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 Put the gun down - DORIAN&SWANN

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MessageSujet: Put the gun down - DORIAN&SWANN   Put the gun down - DORIAN&SWANN EmptySam 23 Aoû 2014 - 21:23


dorian & swann


Il ne savait même pas ce qu’il faisait ici.
Dorian n’était pas de ceux qui sortent souvent de chez lui. Il l’avait été, à une époque – il avait été fêtard, sociable, toujours à l’aventure, mais cette époque était bel et bien révolue. Pour le meilleur et pour le pire. Ces derniers mois – ces dernières années, s’il avait été tout à fait honnête avec lui-même, il les avait passées terré dans cette grande maison qui avait un jour été leur maison familiale, à travailler. Il ne sortait que contraint et forcé. Principalement quand il n’avait plus rien à manger, ou un besoin cruel de produits d’entretien. Et encore, il était de ces gens un peu absurdes qui cherchent alors à se faire livrer.
La chose ne jouait pas forcément en sa faveur. Honnêtement, il savait que s’il mourait tragiquement dans son canapé, ses voisins n’auraient pas la présence d’esprit de s’affoler – principalement parce qu’ils ne verraient pas la différence, clairement. Il était aussi devenu une espèce de créature mythologique, du genre que l’on utilise pour faire peur aux enfants afin qu’ils ne fassent pas trop de conneries – ce qui pouvait être drôle, parfois, mais qui avait en toute honnêteté quelque chose d’un peu triste.
Et pourtant, ce jour là, il s’était aventuré à l’extérieur. C’était en partie parce qu’il avait besoin de nouveaux habits – les dures nécessités du monde matériel, on n’y coupait pas. C’était peut-être aussi en partie à cause d’un coup de folie, du genre qui permettent parfois aux pires renfermés de sortir de leur trou et de partir à l’aventure. Des petites révolutions ordinaires qui font, sans crier gare, la naissance d’une toute nouvelle vie. Ca ne payait pas de mine, ça ne méritait pas de figurer dans un grand et beau roman d’aventure, mais hé, c’était la réalité.
En tous cas, il avait passé la porte de ce magasin de prêt à porter. Innocemment.

Même s’il passait le plus clair de son temps terré chez lui, il était un homme d’une grande élégance. La seule vraie exception avait été son voyage au Mexique – mais comme il passait la majeure partie de ses journées, voire de ses nuits, dans les montagnes à vagabonder, c’était un cas de force majeure. Le reste du temps, même dans les tréfonds ce qui avait clairement été une dépression, il prenait soin de lui et de son apparence. C’était l’une des contraintes de son métier, après tout – les familles ne laissaient pas le premier clochard venu prendre soin des corps de leurs défunts, c’était presque une question de bon sens. Une grande partie de son métier reposait sur le paraître, aussi contradictoire que cela puisse sembler – il côtoyait professionnellement beaucoup plus de vivants que de cadavres, quand on y pensait bien. Malgré tout, il n’avait en aucun cas reçu l’une de ces éducations tirées à quatre épingles si communes dans la petite ville de Huntington Beach, et croyait dur comme fer que l’on pouvait paraître très propre sur soi sans nécessairement avoir une étiquette de très, très grande marque à l’arrière de son col.
Donc, le magasin de prêt à porter. Où il était venu chercher la perle rare.
En passant devant les grandes vitres, il avait vu une chevelure blonde, de dos, derrière le comptoir. Une très belle chevelure blonde – en tous cas une chevelure blonde parfaitement innocente, pas de quoi se méfier. La jeune femme s’était retournée, dévoilant un visage proprement angélique et, à ce qui lui semblait, il n’avait pas prêté attention plus que cela non plus, la vendeuse était enceinte. Il était entré le plus naturellement du monde, sans se poser la moindre question, fermement décidé à fouiner un peu, à éventuellement dégotter les deux, trois chemises dont il avait besoin pour continuer à sembler parfaitement propre sur lui, payer, et repartir comme il était venu – c’est à dire sans se prendre la tête, sans chercher le drame, pour rentrer chez lui et se terrer à nouveau pour de longs mois tout en continuant à faire tourner son petit commerce.

Seulement, les choses s’étaient enchaînées très vite.
Il avait poussé la porte – déclenchant par là le petit mécanisme habituel, guidant jusqu’à la sonnerie d’une petite cloche. Du bout des lèvres, pas malpoli malgré sa froideur apparente, il avait lancé un « Bonjour » des plus naturels. Mais, du coin de l’œil, il avait remarqué une chose qui presque immédiatement avait attiré son attention – le reflet caractéristique de la lumière sur le métal froid d’une arme. C’avait été, alors, comme se prendre un coup de poing en plein dans le ventre. Son souffle s’était coupé et, quand il avait vu, stupéfait, l’angélique jeune femme devenir glacée et braquer le revolver vers lui sans demander son reste, il était à deux doigts de la terreur la plus pure.
La dernière fois qu’il s’était retrouvé dans cette situation, son père était mort. Sa mère était morte. Et lui, il était devenu fou. Fou à en monter sur le toit d’un immeuble, fou à se jeter dans le vide. Parce que, la dernière fois qu’il s’était retrouvé dans cette situation, tout ce qui faisait sa vie et son bonheur lui avait été méthodiquement arraché – pour ne laisser que le vide, et sa chair à nue.
Alors il ne réfléchit pas. Il supplia. Pitoyablement, il supplia. Sur un ton plaintif qu’il ne se connaissait même pas, les yeux grands ouverts sur le canon pointé vers lui, il avait laissé les mots s’échapper – et ce qui était théoriquement un ordre était devenu, sur sa langue, une prière : « Lâchez ça. Lâchez ça, tout de suite. » Il avait songé à fuir. Mais il était le mieux placé pour savoir que fuir ne servait absolument à rien. « Lâchez ça. S’il vous plait. » Un temps. « Pas encore. » finit-il par laisser échapper. Non, pas encore cette scène. Il avait peu de certitude – mais il avait au moins celle qu’il ne méritait pas cela.
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