi. Si ce n'était pas pour elle, je pourrais me tirer une balle. Là. Tout de suite. Maintenant. Mais elle m'aidait à garder les pieds sur Terre. Elle m'avait pris dans ses bras à nouveau, ses bras protecteurs qui me rappelaient tant de souvenirs d'enfance...

FLASH BACK

L'orage grondait au dehors. Cachée sous mes couvertures je chantonnais en me bouchant les oreilles très très fort. Je n'avais aucune idée de l'heure qu'il était mais il faisait nuit depuis longtemps et j'aurais déjà dû être en train de dormir, le marchand de sable était passé il y a belle lurette. J'avais dépassé mon couvre feu et je dois bien avouer que j'étais épuisée mais ce qui se passait dehors ne pouvait que me tenir éveillée. Hors de question de fermer les yeux alors que le tonnerre résonnait horriblement fort et que les éclairs ne cessaient d'apparaitre dans le ciel. Même en me bouchant les oreilles je pouvais l'entendre, et même sous la couette je pouvais voir les flash de lumière blanche. Il n'y avait rien au monde que je détestais plus que l'orage. J'avais envie de courir me réfugier dans le lit de mes parents mais je savais pas avance que je n'aurais pas le droit de rester dormir avec eux. Ma mère avait horreur que je me glisse entre eux, elle disait que je donnais trop de coup de pied dans mon sommeil. De toute façon j'étais trop tétanisée par la peur, je n'aurais pas pu bouger un orteil de mon lit. En plus de ça le courant était coupé et je n'avais plus de lumière dans ma chambre ce qui n'arrangeait rien à mon calvaire. Ma veilleuse était éteinte, la garce! Même elle, elle m'avait lâchée! "Promenons-nous dans les bois pendant que le loup n'y est pas, si le loup y était il nous mangerait mais puisqu'il n'y est pas il ne nous mangera pas!" Je n'arrêtais pas de chanter pour oublier le fait que c'était pratiquement la fin du monde dehors. A l'école Margaret m'avait dit que l'orage c'est quand Dieu il n'est pas content et qu'il fait rouler des tonneaux au paradis, j'ai pas trop compris pourquoi des tonneaux mais bon peu importe. Dieu n'était pas content et moi j'étais carrément prête à me faire pipi dessus. Je tentais alors une dernière chose pour faire arrêter l'orage: "Pardon! Pardon Dieu! Je suis désolée! J'avoue! J'avoue tout et je te demande pardon! Sois plus fâché s'il te plait? Arrête de faire rouler les tonneaux!" j'avais entremêlé mes doigts comme pour prier. "S'il te plait!" Au même moment un énorme coup de tonnerre retentit me faisant sursauter. Je me mis à crier et quelques secondes plus tard je sentis une main attraper ma couverture et la tirer pour me découvrir. "Nonnnn!" criais-je encore plus fort. Mais du haut de mes sept ans et de mes vingt kilos tout juste, je ne pouvais pas luter. Je me recroquevillais sur mon matelas, m'attendant à voir surgir le croque-mitaine ou le père fouettard. Je devais être la pire enfant du monde! J'étais vraiment à deux doigts de me mettre à pleurer lorsque je sentis une petite main me secouer les jambes. J'ouvris un oeil, puis un autre, et finalement je retirais mes doigts de mes oreilles. Je m'assis dans mon lit pour observer Marissa et Emma toutes les deux mortes de rire. "Tu croyais qu'on allait te manger ou quoi?" me demanda Emma. Je tendis instinctivement les bras vers Marissa pour lui réclamer un câlin. "J'ai cru que c'était le croque-mitaine! " J'avais pris ma toute petite voix pour montrer à mes soeurs qu'il n'y avait vraiment pas de quoi rire. Elles montèrent toutes les deux dans mon lit et Marissa me laissa me blottir dans ses bras. Emma attrapa une mèche de mes cheveux et commença à jouer avec. Elles continuait de glousser un peu. "C'est vraiment pas drôle! Dieu il est très en colère avec moi! C'est pour ça qu'il y a de l'orage." Les filles échangèrent un regard et explosèrent de rire à nouveau. Emma reprit à nouveau la parole: "Mais qu'est-ce que tu racontes? C'est quoi encore que ces histoires?" Je la regardais interloquée, presque choquée même qu'elle ne soit pas au courant de l'histoire de Dieu qui roule ses tonneaux au Paradis. "Quand y'a de l'orage c'est parce que Dieu il est en colère et qu'il fait rouler des tonneaux dans le ciel!" Collée contre Marissa, je relevais la tête pour aller me blottir sur son épaule. J'ajoutais en chuchotant à peine: "Moi non plus j'ai pas tout compris avec l'histoire des tonneaux mais en tous cas c'est Margaret qui me l'a dit et elle m'a aussi dit que c'était son père qui lui avait raconté alors ça doit forcément être vrai!" Marissa passa sa main sur ma joue. "Cette peste te raconte n'importe quoi Leah! L'orage c'est plutôt quand les gens du paradis sont contents et qu'ils jouent au bowling…" Emma l'observa bizarrement et Marissa haussa les épaules. "Alors en fait c'est bien quand y'a des l'orage? Ça ne veut pas dire que j'ai fait trop de bêtises et que Dieu n'est pas content?" Elles rigolèrent à nouveau. Je me tournais vers Emma qui m'ouvrit ses bras à son tour. Je quittais l'étreinte de Marissa pour celle que m'offrait notre aînée. "Ecoute, pour faire des bêtises t'es la meilleure, mais je suis sûre que ça fait plus rire Dieu qu'autre chose. On peut pas être en colère après toi bien longtemps." Marissa hocha la tête. "T'es trop mignonne pour que quiconque soit fâché au point de faire … rouler des tonneaux…" Alors que mes grandes soeurs m'avaient rassuré un petit peu, je ne m'étais pas rendu compte que le tonnerre s'était éloigné peu à peu. Assise sur mon lit avec elles et blottie dans les bras d'Emma, je me sentais en sécurité. "Et le croque-mitaine alors?" Une fois de plus elle échangèrent un regard avant que l'une d'elle ne pousse une sorte de grognement et que l'autre m'attrape par les pieds pour commencer à me chatouiller. "Alors lui, il existe! Fais attention à tes petites mains et tes petits pieds sinon il risque de te manger! Mouahahahah" Emma imitait le monstre à la perfection mais les chatouilles que me faisaient subir Marissa m'empêchaient de crier, je riais aux éclats. Heureusement que la chambre de nos parents se trouvait à l'étage du dessous et de l'autre côté de la maison, autrement on aurait été mal à faire le vacarme comme ça au milieu de la nuit. Mes soeurs finirent par me laisser tranquille, je riais encore qu'elles s'étaient déjà levées de mon lit pour prendre la direction de la porte. Je me levais sur mon matelas, et je les regardais s'approcher de la sortie de ma chambre. Elles étaient prêtes à filer aussi vite qu'elles étaient arrivées. " Hey! " Criais-je et elles se retournèrent en même temps. Quelle synchronisation! "Je peux dormir avec vous?" Emma haussa les épaules. "Seulement si tu promets de ne pas faire pipi au lit!" Je lui lançais alors un regard noir avant de croiser mes bras sur ma poitrine, je faisais ma moue boudeuse. "C'est pas drôle!" Je sautais de mon lit et courrais jusqu'à leur hauteur. Je pris la main de Marissa. "Bon je peux?" Elle resserra sa paume sur mes doigts avant d'ajouter: "Evidement. Mon lit, c'est ton lit. Soeurs pour toujours!" Je tirais alors la langue à Emma, ravie d'avoir trouvé un nouveau lit pour la nuit mais au dernier moment, j'attrapais la main de mon autre soeur et je lui fis tout de même un sourire, même si elle m'avait vexé. "Toi aussi Em' tu peux dormir avec nous si t'as peur! Soeurs pour toujours!"

FIN DU FLASH BACK.

J'aurais tout donné pour retourner en arrière, redevenir une petite fille… C'était plus facile comme ça. Mais non, j'avais grandi et je ne pouvais plus être une enfant. Ce qui m'était arrivé n'avait rien d'un compte de fée, c'était plutôt tout l'inverse mais la gamine qui était en moi, elle croyait pourtant que toutes les histoires finissaient bien et s'il arrivait un truc triste ou pas bien c'était forcément que l'histoire n'était pas fini et qu'il fallait continuer de lire. En l'occurrence je devais continuer d'avancer pour pouvoir espérer être heureuse à nouveau. Finalement repenser à mon enfance avait du bon parce que je pouvais puiser dans mes convictions d'enfant pour m'aider à comprendre qu'aucune épreuve n'est insurmontable. Alors que je m'étais grandement perdue dans mes pensées, j'entendis la porte de ma chambre s'ouvrir et j'aperçu Emma. J'étais tellement heureuse de la voir, j'aurais voulu sourire pour le lui faire comprendre mais au lieu de ça je m'essuyais les yeux tandis qu'elle vint déposer un baiser sur mon front. "Pas très bien… mais… Merci." Je levais les yeux vers elle, puis vers Marissa. Ni elle ni moi ne nous étions attendu à voir Emma. Enfin si, je m'y attendais mais pas à l'instant présent, pas out de suite, tout de suite. Mais peu importe les relations entre mes soeurs, j'étais contente de les avoir toutes les deux présentes dans la pièce. "Merci d'être venue" ajoutais-je à l'attention d'Emma. Elles avaient toutes les deux ce besoin de me protéger, de me materner presque et je dois dire que ça ne me déplaisait pas, ça ne m'avait jamais déplût. J'observais alors mes aînées, réalisant que c'était la première fois depuis des années que nous n'avions pas été dans la même pièce toutes les trois en même temps. Je levais les yeux vers l'une, puis vers l'autre et je ne cessais de les regarder toutes les deux. Je ne savais pas ce qu'elles allaient se dire, ni ce qu'elles allaient faire. Emma salua Marissa, c'était déjà ça même si ce n'était pas des plus chaleureux. Je baissais les yeux sur mon lit et chuchotais: "Soeurs pour toujours…". Je relevais la tête vers elles deux. Je n'allais rien dire, je préférais ne pas m'imposer entre elles, pas tout de suite du moins. Evidement je prévoyais quand même de leur demander de se pardonner l'une à l'autre pour me faire plaisir, mais pas tout de suite. Et voilà comment je pouvais chasser mes pensées obscures, voilà comment je pouvais oublier le temps de quelques secondes que j'avais été agressée.

marissa, leah and emma

« Goodnight, featuring Stewart Co'»

Impuissante, elle se sentait totalement impuissante face au malheur qui frappait sa petite sœur, un malheur qui s’abattait une nouvelle fois sur leur famille. La jeune femme venait à se demander ce qu’elles avaient fait toutes les deux pour mériter tout ceci, est ce qu’on les punissait pour cette vie si parfaite qu’elles avaient eu par le passé ? Marissa était désemparée, perdue. La jolie brune mettait de côté ses problèmes et ses angoisses pour s’occuper de sa sœur, parce que c’était toujours ce qu’elle avait fait et Leah avait fait de même avec elle. C’était ça être sœur, pouvoir toujours compter l’une sur l’autre. Leah était plus qu’une sœur pour elle, c’était sa meilleure amie, son repère dans cette vie de dingue, son meilleur soutien… L’observant avec inquiétude, elle se demandait comment la dernière des Stewart allait remonter la pente. Elle avait foi en sa sœur, elle savait que c’était une combattante et qu’elle finirait par trouver des forces pour se relever mais ça ne serait pas sans mal, Leah ne pouvait pas dés demain reprendre sa vie. Elle aurait du mal à être seule très certainement les premiers temps, elle sursauterait aux moindres bruits suspects, deviendrait limite paranoïaque si un homme venait à marcher derrière elle.

On frappa à la porte, passant une main dans ses cheveux détachés la jolie brune posa son regard vers cette porte pensant que c’était une infirmière qui passait par là. Elle fut quelque peu surprise de voir sa sœur, Emma. Bien sur que la jeune femme avait le droit d’être là mais c’était plutôt une surprise du au fait que Marissa avait encore du mal à croire que l’aînée de la famille était de retour. Depuis trois ans, elle avait pris la mauvaise habitude de ne plus la voir à ses côtés. Les deux sœurs s’étaient expliqués mais on ne pouvait pas dire qu’elles étaient réellement proches, peut être qu’avant elle aurait accueilli sa sœur à bras ouvert comme l’avait fait Leah mais c’était au dessus de ses forces. Elle était tellement perdue, qu’elle ne savait plus quoi faire et qu’elle ne voulait pas gérer un nouveau conflit dans sa vie. « Salut » tout comme son aînée, elle fut polie en la saluant mais n’ajouta rien. Se levant du lit elle laissa place à Emma, se dirigeant vers la fenêtre elle passa une main sur sa nuque ayant l’impression qu’elle allait étouffer. Une chaleur insupportable envahissait son corps, son regard posé sur l’extérieur observé les ambulances qui arrivaient devant les urgences. Relâchant sa main elle la glissa sur son ventre, sortant de ses pensées en entendant la voix de sa petite sœur elle se tourna vers les Stewart essayant de penser à autre. Baissant les yeux Leah chuchota quelques mots qu’elles connaissaient toutes. Marissa se pinça les lèvres, à vrai dire elle était prête à pleurer. Ses quelques mots signifiaient tellement pour elle comme pour ses sœurs, mais c’était avant. Une explosion de sentiments tous différents les uns des autres éclataient en Marissa, elle passa sa main dans ses cheveux quelque peu perdue, il fallait qu’elle sorte d’ici. « Je vais chercher quelque chose à boire. » A peine avait-elle terminé sa phrase que ces talons claquaient déjà contre le sol, elle ouvrit la porte avant de la refermer. Lâchant un soupir, elle ferma les yeux quelques secondes tentant de chasser toutes les pensées en elle. Les ouvrants peu de temps après, la jolie brune avança dans le couloir se dirigeant vers la machine à café. Emma et Leah allaient pouvoir parler tranquillement, après tout elles avaient le droit d’être entres elles aussi.

Emma n’avait pas perdu de temps pour venir à l’hôpital après qu’elle ait reçu l’appel de sa collègue pour lui dire que Leah s’était faite aggrésser. Elle savait qu’elle y trouverait Marissa mais peu importait la seule chose qu’elle voyait c’était que sa place était auprès de ses sœurs. Elle n’était pas revenu à HB pour ne pas être présente dans les moments difficiles. Elle serait venu aussi vite si il s’agissait de Marissa. Elle était là pour retrouver ses sœurs elle en avait besoin pour se reconstruire, elle voulait reprendre son rôle de grande sœur et dans le fond ça lui avait drolement manqué. Bref le fait est qu’elle n’avait pas hésité une seule seconde à venir. Elle voulait être là pour Leah, sans compter le fait qu’elle bouillonait à l’intérieur se demandant qui avait osé toucher à sa sœur. Une chose était certaine c’est que si elle tombait une jour sur le mec qui avait touché sa sœur elle lui ferait passer un sale quart d’heure. Mec ou pas elle savait se défendre et quand il s’agissait de protéger une personne qu’elle aimait elle devenait une vrai tigresse. Emma était donc rapidement arrivé à l’hôpital, elle avait laissé sa fille à une collègue. Celle-ci dormait et tant qu’elle ne se réveillerait pas on ne la biperait pas. Sa fille était entre bonne main et Emma elle était à présent auprès de sa petite sœur. Marissa était également présente et Em l’avait salué poliment mais elle n’avait pas pu faire mieux après tout l’ambiance était encore plus que tendu entre elles. Elle avait ensuite demandé à Leah comment elle se sentait. C’était plus pour savoir si elle avait mal, si la douleur était supportable parce que moralement elle se doutait que ça n’allait pas du tout. « Pas très bien… mais… Merci. » Emma était prêt du lit et avait une main dans la cheveulure de Leah comme elle le faisait quand celle-ci était petite et qu’elle devait la consoler. Soudain elle revenait des années en arrières. Quand Leah avait encore peur du tonneur et qu’elles finissaient pas dormir toute les trois ensemble juste pour que Leah se sente mieux. Et ce souvenir lui serra un peu le cœur, c’était tellement lointain… Il y avait aujourd’hui tellement de distance entre elle et Marissa qu’elle doutait sur l’avenir de leur relation. Bref elle demanda à Leah : « Tu ne souffres pas trop ? » Si c’était le cas Em’ ferait en sorte qu’on donne à sa sœur plus d’antalgique ça avait du bon d’être médecin parfois. Elle adressa a sa sœur un sourire réconfortant pas question de montrer un air grave, elle voulait juste que sa sœur se sente mieux c’est tout. Leah lui dit alors : « Merci d'être venue » Emma déposa une nouvelle fois ses lèvres sur le front de sa petite sœur et lui répondit naturellement : « Inutile de me remercier c’est normal… Je suis revenu pour être prêt de vous… » Naturellement elle avait dit vous. En même temps c’était la vérité, peu importe les différents qu’elle avait avec Marissa si celle-ci venait frapper à sa porte demain jamais elle ne la laisserait dans la misère. Em’ aimait ses sœurs même si elle n’avait pas toujours su le montrer, elle n’était pas partie parce qu’elle ne les aimait pas mais juste parce qu’elle avait eu besoin de souffler loin des siens c’est tout… Et puis il y a trois ans elle n’était plus vraiment proche de ses sœurs. Elles se cotoyaient pour les repas mais il n’y avait plus vraiment de complicité entre elles. Bref Leah dit alors : « Soeurs pour toujours… » Et Em’ sourit, c’était LA phrase fétiche de sa jeune sœur. Quand elle était petite celle-ci n’arrêtait pas de leur dire. Et Emma répondit ce qu’elle répondait 10 ans en arrière : « Pour toujours… » Il était pas question de contrarier sa jeune sœur et puis dans le fond elle le pensait vraiment. Emma avait un sourire sur les lèvres carréssant les cheveux de sa sœur. « Je vais chercher quelque chose à boire. » Lâcha Marissa. Et emma la regarda sortir de la pièce . Elle adressa un regard désolé à Leah, elle ne voulait pas faire fuir Marissa. Em’ demanda à Leah : « Je devrais allé la chercher ? »

Je ne sais pas ce qui est pire, la douleur ou la peur qui me donne la sensation de suffoquer? C'est fou comme en quelques instant votre vie peut changer. On se croit toujours à l'abris de tout, les drames ça n'arrive qu'aux autres jusqu'au jour où ça vous arrive à vous. Je n'ai pas été préparée à ça, j'ai toujours eu une existence heureuse, je n'ai jamais manqué de quoi que ce soit matériellement parlant ou pas. On ne m'a pas habitué à faire face à des situations de crises, j'ai toujours vécue en me croyant en sécurité et à l'écart des tragédies qui frappent les familles voisines. Je vois maintenant à quel point j'ai eu tord de me croire intouchable. On a beau se sentir au sommet, on reste humain après tout et ces choses font parti de la vie mais voilà… je n'aurais jamais cru connaitre une si grande douleur. Et pourtant avoir Marissa à mes côtés, même si ça n'apaise pas toutes mes angoisses, c'est déjà un grand soulagement. La famille, voilà ce qui importe. Les proches et rien d'autre parce que quand tout fou le camps c'est souvent les seules vraies choses qui vous reste. Je pourrais tout sacrifier pour ma famille, mes parents, mes soeurs, mes nièces et pour mes plus proches amis aussi. Je pourrais supporter de tout perdre tant qu'il me reste encore eux. Mais le jour où ils s'en vont, ce jour-là je ne veux plus exister parce que sans eux je ne peux pas concevoir de lendemain. Ils sont tout à mes yeux, mes piliers, le plus profond de mon coeur et de mon âme, tout l'amour que j'ai en moi leur est réservé. Et s'ils n'étaient pas là, cet amour laisserait place à de la colère. De la colère j'en ai déjà, mais ce n'est rien comparé à tout l'amour que je ressens quand ma soeur me caresse les cheveux et qu'elle m'assure que tout ira bien. Ce n'est rien comparé à ce que je ressens quand je vois Emma franchir la porte et se mettre à jouer son rôle de grande soeur comme si ces trois années n'avaient jamais existé. Elle m'avait tant manqué parce que sans elle notre famille n'était pas complète. Sans elle, ce n'était pas pareil. Même si j'avais toujours eu cette relation spéciale avec Marissa, même si elle et moi on semblait se comprendre tellement mieux que je n'arrivais à comprendre Emma parfois, dans mon coeur mes deux soeurs avaient leur place et je serais incapable de vous dire que j'en aime une plus que l'autre. Nous n'avons pas les mêmes relations les unes avec les autres mais j'aime Emma tout comme j'aime Marissa. Ces trois années passées sans notre aînée à nos côtés ne nous avait pas laissé indifférentes. Marissa s'était littéralement braquée mais au fond, je me doutais que c'était surtout parce qu'elle était blessée, moi je me montrais plus clémente. Emma m'avait trop manqué pour que je la repousse d'avantage. Je n'avais plus envie de me battre avec ma famille, une famille que je rêvais de voir unie. Les voir toutes les deux m'aidait déjà un peu à aller mieux. Emma me demanda si je ne souffrais pas trop et je me contentais de secouer doucement la tête, les yeux humides mais un léger sourire aux lèvres pour lui montrer que j'étais vraiment touchée par sa présence. Emma m'embrassa le front pour la seconde fois et je ressentais une chaleur se répandre dans tout mon corps. Elle m'avait tant manqué, c'était indescriptible. J'aurais juste préféré qu'on n'ait pas à vivre ça alors qu'elle venait tout juste de remettre les pieds à Huntington, je me sentais coupable de lui imposer ça et de créer des problèmes même si ce n'était pas directement ma faute.

Réussir à avoir Emma et Marissa dans la même pièce relevait du défis et je me demandais si ça allait encore durer longtemps avant que l'une d'elles ne craque. J'avais envie qu'elles fassent cet effort pour moi, qu'elles restent là toutes les deux. Dans cette chambre d'hôpital, c'est comme si le temps s'était arrêté. La dernière fois que j'ai vérifié, j'étais heureuse, sortant d'une soirée plus qu'agréable durant laquelle j'avais ris et dansé et puis hop! En un claquement de doigt tout est fini et je me retrouve à pleurer comme une gosse dans un lit à St John avec le corps couvert de bleus, et d'égratignures. La douleur extérieure aussi forte que la douleur intérieure. J'ai physiquement mal et je suis moralement et psychologiquement anéantie. Trop de choses se bousculent dans ma tête, les brides de souvenirs que j'ai de mon agression et qui se rejouent en boucle, je peux même sentir le goudron froid sous moi, sentir l'odeur d'essence qui est répandue dans le parking sous terrain et je peux même me souvenir avec précision des la couleur des yeux de mon agresseur, de ses doigts sur ma peau et de son souffle sur mon visage. Aussitôt une sorte de grand frisson me traversait et j'avais envie d'hurler. J'avais envie de prendre une douche, non, un milliard de douches et même encore avec ça j'allais continuer de me sentir sale. J'ai souvent fait ce cauchemar où j'ai envie de crier de toutes mes forces mais aucun son ne sort de ma bouche et j'ai beau essayer encore et encore, rien ne se passe. C'est un peu comme ça que je me sens sur le moment. Se mêle à cela mes souvenirs avec mes soeurs. C'était quand la dernière fois qu'on s'est toute tenues dans la même pièce? Quand était-ce la dernière fois que nous avions partagé un fou rire ou même une simple conversation? J'essayais de m'en souvenir, de toute mes forces je cherchais dans ma mémoire mes derniers souvenirs véritablement heureux avec Emma et Marissa et à mon grand désespoir rien ne me venait à l'esprit. Je me pouvais me rappeler avec exactitude de notre enfance, mais pas des moments plus récents… Peut-être parce que nos moments de complicités remontaient à bien avant le départ d'Emma pour l'Afrique. Et pourtant je m'étais permise de chuchoter ces quelques mots. " Soeurs pour toujours.  " Ça signifiait beaucoup pour moi et pour elles aussi j'en était sûre! Emma se tenait si proche de moi, mais mes yeux s'étaient posés sur Marissa. Je pensais savoir ce qui se passait à l'intérieur d'elle et je me doutais qu'elle n'était pas du tout à l'aise. Avant que je n'ai pu dire quoi que ce soit, elle déclara qu'elle allait chercher à boire et en un clin d'oeil elle était dehors. Emma quant à elle avait joué le jeu en me répondant "pour toujours". Je savais que Marissa le pensait aussi mais elle n'était peut-être pas encore prête à se le dire à nouveau et encore moins à le dire à voix haute. Je n'avais franchement pas envie qu'elles se disputent et quand Emma me demanda s'il fallait qu'elle aille la chercher je me pinçais la lèvre. "Honnêtement… Je ne sais pas." Je n'avais vraiment aucune idée de la manière dont elle allait devoir s'y prendre pour reconquérir Marissa. Fallait-il qu'elle force le passage ou qu'elle lui laisse un peu d'air? Je n'en était pas certaine. Inspirant légèrement je me décidais pourtant à rajouter: "Vas-y. Mais je t'en supplie Emma… Ne vous fâchez pas!" Mes yeux étaient implorant, comme ceux d'un petit chiot martyrisé. "En réalité… Je crois que je vais… dormir un peu. Je suis épuisée." Je grimaçais en sentant une longue douleur s'emparer de mon ventre, comme une crampe mais en pire.