Ma main se faufile dans la poche de mon jean. Je ressors par reflexe la petite boite en plastique transparent. Je la secoue et observe les pilules qui s’entrechoquent. Sans vraiment réfléchir j’ouvre le capuchon pour faire glisser dans la paume de ma main droite l’un des comprimés. Je le place dans ma bouche. La sensation, les souvenirs, l’envie de me sentir mieux envahit mon corps. Mes doigts serrent les parois lisses et froides de mon verre. J’amène le verre jusqu’à mes lèvres et bois d’une traite le whisky. Alcool, médicaments… Une personne raisonne dirait que ça ne fait pas bon ménage. Parce que je ne vous parle pas d’un doliprane et d’un petit verre de whisky. Disons plutôt une bouteille et des comprimés que les médecins ne donnent pas si facilement. Pourquoi je fais ça ? Pourquoi je contredis mes règles et ce qui est bon pour ma santé ? Bon… Je ne sais plus ce qui en bon ou mauvais. J’ai juste envie d’oublier. Ces derniers temps, ou plutôt depuis l’accident, certaines images me reviennent en mémoire.
Un gars assis à côté de moi m’adresse la parole. Je me souviens de lui. Nous avions fait une partie de billards ensemble un soir de la semaine dernière. Nous avions fumé un joint avant d’aller en boîte. C’était le soir où j’ai fait la connaissance de Lena. En y repensant, je me dis que je n’ai jamais parlé de tout ça avec Kaylee. Je ne lui dis plus grand-chose en même temps. J’ai l’impression de m’éloigner de plus en plus d’elle. Ou plutôt de la fuir… Je sais que ça n’a aucun sens. Nous sommes venus ensembles. Nous ne nous sommes pas séparés depuis notre départ de Miami. Nous avons vécus tous les mauvais et bons souvenirs main dans la main. Je l’aime ! Ne croyez pas le contraire ! Je l’aime du plus profond de mon être. Quand j’ouvre les yeux le matin, je cherche son visage. Je veux sentir son odeur et la toucher. Chacun de ses baisers me redonnent goût à la vie. Je l’aime et pourtant je la fuis. Je sais très bien que ça n’a pas de sens. Peut-être qu’elle ne se rend pas compte de ça. Je l’espère sincèrement. Je ne veux pas qu’elle s’imagine des choses. Je ne veux pas qu’elle pense, ne serait-ce qu’un instant, que je ne l’aime plus.
Si je fais ça, c’est pour elle… C’est à cause d’elle. J’ai toujours été là pour elle. J’ai toujours été son pilier, la force tranquille sur laquelle elle pouvait compter. J’étais prêt à tout pour elle. Je pouvais déplacer des montagnes. J’étais là quand elle en avait besoin. Je la protégeais, la sauvais, la réconfortais… Ça ne m’a jamais traversé à l’esprit qu’un jour le contraire pourrait se produire. Pour moi, c’était mon rôle et ça ne changerait pas. Kaylee était cette lumière qui me redonnait goût à la vie. Elle était et est mon but. C’était mon unique objectif dans la vie. Je faisais tout pour elle. Je la protégeais… Voilà. J’avais trouvé mon utilité, ma place, mon rôle. Mais à cause d’un simple et putain d’accident, tout a été remis en question. La voiture de Lavanya a foncé sur moi. Je me souviens de cette douleur parcourant mon corps. J’étais face à une hystérique, je ne voulais pas prévenir Kaylee pour me retrouver avec deux femmes complètement paniquées sur les bras. J’ai oublié mon portable dans ma voiture. J’ai été amené aux urgences. Tout est allé trop vite. Je n’ai pas eu le temps de réfléchir à toutes les conséquences de cet accident.
Et aujourd’hui, me voilà accoudé à un bar… Je ne compte plus les verres. J’ai trouvé quelqu’un pour me refourguer des médocs. Ce ne sont pas les mêmes, il m’a dit qu’ils étaient plus forts et que j’en oublierai ma douleur. Mais elle est interne… Elle ne part pas. J’ai beau en prendre, me noyer dans l’alcool ou fumer des trucs… Rien y fait, elle reste là. Comme si elle ne s’était jamais refermée… Lors de l’accident de voiture, mon parebrise a éclaté en mille morceaux. L’un d’entre eux, plus malins que les autres, est venu se loger sous mes côtes, dans la tendre chaire de mon ventre… Rien de grave, vous me direz. Mais c’est également à cet endroit, à quelques centimètres prêts, que mon père m’a poignardé il y a quatre. Je revois encore son visage rouge de rage penché au-dessus du mien. Je revois la haine dans ses yeux et cette légère coulée de bave nichée dans le coin de ses lèvres. Je sens son haleine et ses mots se répètent en échos dans ma tête. Tu n’es pas mon fils ! Un hurlement. Comme une dernière volonté. C’est sans doute l’une des dernières choses qu’il m’a dite. C’est suivi l’hôpital, le procès et finalement la prison, pour lui cette fois-ce. Ce qu’il est devenu ? Lui, le riche entrepreneur d’une firme multinationale aurait pu s’en sortir très bien. Une forte caution, un sursis… Mais il n’a pas eu le temps de s’en sortir. Il s’est fait attaquer par une bande de six mecs énervés qui voulaient de l’argent pour leur sortie… Ce que j’en sais exactement ? C’est que ces mecs ont eu de l’argent… Pas pour leur sortie mais pour ce qu’ils ont fait… Je n’en dirais pas plus. Je sais ce que j’ai fait, ce qu’il s’est passé. Je ne risquerai rien. Je réclame un nouveau verre au serveur. Celui-ci hésite, il me dit que j’ai eu mon compte pour la soirée, qu’il est déjà tard… Il me fait son petit discours de sécurité. Je lui promets de rentrer à pied et demande au gars à ma droite, vous savez celui que j’ai rencontré la semaine dernière, s’il n’a pas quelque chose à fumer. Je reprends mes vieilles habitudes. Chasser le naturel et il revient au galop… C’est ce que l’on dit non ? Il hoche la tête. Je glisse un billet dans sa main, il en fait de même et me lance un petit clin d’œil. Mon verre arrive. « Merci bien ! » Je lève mon verre au ciel et lance : « A cette soirée ! »
Vous croyez que je fais ça par plaisir ? Que si je ne dis rien à la femme que j’aime, c’est parce qu’au fond je ne tiens pas à elle ? Non… Je ne fais pas ça simplement pour l’excitation du mensonge. Je ne fais pas ça dans l’espoir de rencontrer une autre fille… Je fais ça par lâcheté.
Je suis un lâche. Je suis affreusement lâche. Je n’ai simplement pas le courage d’affronter son regard et de lui dire que je suis faible. C’est vrai, quoi ! J’ai toujours veillé sur elle, j’étais son pilier… J’étais… Comment puis-je encore l’être ? Je n’arrive pas à me remettre d’un simple accident ! Les médecins me prescrivent des antidouleurs et je suis incapable de lutter contre mes vieux démons. J’ai replongé tête la première dans ce que j’ai passé plusieurs mois à contrôler. Nous avions faits ça ensemble, Kaylee et moi. Main dans la main… Elle m’avait fait confiance. Nous étions revenus ici pour partir sur de bonnes bases…Voilà ce qui était censé se passer. Nous aurions dû avoir une vie bien plus calme et plus sereine que notre train de vie new-yorkais. C’était écrit… C’était comme cela que ça devait passer… J’aurais dû être celui qui tient le coup, qui est fort et qui sait subir les manques… Mais ce n’est pas le cas…
J’ai craqué et j’en ai honte… Le problème c’est qu’au lieu de lui en parler, je me réfugie dans les bars du coin. Par conséquent, je m’enfonce un peu plus dans mes travers. C’est un cercle vicieux. Je ne sais pas comment je vais m’en sortir. Ma fichue fierté me paralyse et me rend malade. J’ai peur de la réaction de Kaylee. J’ai peur d’apercevoir dans son regard, une simple lueur de déception. Je suis minable…
Le bar ferme et nous sommes comme qui dirait expulsés vers la sortie. Dehors, l’air frai s’engouffre dans mes poumons. Ma tête est légèrement brumeuse mais j’arrive tout de même à savoir dans quelle direction aller. J’avance doucement vers notre appartement se situant non loin de là. Mes mains sont nichées dans mes poches. Le vent me pique les joues et me réveille. Il endort les symptômes liés à l’alcool et je sens mon esprit devenir plus clair. Les images reviennent par moment. Le sang, l’odeur, la fraicheur de la nuit, mon cœur battant à tout rompre… Ce n’est plus mon père que je vois mais ce mec… Cette ordure. J’en ai presque la nausée. Je monte les marches et me stoppe sur le palier de notre appartement. Mes yeux glissent sur la porte. Normalement, à cette heure-ci, Kaylee fait la fermeture du bar où elle travaille. Je suppose que l’appartement est vide. En cherchant les clés dans ma poche, je fais tomber mes médicaments et l’herbe que m’a refilé le mec tout à l’heure. Comme un accro, je m’abaisse aussitôt pour tout récupérer et les ranger au fond de mon jean.
J’ouvre la porte et entre avec précaution dans l’appartement…
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Sujet: Re: It hurts me to say that it hurts me to stay || Kaylee Mar 30 Juil 2013 - 2:26
It hurts me to say that it hurts me to stay. Jude & Kaylee
Dring Dring. La sonnerie de mon téléphone résonne dans le salon alors que j’étais en train de me préparer dans la salle de bain pour aller bosser au Wildjam. Même en lâchant mon mascara, ma brosse, et manquant de me briser la nuque en courant sur le sol glissant, je n’ai pas réussi à prendre l’appel. Mais l’icône de messagerie m’indique un nouveau message. Je n’ai pas la moindre idée de qui pourrait être la personne qui avait essayé de me joindre en vain. Je ne peux pas dire que je connais grand monde ici. Oh des clients par-ci, par-là, mais ils n’ont pas mon numéro personnel. Mon patron, et Jude. Voilà les seuls personne qui pourrait être capable de m’appeler. Il paraîtrait que je devrais faire des efforts. Mais ici… Tout semble diffèrent. Je veux être une autre personne que celle que je fus été. Je veux pouvoir me fondre dans la masse malgré mes préférences. Un jour viendra…
Quoi qu’il en soit, le téléphone collé sur l’oreille, j’entends résonner la voix de mon patron, qui m’informe qu’il me donne ma soirée exceptionnellement. Il me conseille d’en profiter, sans pour autant faire d’excès. Je ne peux réprimer un petit sourire. M. Wilde est vraiment quelqu’un de bien. M’a-t-il donné ma soirée parce que j’ai fait trop d’heures ce mois –ci ou a-t ‘il remarqué que ces derniers temps j’avais la tête ailleurs, presque à dire que je n’étais pas dans mon assiette habituelle. Il faut dire qu’en ce moment, je suis en pleine remise en question. Miami, étrangement me manque, les gens qui y sont aussi, et puis… Mon avenir professionnel… Je ne vais pas être Barmaid toute ma vie. Mais que ce soit à cause de ça ou autre chose, je vais suivre son conseil, et en profiter. Une soirée avec mon petit-ami ne me fera pas de mal. Ne nous fera pas de mal. En effet, ces derniers temps, nous ne nous croisons qu’en coup de vent. Entre mon boulot et ses recherches à lui, il ne nous reste que très peu de temps pour nous. Parfois je me dis que New-York n’a pas totalement disparu, même si j’ai l’impression qu’il n’y a que moi qui le ressent.
Oh je sais que Jude m’aime. Je sais qu’il n’est pas infidèle, et je sais qu’il tuerait sans doute pour moi. Mais je n’ai pas, plus, l’habitude d’être séparé de la sorte. Je ne peux m’empêcher de me dire que, même progressivement, plus l’on s’éloigne, et moins de temps nous passons ensemble, un jour on ne se manquera plus. Et ce jour-là, c’est sans doute ma vie entière qui s’écroulera. Parce que j’ai tout construit autour de lui, et avec lui. Il y a deux proverbes : Les opposés s’attirent, et : Qui se ressemblent s’assemblent. Nous, nous sommes de ceux qui s’attirent. Et nous avons su nous assembler. Il fallait que j’attise la flamme à nouveau. Quitte à l’enfermer à la maison. En ce moment, j’avais besoin de lui, de sa présence, plus que jamais. Besoin de lui parler de mes doutes professionnel, qu’il me conseil, et puis je voulais en savoir plus sur son avenir à lui, qui semblait si prometteur. J’avais donc, pour l’occasion, été faire quelques courses rapide. Du bon vin, des plats à emporter de chez le meilleur traiteur du quartier, des bougies, et même une robe d’été en jean délavé, ravissante, bien dans mon style.
Le truc, c’est que je ne savais pas exactement à quelle heure rentrait Jude quand j’étais de fermeture. Tout ce que je savais, c’est que quand moi, je rentrais, il était déjà profondément endormi dans notre lit, ou alors sur le canapé, devant la télé, encore allumée. C’est seulement sur les coups de 9 :00PM quand tout fut prêt, que je me décidais à lui envoyer un bref sms pour l’informer qu’une surprise l’attendait à l’appartement. Je ne suis pas du genre à être la parfaite femme au foyer, à attendre son petit mari rentrer du boulot avec son attaché-case. Au contraire, c’est tout ce que je déteste. Mais là, je voulais que ce soit notre soirée. Les yeux rivés sur l’écran de mon téléphone, j’attendais une réponse qui ne vint jamais. Bah. Pas de quoi s’inquiéter. 9 :45PM. Tut. Tut. Tut. Vous êtes bien… Répondeur. Inutile de laisser un message, si son téléphone n’est pas allumé, il ne le recevra pas.
Un peu nerveuse, j’attrapais mon paquet de cigarette, et allais la fumer sur le balconnet. Personne à l’horizon, c’était calme. Bien trop calme pour moi. Presque angoissant. Nouvelle tentative. Tut. Tut. Tut. Cette fois je n’attendis même pas que le répondeur se déclenche. Je rentrais à nouveau, et cette fois je me dirigeais vers le frigo pour y sortir une bière fraiche. J’aurais préféré le vin mais cela ne se fait pas. Je ne l’ai pas acheté pour me la siffler toute seule. 10 :30PM. Les tonalités d’attente me tapent sur le système, si bien que je décidais de cacher mon mobile sous un coussin pour ne pas être tentée de l’appeler une nouvelle fois. Simplement, tout ça ne lui ressemble pas. Pas du tout même.. Les bougies se sont presque entièrement consumées maintenant. La bière était la dernière, j’avais été donc obligée de me rattraper sur la bouteille de vin. Un verre, puis deux, puis trois… Une dernière tentative en vain et le téléphone avais fini dans le mur de l’entrée. Voilà, au moins je ne pourrais plus m’énerver dessus. J’éteignis les lumières, les bougies, et restait là, sur le bar, mon énième verre dans une main, une cigarette dans l’autre. Fixant la porte d’un regard noir.
Clac. Clac. Le bruit de clef dans la serrure me fait sursauter. Je ne m’y attendais plus. L’ombre entre doucement et discrètement dans l’entrée. Comme s’il ne voulait pas faire de bruit. Pourtant il devrait savoir que je suis censé être de service ce soir. Ou alors il sait grâce à mon premier sms, mais m’a filtré. Mes craintes me gagnent, Ne veut-il plus de moi ? Quelque chose avait donc réellement changé en tout cas. J’allumais la lumière tout d’un coup, sans dire un seul mot. Le silence qui suivit ne dura que quelques secondes, mais il me paraissait être une éternité. Mon visage était ferme, et mes traits devaient être fatigués, Merci alcool. « C’est pas ton genre de pas prévenir. T’étais ou ? » Tout le vin que j’ai ingurgité me fait trembler légèrement la voix. Je me lève avec difficulté du siège de bar et me plante en plein milieu du salon. « J’sais pas si t’as reçu mes messages, et mes quinze milles appels, mais du coup, t’es légèrement à la bourre pour la bouffe. Du coup tu m’excuseras, mais l’attente, ça me donne soif. Même les bougies en sont morte tu vois.» Dis-je avec un rire mauvais dans la voix, ne lui laissant pas le temps de répondre à ma question précédente et pointant du doigt la bouteille vide.
« J’espère pour toi que tu as sincèrement une bonne excuse pour m’avoir laissé en plan comme ça Jude. C’est bien la première fois que tu me fais ça, et ça fait des semaines qu’on se voit en coup de vent. Je veux plus de cette vie-là moi. Pour ça on aurait pu rester là-bas hein. » Dis-je en m’approchant calmement de lui. « Putain mais tu pue l’alcool en plus ! T’était ou bordel ?! » Si je n’avais pas été si agacé par son comportement, je crois que j’en aurais pleuré.
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Sujet: Re: It hurts me to say that it hurts me to stay || Kaylee Jeu 1 Aoû 2013 - 15:08
C’est une sale habitude. Je ne rentre jamais brusquement dans l’appartement. Je suis légèrement parano et j’ai toujours peur de découvrir quelque chose d’atroce de l’autre côté de la porte. La soirée, la fatigue, les médocs, l’alcool… Tout cela me fait tourner la tête. Je plisse les yeux et tapote le mur à la recherche de la petite lampe installée dans l’entrée. Je n’ai pas envie d’allumer toute la lumière. Notamment parce que je sais pertinemment que mon cerveau cerveaux ne supportera pas tant de lumière d’un coup. Lorsque ma main parvient enfin à trouver l’interrupteur, que mon pouce va pour enclencher le petit bouton, l’appartement s’illumine de mille feux. D’un coup… Comme ça. Surpris, je me redresse brutalement. Je bats des cils et essaye de comprendre. Je plisse les yeux. Le sol tangue légèrement à cause de mon mouvement brusque mais je ne tarde pas à remarquer la présence de Kaylee derrière le bar. Son visage est complètement fermé. Elle me regarde sans dire un mot et je sens le poids de la culpabilité s’abaisser brutalement sur mes épaules. Mon cœur ne bloque. Mon estomac se noue. Je me sens mal. Je ne me demande pas une seule seconde ce qu’elle fait là. Ce n’est pas d’être pris qui me fait du mal. Mais c’est au contraire, le fait de la voir dans cet état. « C’est pas ton genre de pas prévenir. T’étais où ? » Sa phrase est accusatrice. Elle me pointe du doigt juste par le son de sa voix. J’ai presque l’impression que la foule hurle de me réduire en cendre. Ils sont de son côté. Qui ne le serait pas ? C’est moi le mec indigne… C’est moi celui qui est faible et qui ne sait pas garder la tête froide. Je suis celui qui l’a trahie, celui qui ne la mérite pas.
« J’sais pas si t’as reçu mes messages, et mes quinze milles appels, mais du coup, t’es légèrement à la bourre pour la bouffe. Du coup tu m’excuseras, mais l’attente, ça me donne soif. Même les bougies sont morte tu vois. » Son rire entre en moi. Il est mauvais. Il est plein de haine ou peut-être est-ce de la déception. Mon regard parcourt le salon. Je comprends alors qu’elle n’est pas allée travailler ce soir. Elle avait dû prévoir tout un repas en tête à tête. Et moi… Moi je ne suis pas rentrée de la soirée. Je ne lui ai même pas donné un coup de téléphone. Pourquoi ? Peut-être parce que j’avais coupé tous liens avec la société en éteignant mon portable. J’avais tout coupé pour ne pas être rattrapé par la réalité. J’avais simplement envie de me noyer tout en étant un inconnu. Je ne voulais recevoir aucun message pouvant me ramener à la raison. J’avais trop honte pour faire demi-tour. J’ai creusé ma propre tombe et me voici en train d’y agoniser. Je regarde mon propre enterrement sans avoir la force de tout stopper. Je n'ai ni les mots, ni l’envie de faire quoi que ce soit. Je mérite tout cela. Je mérite sa rage et son dégoût. Je ne suis pas digne d’elle… Voici ce qu’une voix me répète sans arrêt. Tu n’es pas digne… Regarde-la ! Elle est si parfaite ! Si pleine de vie… Tu n’es qu’un déchet ambulant ! Tu n’es même pas capable de la protéger ! Tu n’es pas capable de garder les pieds sur Terre et de continuer à suivre tes propres résolutions ! Tu es minable, Jude. Minable ! Étrangement cette voix ressemble à celle de mon père. Pleine de mépris, de rage et de noirceur. Elle a la saveur amère du vieux démon trop puissant pour être battu. Je n’ai ni les armes, ni la force.
Les bougies sont mortes. Tout comme moi… Tout comme notre amour ? J’ai soudain peur d’avoir commis l’erreur de trop. J’ai peur de n’avoir aucun mot pour m’excuser. De toute façon, je ne sais si j’en suis capable… Peut-être est-ce mieux de mettre fin à tout cela ? Kaylee trouvera un mec mieux, un mec qui saura la protéger. Je suis minable… Minable. Elle s’approche doucement de moi tout en me disant : « J’espère pour toi que tu as sincèrement une bonne excuse pour m’avoir laissé en plan comme ça Jude. C’est bien la première fois que tu me fais ça, et ça fait des semaines qu’on se voit en coup de vent. Je veux plus de cette vie-là moi. Pour ça on aurait pu rester là-bas hein. » Son ton me déchire. Je repense à New-York, à celui que j’étais dans cette ville. Je n’ai pas tellement changé. Je suis redevenu le même en un claquement de doigt. Ou plutôt en un accident. Que veut-elle que je lui dise ? Sincèrement ? Elle rajoute que je pue l’alcool et me demande où j’étais passé.
J’avale enfin de l’air. J’ai l’impression d’avoir arrêté de respirer depuis que mon regard à croiser le sien. Je suis toujours immobile dans l’entrée. Je ne réfléchis pas à ce que je m’apprête à dire. Je ne sais même pas pourquoi ces mots sortes de ma bouche. Je les regrette presque instantanément mais je sais que l’alcool y joue un rôle tout particulier. « Quoi ? Qu’est-ce que tu veux que je te dise, hein ? Que je suis qu’une merde ? Ouais ben je sais déjà tout ça ! Merci de me le rappeler ! » Je balance mon portable, l’herbe et mes clés sur la petite commode de l’entrée. En fait je vide mes poches dessus, les médicaments y compris. « Regarde ! Regarde comme ton mec n’est pas capable d’assumer ! Regarde-le ce minable que tu ne mérites pas ! Vas-y ! Fous-moi dehors ! Fous-moi dehors ! J’suis pas à ta hauteur… j’suis pas assez bien pour toi… j’suis qu’une merde, Kaylee ! Une merde ! » Mon cœur s’est mis à accélérer. Je ne contrôle ni mes mots, ni mes gestes. J’ai l’impression d’être spectateur de la scène. Je l’observe. Je veux arrêter ce mec bien trop violent mais je ne peux pas… Je ne me rends même pas compte que je suis ce type… Il me fait peur. Je veux qu’il parte. Je veux qu’il disparaisse. Mais il a toujours été présent depuis le début. Comment Kaylee ne l’a-t-elle pas remarqué ? C’était pourtant visible… Elle aurait dû le fuir.
« Kaylee, j’suis pas capable d’assumer les résolutions que je nous ai donné. Je suis pas capable d’être ce mec parfait… Je suis loin d’être bien. Je ne suis qu’un minable… J’peux pas rester avec toi… Toi, tu… » Je sens ma gorge ce nouer. Je ne veux pas partir. Il faut comprendre ça. Je ne veux pas la quitter. Je l’aime de tout mon être. Je n’arrive même pas à m’imaginer sans elle. Elle est mon seul repère. Elle est tout ce qui compte pour moi. Elle est ce qui me fait tenir debout le matin. Elle est cette petite chose qui fait battre mon cœur. Mais j’ai l’impression de devenir dingue. Je me dis qu’il vaut mieux pour elle d’être loin de moi. Je n’ai qu’une mauvaise influence. Je n’arriverai pas à être présent pour la protéger. Je ne tiendrais jamais mon rôle. Je la décevrais et la blesserai… Je ne veux pas que cela arrive. Ce soir, voir son regard triste posé sur moi, ça me fait comprendre que je ne suis qu’un imposteur dans sa vie. Comment puis-je vivre avec ça sur la conscience ? Je ne peux pas me permettre de rester avec elle tout en sachant que je la détruis. Elle mérite le meilleur. Elle mérite d’être aux bras du meilleur… Ce n’est pas moi ! Regardez-moi ! «… Tu mérites le meilleur. »
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Sujet: Re: It hurts me to say that it hurts me to stay || Kaylee Lun 5 Aoû 2013 - 0:12
It hurts me to say that it hurts me to stay. Jude & Kaylee
Pas une seule seconde je n’ai lâché son regard. Pas une seule seconde je n’ai baissé les yeux. Je suis comme un mur de béton armé, qu’on ne pourrait détruire. Tout du moins, c’est ce que je veux laisser paraitre. Je ne veux pas qu’il voit que je suis blessée, je ne veux pas qu’il voit une seule petite larme couler sur ma joue. Parce qu’au fond, il ne suffirait que des quelques mots pour que mon armure se brise en un millier de petits morceaux qui voleraient en éclats un peu partout dans la pièce. Je me fais violence pour ne pas tituber, pour contrôler mes tremblements, dans mes gestes, dans ma voix, pour retenir ces larmes. Je m’en donne presque mal au ventre. Mais je ne suis plus une petite fille. Je ne veux pas devoir vivre en faisant semblant. Semblant que tout va bien. Je ne veux plus fermer les yeux.
Son silence ne fait qu’augmenter mon agacement. J’ai envie de l’attraper par les épaules, pour le secouer dans tous les sens, lui hurler de me répondre, d’oser me regarder, qu’il dise quelque chose, n’importe quoi, mais qu’il brise ce silence qui va me rendre folle. Ma respirations est rapide, je voudrais l’arrêter, je voudrais pouvoir fermer mes paupières, et sentir son souffle chaud sur mon visage, mêlée à des excuses digne de ce nom. Mais tout ce que je sens en fermant les yeux, c’est le sol tangué sous mes pieds, ma tête tourné, et cette épouvantable odeur d’alcool chaud mêlé à son parfum. Je déteste ça. Je ne suis pas du genre à faire ce genre de crises d’habitude, bien au contraire, j’essaye de tout faire pour son bonheur, mais si aujourd’hui je craque, c’est que je le sent, il y a quelque chose. Quelque chose de grave.
Il n’a pas bougé d’un poil depuis qu’il est entré. Pas depuis que nos regards se sont croisés. Quand enfin, il semble percuter. « Quoi ? Qu’est-ce que tu veux que je te dise, hein ? Que je suis qu’une merde ? Ouais ben je sais déjà tout ça ! Merci de me le rappeler ! » J’arque un sourcil machinalement. Qu’est-ce qu’il me fait là ? Je prends cette phrase comme s’il était en train d’essayer de me faire culpabiliser, moi. Je ne comprends pas tout d’ailleurs. Depuis quand il se rabaissait de la sorte, et surtout à haute voix ? Ce coup-là, jamais il ne me l’avais fait. Je croisais les bras sur ma poitrine. « Tu m’fait quoi là Jude ? J’comprends pas. » Il vide ensuite entièrement ses poches sur le meuble de l’entrée. Je n’y prête pas tout de suite attention. J’attends simplement des réponses. « Regarde ! Regarde comme ton mec n’est pas capable d’assumer ! Regarde-le ce minable que tu ne mérites pas ! Vas-y ! Fous-moi dehors ! Fous-moi dehors ! J’suis pas à ta hauteur… j’suis pas assez bien pour toi… j’suis qu’une merde, Kaylee ! Une merde ! »
Mes yeux se baissent doucement sur ce qu’il me montre. Ses clefs, son téléphone éteint, un sachet contenant… ce qui semble être de la weed. -Boom. Mon cœur loupe un battement- Mais ce n’est pas là-dessus que mes yeux bloquent. C’est sur cette petite boite. Celle qui porte une étiquette. Je ne connais que trop bien ce genre de conteneur. Je ne peux pas voir ce qui y est inscrit, mais je le devine. Il y a son nom, son prénom, et la prescription d’utilisation. A cet instant, je crois que mon cœur s’est littéralement arrêté de battre plusieurs secondes. J’ai mal au ventre, à la tête, tout s’embrume, j’ai envie de vomir. Cela pourrait être n’importe quel médicament bénin, je pourrais ne pas m’en inquiéter du tout, simplement c’est tout le contraire. Je connais Jude au plus profond de son âme, et je connais ses faiblesses. Pourquoi croyez-vous, que même de simples dolipranes, sont cachés dans une boite au fond de l’armoire ?
« Kaylee, j’suis pas capable d’assumer les résolutions que je nous ai donné. Je suis pas capable d’être ce mec parfait… Je suis loin d’être bien. Je ne suis qu’un minable… J’peux pas rester avec toi… Toi, tu… » Sa voix parvient à mes oreilles, me poignardant de part en part, il semble plus calme qu’il n’y a a à peine quelques secondes. Je ferme les yeux, je serre les poings, je m’en fais mal. Je suis obligée de m’appuyer contre le canapé si je ne veux pas tomber sous le poids de la tournure de cette discussion. « Tait-toi. » Sifflais-je entre mes dents. Je ne veux pas qu’il finisse sa putain de phrase. Je ne sais pas s’il s’en rend compte, ou s’il est trop sous effet pour ça, mais ses mots rebondissent en moi comme une balle de revolver, brisant la porcelaine de mon être. Je ne veux pas être mauvaise, pas avec lui, je ne veux pas qu’il soit la cible de mon côté obscure… Pourtant il m’y force sans s’en apercevoir.
«… Tu mérites le meilleur. » PAN ! Il a osé. Il m’a tiré dessus. Alors que je lui ai demandé de ne pas le faire. Je devrais être flattée de ce qu’il vient de me dire, mais c’est tout son contraire. J’étouffe, je respire de plus en plus mal. « TA GUEULE ! » Et bam ! La gifle quant à elle, est partie toute seule. Je n’ai pas réussi à contrôler, ni mes paroles, ni mon geste, et mon regard est plus noir que jamais, malgré les larmes de colères qui embrument leur couleur azur. Je tremble de partout, et pourtant je suis le plus crispé du monde. Je tente de me reprendre, je passe une main dans les cheveux pour les relever. « J’voulais pas… » Faire ça… Mais tu m’y as forcé. Je tourne les talons et me dirige vers le bar. « C’est vraiment ce que tu veux ? Très bien regarde. » Je me dirige maintenant vers la chambre, attrape ce dont j’ai besoin et lance le tout en plein milieu du salon. Sa valise, et quelques-unes de ses fringues. « Bah va-y, t’attend quoi ?! HEIN T’ATTEND QUOI JUDE ? Vas-y ! Fuis ! Barre-toi, encore, laisse-moi toute seule. » Ma voix se répercute contre les murs et mes gestes sont tellement brusques que j’en ai fait tomber un cadre où l’une de nos photos trônait fièrement dedans.« Ha non, c’est vrai, tu peux pas, parce que la Jeep, elle aussi, a mystérieusement disparue.Tu croyais que j’allais pas m’en rendre compte ? » Dis-je de façon presque théâtrale. Un sourire en coin. « Figure-toi que ça m’amuse pas plus que toi mais j’ai plus que toi dans la vie tu ne comprends pas ça ?! j’serais prête à tout pour toi putain ! TOUT ! T’as pas le droit… J’te laisserais pas tout foutre en l’air mon vieu. » Cette fois, je ne pouvais plus empêcher les larmes de couler.
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Sujet: Re: It hurts me to say that it hurts me to stay || Kaylee
It hurts me to say that it hurts me to stay || Kaylee