Revenant de la salle de sport en bas de ton immeuble, tu ne rêves que d’une bonne douche mais la sonnerie de téléphone retient ton attention. Tu n’es pas à l’hôtel, c’est samedi, mais tu sais parfaitement que les affaires ne s’arrêtent pas, c’est l’inconvénient de ce domaine. Tu écoutes ce que te rapporte Mark, le responsable de la sécurité, regardant par la fenêtre la mer qui s’étend à l’horizon, lointaine et si proche. Tu te pinces l’arrête du nez, préoccupé, mais aussi un peu surpris de ce qu’il te dit. – Mais, qui étaient ces individus ? Que voulaient-ils ? Tu marques une courte pause, ton interlocuteur se lance dans une première énonciation des faits. Des activistes qui auraient déboulé dans la salle à manger et pris à parti un membre du Congrès et son épouse. Ou sa maîtresse ? Tu n’es pas certain mais c’est un détail. – Très bien, merci Mark. Dîtes à Alicia de m’appeler. Qu’il soit infidèle, malhonnête, qu’il ait tous les défauts du monde n’est pas ton affaire, ce qui ne passe pas, c’est que la tranquillité de l’hôtel soit troublée.
Il est onze heures lorsque tu termines avec Alicia, chargée des relations clients, heureusement qu’elle a réagi rapidement, tu salues son instinct et son tact. Tu as toujours pensé que les femmes avaient ce don pour les situations critiques, une façon de prendre les choses en main avec grâce et efficacité. Lorsque tu poses enfin ton téléphone, une autre demi-heure s’est écoulée et tu accélères le mouvement si tu ne veux pas être en retard pour retrouver Adria. Heureusement que vous vous êtes donné rendez-vous à 13h. Tu vérifies l’adresse du restaurant et file te doucher et te changer.

Elle n’est pas encore arrivée lorsque tu t’installes à la table en terrasse, face à la mer, où t’a conduit la serveuse. Tu commandes un verre de vin, un Chardonnay et parcourt rapidement tes mails sur ton téléphone, attendant que ta nièce soit là pour regarder le menu.

La matinée était déjà bien avancée lorsqu’Adria put enfin rentrer chez elle après avoir donné un cours de sport particulier à une cliente assez exigeante. La jeune femme avait l’habitude d’être confrontée à ce genre de cas. Huntington Beach n’était pas très éloignée de Los Angeles, la clientèle était donc plutôt représentée par des personnes issues d’un milieu aisé et qui avait certaines attentes concernant leur séance sportive. Ces exigences n’effrayaient pas Adria, qui avait grandi dans une famille du même type, à la différence qu’elle ne devait rien à ses parents et avait toujours réussi à se débrouiller seule, une indépendance qu’elle avait acquise très tôt, renforcée par sa passion inexorable pour les sports de combat. Dans l’espoir que son père lui prête davantage d’attention, elle s’était souvent comportée comme un garçon, adolescente. Ça n’avait rien changé. Il avait toujours été bien trop focalisé par son travail. Aujourd’hui encore, de par le métier qu’elle exerçait et son ancienne vocation aussi, on prêtait souvent des allures masculines à la jeune femme. En réalité, ce n’était pas parce qu’elle faisait de la boxe ou qu’elle travaillait dans ce domaine, qu’elle essayait encore de leur ressembler. À force, Adria avait juste dû se forger une certaine force de caractère et il semblait qu’une femme un peu trop indépendante soit toujours mal perçue dans les regards contemporains. Ce n’était pas pour autant qu’elle changerait sa façon d’être, son caractère demeurerait intact. Toutefois, elle pouvait travailler son apparence. En réalité, Adria était même plutôt élégante et féminine quand elle faisait un effort pour se préparer. Et pour l’homme qu’elle allait rejoindre aujourd’hui, pas besoin d’attirer son attention d’une façon ou d’une autre. Pour cause, son oncle s’était toujours montré présent pour elle, bien plus que ses parents à bien des niveaux. Adria était bien contente de le retrouver, si bien qu’elle avait pris son samedi après-midi pour pouvoir profiter pleinement de ce repas avec lui. Elle n’était pas très famille mais il était l’exception à cette règle, d’autant qu’avec leurs programmes chargés, ils n’avaient plus trop le temps de se voir. L’ancienne boxeuse savait qu’il bloquerait toujours du temps pour elle dans son agenda bien rempli mais elle évitait justement qu’il ne le fasse trop souvent. Une fois n’est pas coutume, la jolie brune prit le temps de se préparer après sa douche, ça arrivait tellement peu souvent qu’elle ne manquerait pas de surprendre. Maquillage sobre et léger, robe élégante, tous ces éléments soulignaient les traits fins qu’elle avait pris de sa mère et de son oncle. Ses origines espagnoles ressortaient également au travers de son teint halé. Adria était plus féminine que jamais, méconnaissable presque, elle qui s’habillait plus souvent dans un style sportif, urbain et décontracté. Fin prête, elle se rendit sur le lieu de rendez-vous, un restaurant sympa dont la terrasse offrait une magnifique vue sur la mer. Ils y étaient déjà allés longtemps auparavant. Un sourire confiant accroché aux lèvres, la jeune femme entra dans le restaurant, non sans jeter un regard interloqué à une serveuse qui lui murmura qu’elle avait beaucoup de chance. Manque de professionnalisme ou simple compliment ? Peu importe. La chance n’existait pas en ce monde, tout n’était qu’une question de choix et d’occasion. Adria était bien placée pour le savoir. Sans doute voulait-elle parler de la personne qu’elle rejoignait, c’est-à-dire son oncle ? Il avait une classe et un charme indéniable, il devait plaire à beaucoup de femmes, c’était une évidence. Adria haussa les épaules et ne chercha pas à pousser la réflexion plus loin. Arrivée sur la terrasse, elle le rejoignit sans attendre. « Salut ! J’espère ne pas t’avoir trop fait attendre. » Le salua la jeune femme en le gratifiant ensuite d’une petite accolade, c’était bien la seule personne avec qui elle prenait la peine de le faire. « Ça doit faire une éternité que tu ne m’avais pas emmenée ici. » Ajouta-t-elle ensuite en s’installant en face de lui. Enfin, il ne l’avait pas exactement emmenée mais il lui avait proposé de la rejoindre, ce qui en soi revenait au même. « Semaine chargée ? » Demanda-t-elle finalement en indiquant son téléphone, autrement dit son outil de travail. Il s’occupait de la gestion d’un hôtel et il n’existait malheureusement pas de jour de congé réellement complet pour cette fonction. Elle remarqua le verre de Chardonnay qu’il avait sans doute commandé en l’attendant. Une Adria plus raffinée, c’était assurément inhabituel pour quiconque de son entourage mais elle avait largement de qui tenir. Essayant de cacher maladroitement son enthousiasme, la jeune femme était contente de passer du temps en compagnie de son oncle.

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