Constance émergeait de son sommeil dans son lit King Size, aujourd’hui elle avait son premier rendez-vous avec son coach sportif. Une ancienne championne de boxe, assez connue, car même elle qui n’était pas forcément adepte de ce genre de sport en avait entendue parler. Cette fille était monstrueuse sur un ring et divinement belle, c’était un genre d’incarnation de Lara Croft ou encore d’un personnage de la saga Dead Or Live. En clair quand elle se battait, elle était sexy à mourir et aussi effrayante qu’un routier en colère. Dans un réflexe de superficialité, elle fonça se doucher s’imaginant ne pas avoir à trop transpirer durant sa séance de sport. Elle était déjà super motivée, en effet, mais ça lui tenait vraiment à cœur de s’entretenir physiquement et puis son thérapeute pensait que ce serait une bonne chose pour évacuer sa tristesse et sa colère.  Sortant toute fraiche de la douche, elle ne poussa pas le vice plus loin et abandonna l’idée de se coiffer ou encore de se maquiller comme à un front raw d’un défilé Givenchy. Une queue de cheval et un survêtement, La Perla quand même bien entendu, feraient l’affaire. Puis de toute façon, elle n’avait plus trop le temps de faire quoique ce soit de plus étant donné qu’elle avait déjà entendu l’interphone retentir et même la bonne ouvrir la porte pour accompagner l’invité dans la salle de sport de la bâtisse Hamilton.

Après avoir descendu les marches quatre à quatre, s’essoufflant d’avance, Connie arriva dans la salle de sport qu’elle ne visitait jamais. Les rares fois où elle y avait été, elle ne s’en rappelait pas puisque c’était souvent pour s’endormir sur une des nombreuses machines après des soirées trop arrosées.

- Waouh, sacrés biceps, s’enjoua-t-elle, en voyant son coach, toute fraîche et tout sourire.

Elle était superbe, ce qu’on disait sur les boxeuses étaient faux. Elles n’avaient pas l’air de lesbiennes, en tout cas pas celle-là, pensait Connie. A regret.

Aujourd’hui, Adria allait pour la première fois donner cours à une jeune femme qui cherchait à s’entretenir physiquement. L’ancienne boxeuse ne la connaissait pas personnellement mais elle avait déjà entendu le nom de famille de son élève du jour résonner dans le quartier… sans doute une gosse de riche supplémentaire, comme elle en entraînait souvent, mais Adria avait appris qu’il ne fallait pas se forger d’apriori avant d’avoir rencontré les gens en personne. C’était un réflexe humain de s’imaginer des choses qui se révélaient au final bien souvent différentes de ce qu’on pensait, cependant elle essayait au maximum de ne pas trop s’avancer. Le rendez-vous avait été convenu en matinée. Adria devait retrouver Connie chez elle, puisque la famille possédait sa salle de sport personnelle au sein de leur domaine. La jeune femme vivait dans President Drive, tout comme elle. S’offrir un logement dans ce quartier était bien évidemment au-dessus des moyens d’une simple entraîneuse, certes Adria était issue d’une bonne famille, mais elle n’en retirait rien, bien trop amoureuse de son indépendance. Elle gagnait tout simplement bien sa vie en entrainant des gens de tous horizons, aisés ou moins. De plus, elle avait amassé pas mal d’économies qu’elle avait mises de côté pendant ses années d’athlète au plus haut niveau. Elle pouvait se permettre de vivre confortablement pour un long moment encore. Dans sa vie, l’ancienne boxeuse s’illustrait par beaucoup de défauts mais elle ne manquait jamais de ponctualité et de professionnalisme. Autant Adria menait une vie bordélique, autant elle restait irréprochable vis-à-vis de son travail. Et s’il lui arrivait de faire des nuits blanches, elle n’annulait jamais ses rendez-vous particuliers ou bien les cours collectifs qu’elle devait donner à moins d’une excellente raison évidemment. Bien que son hygiène de vie n’était plus tout à fait le même étant donné ses virées nocturnes, elle avait gardé cette rigueur de par les entrainements stricts qu’elle avait dû suivre au temps de la boxe. Adria considérait que si elle était capable de rester éveillée pour faire la fête, elle l’était tout autant pour assumer ce choix le lendemain et donner ses cours. C’était déjà arrivé bien souvent. Pas cette nuit heureusement où elle avait eu l’occasion de bien se reposer. Dès qu’elle fut prête ce matin-là, la jolie brune se rendit à pieds au manoir de la famille Hamilton, situé à quelques rues seulement de chez elle. La jolie brune sonna et dût répondre à un interphone pour se présenter. Une grille s’ouvrit et au bout de l’allée, une domestique l’attendait sur le seuil de la porte. Une fois à l’intérieur, Adria fut conduite dans la salle de sport personnelle de la résidence. Elle commença à s’étirer et s’échauffer légèrement tandis que la princesse du château se faisait légèrement désirer. L’ancienne boxeuse retira son sweat, ce qui dévoila son corps bronzé. Elle adorait porter des brassières et des pantalons courts pendant ses séances de sport pour être plus à l’aise dans ses mouvements. Même si ce n’est pas elle qui crevait le plus, elle montrait toujours au préalable les exercices qu’elle proposait. En jetant un bref regard autour d’elle, Adria convint que la salle avait tout pour plaire à un amateur de sport. Papa ou maman Hamilton devait en pratiquer plus assidument qu’elle ne l’aurait pensé de prime abord ou alors ils s’étaient juste offert un caprice de luxe bien réalisé. La jeune femme n’eut pas à attendre trop longtemps l’arrivée de son élève. Connie s’avança, en tenue de sport -bon point déjà-, même si elle dégageait une odeur florale qui indiquait qu’elle avait probablement pris sa douche juste avant. Au moins, elle n’était pas venue en robe de soirée et talons aiguilles comme Adria avait déjà eu le cas à quelques reprises. De plus, sa première impression d’elle fut plutôt bonne, dans le sens où la jeune femme avait l’air motivée et d’avoir la volonté de bosser. Certains ne voulaient parfois pas de séances de sport et y assistaient juste pour faire plaisir à papa ou maman, auquel cas Adria suspendait vite la mascarade et arrêtait tout. Connie ne semblait pas compter parmi eux. La coach s’en rendrait bien vite compte de toute façon. Elle ne put réprimer un sourire au commentaire de la jeune femme. « On va faire en sorte que tu travailles les tiens pour parvenir à un même résultat. » Répondit-elle sur le même ton enjoué. Pas besoin de présentations et de politesses inutiles. C’était bien Connie devant elle, inutile de se formaliser. « Mais j’ai cru comprendre que tu préférais travailler tes fessiers d’abord ? » Mieux valait commencer en étant clair sur les objectifs qu’elle voulait atteindre dès l début et quelles parties du corps elle souhaitait entretenir en priorité. « On va commencer par du stretching pour échauffer les muscles avant de les solliciter. » Quand Adria donnait un cours de sport, ça ne rigolait pas. Il y avait un temps pour la légèreté, et puis, tout un temps pour se donner à fond.

Constance eut envie de grimacer en entendant le mot « travail », en effet elle avait envie de faire du sport, surtout sur les conseils de son thérapeute mais elle en avait presque oublié que ce serait intense et fatiguant. Au début, elle avait surtout été enchantée de donner un sens à la vie de son survêtement La perla, mais en effet le ton décisif qu’employer son coach lui rappela qu’elle ne s’apprêtait pas à faire un défilé de mode. Machinalement, elle se toucha les bras d’une main en l’écoutant parler, ils étaient nettement moins toniques qu’en avaient l’air ceux d’Adria.  Elle essaya d’assimiler convenablement ce qu’Adria lui disait, le langage du milieu n’était pas le jargon dans lequel elle se sentait le plus à l’aise. Les étirements ne devraient quand même pas être très compliqués puisqu’enfant Connie avait pratiqué un peu de danse classique, nul doute que la beauté qui se trouvait devant elle serait étonnée de voir à quel point elle écartait sublimement bien les jambes … pour faire le grand écart bien entendu. Elle s’assit sur les tapis, prête à entamer l’exercice qu’allait proposer Adria, avant d’être interrompues par la bonne qui apportait des bouteilles d’eau, qu’elle posa vers l’entré. Connie la gratifia d’un sourire, avant de retourner son regard sur Adria qu’elle regardait à présent de bas.

- Il me semble que mon père aimait bien vos combats, il adorait la boxe féminine, dit-elle dans un sourire qui laissait sous entendre clairement pourquoi cette préférence. Quand il avait le temps de la regarder du moins, se rattrapa-t-elle. Elle avait mimé des guillemets. Mais bon, il s’est suicidé, il y a cinq mois. Peut-être que si vous m’aviez donné un cours plus tôt, il se serait ravisé en pensant à votre joli derrière dans sa salle de sport privée, conclut-elle sur un rire amusé.

Connie s’était auto choqué du ton qu’elle avait employé pour dire une chose aussi affreuse. Elle semblait en totale déconnection de la gravité des choses. Mais au fond elle savait que même si ça ne faisait que cinq mois que son père était parti, elle l’envisageait déjà comme un souvenir avec une grande facilité. De son vivant, on aurait pu l’appeler « courant d’air » et maintenant que Samuel avait repris les rênes de l’entreprise familiale, elle savait que l’absence de son père était due à la propre volonté de ce dernier. Samuel était certes très occupé mais néanmoins beaucoup plus présent que son père ne l’avait jamais été.

Adria ne s’attendait certainement pas en venant chez Connie à devoir écouter des révélations que l’on confierait plutôt à sa meilleure pote ou à son psy plutôt qu’à une première rencontre avec sa coach sportive. Néanmoins, elle entendit dans la voix de sa jeune élève qu’il n’y avait pas d’intention d’en parler pour attirer la compassion. Elle décida donc de répondre d’une façon plutôt neutre même si la façon dont Connie avait évoqué son père démontrait un détachement volontaire face à la gravité de ce qu’elle lui racontait. Elle avait sûrement ses raisons. « Je suis désolée pour ton père, ça n’a pas dû être une période facile. Je ne sais pas si mon derrière aurait changé beaucoup de choses vis-à-vis de lui mais le tien pourra vite faire des ravages si tu le travailles bien. » Adria avait bien contourné le sujet sans trop entrer dans les détails. Ainsi donc Connie la connaissait pour ses exploits dans la boxe féminine. La jolie brune n’aimait pas trop évoquer ce passé qui lui rappelait bien trop douloureusement qu’elle ne pourrait sans doute jamais reprendre sa passion. Ce n’était pas très grave en soi et elle pouvait s’estimer heureuse d’être encore debout mais quand une personne perdait ce qui l’animait le plus, c’était difficile pour elle de continuer à fonctionner normalement. Adria se demanda d’ailleurs ce qui faisait vibrer Connie au quotidien, ce qui était une passion pour elle. « Qu’est-ce qui t’a finalement motivée à prendre un cours ? » Lui demanda-t-elle alors avant de conclure les étirements. Connie s’en sortait bien, la jolie brune décela une légèreté et une souplesse dans les mouvements de son élève, elle avait probablement participé à des cours de danse par le passé. « On va commencer par ceci. Et tu peux me tutoyer tu sais, je ne suis pas une madame, ce sera plus facile. » Dit-elle en indiquant un appareil qui s’appelait le rameur, puis en décidant de briser la glace pour mettre Connie plus à l’aise.  L’ancienne boxeuse s’installa sur l’engin et lui montra comment l’utiliser efficacement. « Le rameur, c’est la meilleure machine de fitness qu’on peut trouver. Ça te fait travailler les abdos, les biceps, les jambes et ça te muscle le dos aussi. » Adria lui expliqua ensuite qu’il fallait être bien placé pour le dos, remonter les épaules et garder les bras bien alignés tout en repoussement avec les fesses, puis inspirer et tirer la barre. « A toi. Montre-moi comment tu t’en sors. » Ajouta-t-elle en lui cédant la place.

Un sourire neutre se dessina sur le visage de Connie. Elle était toujours plutôt mal à l’aise à l’idée que les gens soient désolés de la mort de son père alors que cet homme, qui lui avait pourtant offert monts et merveilles, semblait tellement inconnu à ses yeux… à son cœur. Comme sa mère qui avait démontré son incapacité maternelle en s’enfuyant dès la mort de son mari et laissant sa ribambelle de progéniture seuls face aux journalistes.

- Mon théra, Connie butta sur le mot et s’en excusa avec un sourire frais et innocent dont elle-seule avait le secret. Enfin je le surnomme « Thérapeute» car c’est une bonne épaule, mais c’est un ami qui m’a conseillé de pratiquer plus de sport pour me vider l’esprit.

Ses successives sessions en psychanalyse et désintoxication avaient toujours été tenue secrètes par ses parents. Connie trouvait que c’était une bonne chose, leurs maniaquerie du contrôle l’avait souvent agacée, mais ils avaient eu raison. Ses problèmes étaient assez humiliants pour les taire en dehors du cercle familial, pour préserver l’image pseudo-glorieuse de la famille Hamilton à laquelle Constance était malgré tout attachée. Mais même si cette apparence parfaite que dégager son nom lui plaisait, elle avait failli tout foutre en l’air en répondant à la question d’Adria.

- Désolée, mon vouvoiement sort tout seul, dit-elle en finissant ses étirements. On n’a peu de différence d’âge en effet, j’ai l’air un peu stupide.

Adria paraissait si mature et bien dans sa peau qu’il était difficile pour Connie de la tutoyer comme aux premiers abords. Alors que finalement, Adria n’avait pas hésité depuis qu’elle était arrivée, mais la jeune Hamilton semblait se complaire dans le rapport prof-enfant, le rapport de respect et d’autorité, comme si elle n’avait pas à culpabiliser du bordel qu’était sa vie à ses 23 ans. Son manque de responsabilité et son habituelle morosité. Elle regarda son coach montait sur le rameur, au moins une deux savait à quoi servait les appareils dans cette salle. Constance les avait toujours utilisé comme table de tek paf, lorsqu’elle s’enfermait dans la salle avec ses amants quand ses parents organisaient des réceptions à la villa, ou comme lit de substitution les matins où, revenant de folles virées alcoolisées, elle n’avait pas la force de monter jusqu’à sa chambre. Elle était ce genre de fille qui pouvait s’endormir partout quand elle avait des litres de mojitos dans les veines et de la poudre plein les narines.

- Je savais pas que les carrières dans la boxe se finissaient si jeune. A cause d’un petit ami inquiet peut-être ? demanda-t-elle s’asseyant sur le rameur et en prenant le soin de ne pas s’adresser directement elle, étant toujours mal à l’aise avec l’idée de la tutoyer.

De façon toujours aussi détachée en apparence, Connie expliqua à Adria qu’un ami à qui elle se confiait beaucoup lui avait conseillé de pratiquer plus de sport pour se changer les idées. Elle approuva d’un signe de tête. Les gens avaient souvent tendance à se trouver des habitudes moins saines pour oublier leurs problèmes ou à se réfugier dans l’alcool quand ils n’arrivaient pas à les affronter. La bonne épaule de Connie lui avait donc donné un conseil judicieux. L’ancienne boxeuse avait toujours trouvé dans le sport un moyen de se calmer et de relativiser les choses qui ne tournaient pas rond dans sa vie. Quand elle avait dû arrêter de pratiquer de la boxe, elle avait cru que son monde s’écroulait mais elle n’avait pas lâché l’affaire aussi facilement et même si elle n’exerçait plus officiellement, elle avait réussi à se reconvertir en coach sportive pour aider ceux qui avaient le besoin à travailler leurs corps mais aussi, comme l’avait si bien dit Connie, de se vider l’esprit. Adria espérait que cette séance fonctionnerait dans ce sens pour son élève du jour et lui donnerait l’envie de continuer sur cette lancée. « C’est vrai. Le sport n’est pas qu’une séance de travail pour le corps, ça sert aussi à être mieux dans sa tête. » Connie avait l’air d’en avoir clairement besoin. Les deux jeunes femmes ne se parlaient que depuis quelques minutes et déjà, l’hispanique avait un vague aperçu de ce que semblait traverser la petite  Hamilton. Derrière l’apparence d’une famille solide et réputée se cachaient aussi les démons qu’on pouvait trouver dans tout autre foyer. « Tu n’as pas à être mal à l’aise. » Tenta ensuite de la détendre un peu plus Adria. Connie ne devait pas être habituée à briser la barrière des politesses superflues aussi rapidement. Pourtant, une élève détendue était surtout une personne qui pourrait mieux travailler ses muscles pendant la séance. La coach sportive ne perdait pas le nord. Elle lui expliqua donc l’utilisation d’un premier appareil et lui céda ensuite la place. Pendant que Connie exécutait les exercices, Adria réfléchissait déjà au suivant tout en veillant à la bonne position de la jeune Hamilton afin qu’elle utilise l’appareil correctement. Connie lui demanda alors si elle avait arrêté la boxe en raison d’un petit ami inquiet. Malgré le fait qu’elle n’aimait pas aborder ce sujet, l’ancienne boxeuse ne put réprimer un sourire face à la manière dont la propriétaire des lieux lui avait formulé la question. « Pas vraiment. C’est vrai qu’à force de se prendre des coups, les boxeurs arrêtent souvent jeunes. Pour ma part, c’est un accident de voiture qui m’a empêché de reprendre. Assez sérieux pour que je doive suivre de la rééducation au niveau des jambes. La boxe est un sport très violent et mon corps risquerait de ne pas endurer un tel choc une deuxième fois. » Adria ne s’étalait pas sur les détails de cet accident mais elle avait répondu sans détour à la question de Connie. Elle qui aurait pu ne plus marcher avait déjà pu reprendre le sport tout court, ce qui en soi était déjà un petit miracle pour elle. Et que dire des combats de rue qu’elle ne devrait même pas envisager… L’ancienne boxeuse prenait des risques et elle en était consciente mais on n’avait qu’une vie et elle ne voulait pas la vivre à reculons. Si Connie lui posait une autre question par rapport à la boxe ou à son accident, Adria n’en dirait pas davantage. Elle n’était pas venue ici pour raconter sa vie mais pour faire travailler la jeune Hamilton.  « C’est bien. » Commenta-t-elle l’exercice du rameur. « Respire bien entre chaque mouvement, tu tires puis tu souffles et ensuite tu inspires quand tu ramènes. Gaine bien tes abdos aussi. » Elle trouvait que Connie était encore un peu trop tendue dans tout le corps. Maintenant qu’elle adoptait bien le mouvement, Adria lui conseilla d’augmenter un peu plus le rythme pour travailler sa cardio.