Du boulot, encore du boulot et que du boulot. Etre psychiatre ne le lui laissait pas beaucoup de temps de répits, surtout en cette période. Avec ce qui s'était passé, Eden avait manqué de sérieux aux travailles et avait accumulé certains dossiers qu'il devait traiter au plus vite. Il devait en particulier se préparer pour un cas assez intéressant. Un patient souffre de déréalisation majeur, la femme de patient s'en inquiéter un peu trop et après le carnage qu'elle avait fait à l'hôpital, Eden avait décidé de s'en charger. Il n'avait jamais été du genre à faire des heures supplémentaires, ni-même à aller à l'hôpital à la dernière minute. Eden avait des horaires fixe, qu'il pouvait parfois modifier pour s'occuper de Faith. Ce soir, on l'avait appelé en urgence alors qu'il venait d'accompagner sa fille au lit. Il était hors de question de laisser Faith seule à la maison, même le temps d'un aller-retour. Il s'était du coup enfermé dans son bureau pour ne pas faire déranger sa fille qui s'endormait paisiblement. Il se connecta pour qu'on lui envoie par mail le dossier du patient, pour ensuite continuer une approche qu'il devra par la suite faire valider par le chef du département. Il alla se remplir un verre de whisky, pour rester debout. Alors qu'il prit son ordinateur portable pour se mettre au salon, il entendit un tonnerre. Un orage prenait place, c'était tellement rare. Cela le fit rire, il jeta d'ailleurs un coup d'oeil dehors pour voir que la pluie tombée fortement. Il aperçut même un éclair avant d'entendre un nouveau grondement sourd.

S’en faire attention à ça plus longtemps, il retourna sur le canapé du salon où il reprit le dossier qu’il avait presque fini. Il n’avait pas vraiment vu que trois heures venaient de s’écoulaient. Depuis le départ de Marissa, il avait l’impression que les choses allaient lentement, terriblement lentement. Mais quand Faith était là, il se sentait de nouveau… de nouveau chez lui. Sa fille était tout ce qui comptait pour lui. Il se sentait mieux quand il savait que sa princesse était dans le coin, à rêver de petit poney sans doute. Il porta à ses lèvres la dernière gorgée de whisky, tout en se laissant tombé en arrière quand un nouveau grondement se fit sentir. L’orage frappé fort, c’était drôle. Eden n’avait jamais eu peur de ça enfant, c’était plutôt son petit-frère qu’il devait rassurer.

Alors qu'il s'étira, tout en se plaignant intérieurement qu'il avait encore du boulot, il repensa à sa journée. Il était allé chercher Faith après ses cours et après manger, il avait fait des biscuits de noël. Il devait d'ailleurs décorer la maison demain. Ils avaient fini la journée en regardant un film de Disney, avant que le sommeil ne gagne la petite qu'il accompagna au lit. Maintenant, Eden était seul dans son salon à finir un boulot qui ne le motiver pas du tout. Il se laissa de nouveau tomber en arrière, pour fixer le plafond. Des éclairs illuminaient parfois la pièce, alors que des bruits sourds semblaient se rapprocher tant cela devenait fort. Une petite voix derrière Eden l'interpella alors. Il se retourna pour voir Faith en bas du canapé.

« - Qu'est-ce qu'il y a mon coeur, je t'ai réveillé ? » Il se leva tout en se dirigeant vers sa fille. Il avait quand même allumé la télé en allant dans le salon, alors peut-être que le son était trop fort, qui sait ? Mais en voyant sa fille, il comprit que ce n'était pas ça. Elle semblait complètement effrayée. Eden compris alors très vite que c'était l'orage. C'était sa fille, après tout. « - C'est l'orage, c'est ça ? Viens là. » Il attrapa sa fille par la taille pour la soulever et la porter dans ses bras.

La vie que vivait la petite Faith en ce moment était tout sauf ordinaire pour une petite fille de son âge. Elle était sensée vivre dans une seule maison, avec ses deux parents et grandir là, comme tous les autres enfants, ou presque. Depuis plusieurs semaines maintenant, Faith dormait la plupart du temps chez sa tante Emma, dans la chambre de sa cousine avec qui elle s'entendait à merveille. Sa maman dormait dans la chambre pas très loin de la sienne et pour une raison qu'elle ignorait, son papa n'était pas avec elles.  Parfois, la petite fille demandait à sa maman quand elle pourrait retourner dans sa maison, avec ses deux parents, sa chambre et ses propres jeux à elle. Elle appréciait la compagnie de sa tante qu'elle apprenait doucement à connaitre. Elle en avait souvent entendu parler, mais Faith n'avait jamais vraiment pu prendre le temps d'en savoir plus.  Marissa lui répondait à chaque fois une date précise, un jour précis, comme si c'était programmé à l'avance. De plus, la petite Jefferson retournait chez elle, mais au final elle y restait avec son papa, sans sa maman. Les moments où ils se retrouvaient tous les trois se faisaient de plus en plus rares et c'était loin d'être évident pour la compréhension de l'enfant. Cependant, elle vivait avec, sans trop de poser de question, se disant que c'était qu'une période et que tôt ou tard, elle se retrouverait à nouveau chez elle avec son papa et sa maman.

Aujourd'hui c'était justement le jour où son père devait venir la récupérer à l'école. La brunette ne l'avait plus vu depuis au moins une grosse semaine. Elle qui le voyait tous les jours avant, c'était pas toujours évident. Sa maman lui avait dit qu'elle resterait avec son papa plusieurs jours et c'était au plus grand bonheur de Faith. Elle aimait passer du temps avec ce derniers, il était important pour elle et ce, même si elle ne le voyait plus autant qu'avant. A chaque fois qu'elle l'apercevait, elle ne pouvait s'empêcher de lui sauter dans les bras avec le visage souriant, les yeux pétillants. L'enfant profitait des moments qu'elle passait avec son père. Se balader, jouer, regarder la télé, rigoler, elle aimait partager tout ça avec lui et le pire, c'est qu'elle ne s'en lassait jamais. Elle partageait des moments similaire avec sa mère, mais elle avait l'impression de la voir plus souvent et donc, pouvait en profiter tout autant. En fait, ce qui lui manquait vraiment, c'était ces moments à trois, mais ça ne faisait pas d'elle une petite fille malheureuse.

Après avoir retrouvé son père, ils étaient rentrés. Elle avait foncé dans sa chambre pour y retrouver une grande partie de ses jouets. Elle était ensuite redescendue pour manger en compagnie de son papa et l'avait ensuite aidé pour ses gâteaux de Noël. Au final, ils avaient terminé devant un dessin animé Disney où la fatigue avait gagné la jeune enfant. Elle dormait paisiblement dans son petit lit se situant à l'étage, dans une chambre rose, remplie de jouets, de poupées, pas loin de la chambre de son papa. Un éléphant en peluche contre elle, elle se laissait bercer par la chaleur et le silence qui se propageait dans sa chambre. Enfin, ça c'était jusqu'à ce qu'un orage se fasse entendre. Premier coup de tonnerre, plutôt léger, la petite brunette se contentait juste de se retourner dans son lit. A peine 10 minutes plus tard, un coup beaucoup plus lourd accompagné d'un éclaire réveillant Faith en sursaut.  L'enfant s'immobilisait dans son lit, attrapait son éléphant. Son petit coeur s'accélérait dans sa poitrine, voulant s'assurer que ce n'était juste un rêve. Elle attendait là, patiemment pour voir si ce qui l'avait réveillé était réel ou pas. La patience ne faisant pas partie des qualités de la jeune Jefferson, la petite fille sortait de son lit d'un pas hésitant et se dirigeait vers la porte. Sur la pointe des pieds pour atteindre la clenche de la porte et la tirer vers elle. Une fois entre-ouverte, la gamine se faufilait dans le couloir éteint. Dans un premier temps, son réflex fut de se rendre dans l'ancienne chambre de ses parents afin d'y trouver son papa. D'une petite voix peureuse, elle s'exclamait « Papaa ? », mais aucune réponse. Elle finit par remarquer qu'il ne se trouvait pas dans la chambre. Elle fit le tour des pièces de l'étage, mais toujours sans aucun succès. Tenant son éléphant par l'oreille, le laissant trainer sur le sol, derrière ses petits pas, l'enfant se dirigeait vers les escaliers. Elle attrapait les barreaux de la rampe avec sa main libre et descendais les marches une à une. Un bruit de tonnerre la forçait à s'asseoir sur la marche sur laquelle elle se trouvait, se protégeant la tête avec ses petits bras, comme pour se protéger d'un quelconque éboulement dû à l'orage. Une fois le bruit apaisé, la petite fille se redressait et continuait de descendre l'escalier d'un pas un rien plus rapide. Elle s'approchait du divan et à son plus grand soulagement, voyait l'homme qu'elle cherchait depuis maintenant 5 bonnes minutes. Toujours d'une petite voix peureuse à peine audible, elle s'exclama : « Papaa ? ». Un air fatigué et apeuré se lisait sur le visage de l'enfant. Lorsqu'elle croisa le regard de son papa, celui-ci pensait dans un premier temps que le son de la télévision était trop fort. Faith tournait la tête vers l'écran, puis à nouveau vers son père. Il lui demandait ensuite si ce n'était pas plutôt à cause de l'orage. Elle acquiesçait d'un signe de la tête et suite à un autre coup de tonnerre, la petite fille accourait dans les bras que venait de lui tendre son papa. Faith se sentait beaucoup plus rassurée. A ses yeux, elle y était en sécurité. Son père était l'homme qui pouvait la protéger de tout et n'importe quoi, il était aussi celui qui serait là pour l'aider, il était son héros, beaucoup plus efficace que superman ou batman.

Elle posait son visage sur l'épaule de l'homme qui la portait, le temps de se rassurer et de se sentir en sécurité. Elle ne voulait plus remonter là-haut toute seule, elle voulait attendre que l'orage passe avec son papa. Elle sentait en même temps la fatigue la rendant un peu plus molle que d'habitude. Trois heures du matin, c'était pas l'heure à laquelle elle était encore là à veiller en plein milieu du salon, habituellement. Mais cet orage la traumatisait et de toute façon, il l'empêchait de dormir.  Elle redressait son petit buste pour pouvoir parler à son papa en le regardant et ajoutais d'une voix fatiguée : «  je veux pas retourner dormir. J'ai trop peur. » Elle entourait le coup d'Eden à l'aide de ses petits bras inefficaces et terminait : « Pourquoi ça fait beaucoup de bruit? Ca fait peur »

Toute cette situation était extrêmement compliquée. Une partie d'Eden reprochait beaucoup à Marissa d'avoir quitté la maison ce soir-là, Faith dans les bras. Il avait alors eu l'impression de se sentir horrible, en tant que mari et en tant que père. Ce simple geste résonnait en lui comme si tout chez lui était mauvais pour la petite fillette. Ça l'avait torturé, mais Marissa tentait de faire en sorte que ça marche. Elle voulait qu'Eden ne ressente pas que sa fille n'était plus là, mais soyons réaliste, elle n'y arrivait pas. C'était dur pour elle de laisser Faith à Eden et dur pour Eden de laisser Faith à Marissa. La pauvre enfant était en train de se faire jongler de l'un à l'autre et c'était horrible. Ils voulaient le meilleur pour elle, mais ne savait juste pas comment s'y prendre. Tout aujourd'hui est encore trop flou pour que les choses s'arrangeant. Eden était partagé entre laissé de côté tous ses sentiments pour offrir à Faith un foyer et à Marissa ce qui semblait être l'amour ou tout simplement se battre pour avoir auprès de lui la femme de sa vie et sa fille. Il avait la force de tout supporter, de se battre et de ne pas abandonner. Il l'avait. Mais le temps jouait contre lui, il le sentait. Il sentait son coeur faiblir à chaque seconde, meurtri par l'absence de celles qu'il aime. Il sentait son être disparaitre au fin fond d'un gouffre pour ne plus être qu'une machine, un psychiatre sans véritable profondeur. Il le ressentait de plus au travail. Il se contentait de travailler, tout simplement. De ne rien laisser d'autre influencer ses directives de psychiatre. Boulot, Boulot, Boulot. Et la vie dans tout ça n'existait pas jusqu'à ce que l'heure indique qu'il était tant pour lui de revenir à la réalité.

Il s'accrochait à ses moments avec ses filles comme si c'était tout ce qui lui restait. Il s'accrochait désespérément à ses souvenirs qu'ils continuaient de créer. Parce qu'il ne pouvait s'accrocher à rien d'autre si ce n'était à sa fille. Sa petite fille chérie. D'ailleurs, l'orage qui faisait rage actuellement semblait l'avoir réveillé. Lui qui pensait continuer à bosser se retrouver désormais avec sa fille dans les bras.

« - ça va aller, mon coeur. Ça va vite passer. » Dit-il en déposant un baiser sur la joue de Faith tout en la gardant bien contre lui. L'une des plus grosses frayeurs d'Eden, quand elle était toute petite, c'était de la faire tomber. Même aujourd'hui il avait peur que ça arrive, alors que ce n'était pas possible. Elle était tellement légère encore. Tout en reprenant place dans le divan, Eden tenta d'imaginer une réponse efficace pour éviter que l'enfant prenne peur des orages. « - Tu sais, ce n'est rien du tout. Regarde. On va dire que le poing de ta main c'est un gros nuage tout moche, tout gris, tout triste. D'accord ? » Il avait pris le poignet de l'enfant, pour qu'elle replie ses doigts vers l'intérieur et qu'elle forme un petit poing. « - Et là, ma main tu vois, c'est un autre gros nuage tout triste. Bouh. Les nuages tout tristes, ils cherchent d'autres nuages tout tristes, comme ça ils peuvent devenir tout contents. Une fois qu'il se touche... booom ! » Il feinta une collision entre son poing et celui de l'enfant, imitant le bruit d'une bombe. « - Ils sont tellement contents qu'ils font du bruit. En fait, c'est comme ça qu'ils rient. » Il imita un rire, tout en imitant les grondements et se fit d'ailleurs rattraper pour ceux de l'orage, ce qui le fit vraiment rire. « Tu as vraiment envie que les gros nuages tout triste il reste triste ? »

Faith n'avait pas l'habitude des bruits sourds ou encore des cris, d'un environnement bruyant. C'était d'ailleurs quelque chose qui lui faisait particulièrement peur. Entendre deux personnes se disputer faisait battre son coeur beaucoup plus rapidement qu'à la normale.  Elle pouvait sursauter à un simple claquement de porte. Elle n'aimait pas qu'on lui crie dessus, d'ailleurs ses parents le faisaient rarement, voir pas du tout. Elle savait obéir, après une ou deux insistance, elle comprenait que s'ils lui disaient encore et toujours non, ça ne servait à rien de continuer. Elle n'était pas vraiment capricieuse, mais ne se privait pas pour en demander toujours plus, surtout avec maman. Faith était bien trop jeune pour comprendre le phénomène qui se passait en ce moment même, au-dessus de sa maison. Pour elle, le ciel allait probablement lui tomber sur la tête, ou sa maison allait s'effondrer à un moment ou à un autre. Elle ne se sentait pas en sécurité, là-haut, toute seule et même son éléphant ne pouvait pas la rassurer, mais ne le lâchait pas pour autant ; au contraire, elle lui serrait l'oreille encore plus fort. Elle ressentait un besoin de protection et la seule personne qui pourrait subvenir à ce besoin se trouvait quelque part dans la grande maison. Elle le cherchait un peu partout à l'étage, mais c'était sans succès. Elle descendit au rez-de-chaussée et s'empressa de rejoindre son papa. L'avoir devant les yeux la rassurait déjà un peu, mais ce n'était rien comparé au fait de se retrouver dans ses bras. A chaque éclaire ou coup de tonnerre, Faith serrait son papa un peu plus fort, c'était un automatisme pour la petite Jefferson. Eden essayait de la rassurer, lui déposant un baiser sur la joue. Le calme olympien de son père l'aidait un peu à apaiser sa peur, mais ce n'était probablement pas suffisant pour la calmer totalement. La petite fille ne comprenait pas pourquoi son père n'avait pas peur, pourquoi il était serein, pourquoi il arrivait à faire abstraction de ce qu'il se passait au dessus de leurs tête. Elle leva les yeux vers le plafond, s'attendant à un autre bruit qui allait l'effrayer, alors que son papa l'emmenait sur le divan, avec lui. Faith ressentait la fatigue, mais pourtant ne voulait pas retourner dans sa chambre, elle ne voulait pas dormir toute seule et encore moins y retourner toute seule.  Pour elle, elle avait réaliser un effort surhumain de descendre toute seule sans hurler de tous ses poumons après son père, mais elle avait beaucoup trop peur de fâcher le monstre au-dessus d'eux qui n'avaient pas l'air très content. Elle voulait être discrète, elle ne voulait pas qu'il l'a repère, d'où son calme en surface alors qu'intérieurement, elle était à deux doigts de se mettre à pleurer.

Sur le divan, près de son papa, son coeur s'apaisa, tout comme elle. Elle se laissait bercer par la fatigue, par la respiration lente de ce dernier et aussi et surtout, par sa voix. Elle buvait ses paroles et y était très attentive. D'ailleurs, il lui expliquait pourquoi ça faisait autant de bruit et ce que c'était exactement. Il l'aidait à ne plus avoir peur et ça semblait fonctionner, même si elle préférait rester là en sa compagnie plutôt que de retourner dans son lit où elle devrait continuer à se rassurer, mais toute seule cette fois. Faith se blottissait un peu plus contre son papa alors que ce dernier lui expliqua la raison pour laquelle lui, n'avait pas peur des orages. Elle fixait ses mains qu'il utilisait pour l'explication et serrait son éléphant tout contre elle de l'autre main. Elle ne disait rien, elle écoutait et tentait d'imaginer dans sa petite tête ce que lui racontait Eden. Il replia ses doigts vers l'intérieur pour former un poing. Ses yeux fixaient ensuite la main de son papa, beaucoup plus grande que la sienne et dans son esprit, imaginait un petit nuage triste et un autre plus gros tout aussi triste. Eden toucha la main de Faith en lui expliquant la collision entre les deux nuages. Elle regardait les deux mains de ses petits yeux fatigués et ensuite les plongea dans ceux de son papa qui finissait son explication. « Tu as vraiment envie que les gros nuages tout triste il reste triste ? » Faith fit un non de la tête « C'est pas un monstre qui est fâché ? » lui demanda-t-elle curieuse, essayant aussi de se rassurer. Elle attendit un instant la réponse de son papa puis enchaina : « Ils ont pas mal quand ils se touchent, les nuages ? » Elle saisit de sa petite main, celle de son papa et comme quand elle était plus petite, referma la paume de sa main autour d'un ou deux doigts d'Eden « T'as déjà été sur un nuage qui rigole ? Ils sont gentils ? ». Faith ne savait pas encore vraiment la différence entre un élément insaisissable et scientifique comme les nuages et les animaux. Pour elle, si c'était vivant, c'est que c'était un animal et c'était comme ça qu'elle imaginait les nuages. Quand elle en dessinait, elle ne pouvait s'empêcher de leur faire des yeux, un nez, une bouche tout comme le soleil. En fait, cet enfant était encore bien naïf, mais peut-être que dans le monde actuel, c'était pas plus mal qu'elle en profite tant qu'elle le pouvait encore ?

Il profitait de la présence de Faith à chaque fois qu'elle venait chez lui. C'était sa fille, sa raison de vivre et quand elle était là, il oubliait - ou essayait - tous les problèmes qu'il avait. Ce qui s'était passé avec Marissa, il savait que c'était difficile à comprendre pour l'enfant et qu'avec le temps peut-être, elle comprendrait plus de choses, mais pour l'instant il voulait qu'elle-même oublie que son père et sa mère ne soient plus ensemble parce qu'elle était trop jeune pour subir ce genre de choses. C'était trop tôt et Eden avait très peur. Il craignait que le divorce soit finalement prononcé, qu'ils se battent avec sa femme pour la garde de l'enfant... il avait très peur de tout ce que la petite subirait à cause d'eux. Une part de lui gardait espoir. Comme si c'était essentiel de toujours espérait le mieux avant d'imaginer le pire. Il se disait que Marissa reprendrais raison. Qu'elle comprendrait son erreur, qu'elle finirait par reprendre sa vie en main et qu'elle reviendrait auprès de lui. Il aurait pu la haïr. La détestait pour ce qu'elle avait fait. Il n'avait pas pardonné Marissa parce que lui-même l'avait trompé quelques années plus tôt. Non, la situation, bien que ressemblante, n'était pas la même. Eden avait commis une erreur stupide à un moment de sa vie ou tout lui semblait confus. Il avait tout et comme beaucoup de gens qui arrivent à un ce moment de leurs vies, il avait paniqué. Il avait l'impression de vivre une vie qui ne lui appartenait pas, alors il avait péter les plombs une nuit et s'était retrouvé dans le lit d'une autre. Comme si son corps et sa tête avait cherché un moyen de rajouter quelque chose de nouveau, quelque chose de différent. Même si cette chose mettrait fin au paradis qu'il avait construit. Marissa elle, elle disait aimé Ethan. Elle avait trompé Eden par « amour » et ça, ça lui avait brisé le coeur. Comme si elle s'était dit : Puisqu'il l'a déjà fait, moi aussi je peux. Et qu'ensuite son coeur s'est tourné vers ce meilleur ami d'enfance qu'Eden avait juste envie de frapper. Eden lui pardonnait, parce qu'il l'aimait et qu'il était persuadé que tout ceci n'était qu'une phase. Qu'un moment difficile. Il était persuadé qu'avec un peu de temps, ils pourraient tout refaire ensemble. Comme avant. Ils s'étaient éloignés l'un de l'autre, il pouvait décider de revenir l'un vers l'autre.

Il n'était pas surpris que l'orage ait effrayé Faith. Il pensait juste qu'une fois endormie, elle ne ferais pas attention à ce qui se passait dehors. Le bruit l'avait sans doute retirer de son sommeil. Automatiquement, Eden délaissa tout ce qu'il faisait pour venir auprès de sa fille. Il ferait tout pour elle. Même raconter des choses stupides. Il l'avait pris dans ses bras et il s'était assis sur le divan, gardant l'enfant sur ses genoux. Il fallait lui faire comprendre que tout vasbien et qu'elle n'avait pas à avoir peur des orages. C'est vrai que le bruit était affreux, que les éclaires étaient effrayants et que le tout pouvaient vous donner envie de vous cacher sous votre couette, mais Faith devait surpasser sa peur. Et Eden espérait la convaincre et l'aider, à sa manière. Il essayait de lui mimer la scène avec ses mains, de lui sourire et de la rendre moins nerveuse vis-à-vis de tout ça. A son âge, Eden se souvenait qu'il disait à son petit-frère qu'il était le maitre des orages et que c'était lui qui frappait le monde d'éclairs blancs ! Et que s'il n'était pas sage, alors il allait faire en sorte qu'un éclaire le touche et le réduise en cendre. C'était assez amusant, mais ensuite il s'était fait frapper dessus parce que c'était « méchant » de faire peur à son petit-frère. Visiblement Faith n'avait pas envie que le gros nuage soit tout triste. Elle rajouta cependant qu'elle était étonnée que ça ne soit pas un monstre.

« - Il n'y a pas de monstre dans le ciel, mon coeur. Il n'y a que des nuages, des oiseaux et parfois des gens dans d'énorme avions. » Il afficha un sourire rassurant. Il aimait ça chez sa fille. Elle était toujours curieuse, attentive. Il l'imaginait très bien en politicienne dans l'avenir, mais ça c'était parce qu'il adorerait voir sa fille présidente des États-Unis. « - Non, ils se font pas mal. Ils sont tout doux les nuages. » Il senti la petite main de Faith prendre ses doigts, ça lui fit tellement chaud au coeur. C'était tout con, mais si Eden apaisait Faith, elle avait le même effet sur lui. Toute sa colère, sa rancune, sa haine, disparaissait quand l'enfant était avec lui. Elle était son soleil. La plus belle chose qu'il possédait et l'unique chose qu'il ne voulait pas perdre.

« - Non, jamais. Mais les nuages sont tout gentils. Quand ils rient, tu ris aussi. Comme quand Papa te fait des chatouilles. » Et sans attendre, riant, il lui fit quelque chose chatouille pour qu'elle se mette à rire.

Eden essaya tant bien que mal d’aider Faith à faire disparaître sa peur pour les orages. En effet, à chaque fois que le bruit sourd du tonnerre atteignait les tympans de la petite fille, cette dernière avait l’impression que le ciel allait lui tomber sur la tête et lorsqu’elle était dans son lit, son premier réflex était de se cacher à l’aide de sa couverture, comme si ça allait la sauver des monstres ou encore d’autres choses qui pouvaient arriver lorsqu’un orage faisait rage. Ensuite, lorsqu’elle avait assez de courage, elle se dépêchait de sortir de son lit pour rejoindre celui de ses parents et ici, celui de son papa. Etant donné l’absence de ce dernier malgré l’heure tardive. Faith avait continué à chercher dans la grande maison après l’homme qui avait l’habitude de répondre à ses nombreuses questions, jouer avec elle et qui était en quelque sorte, l’homme de sa vie. La petite Jefferson était très proche de ses parents. Mais son père lui apportait un sentiment de sécurité beaucoup plus grand et plus fort que sa maman qui elle, lui servait de modèle. Eden était là pour la rassurer, pour l’apaiser et elle savait qu’avec lui, rien ne pourrait lui arriver. Avec Marissa, elle aimait acheter des nouvelles robes et de nouvelles chaussures. A ses yeux, sa maman était la plus belle et elle voulait lui ressembler plus tard, pour pouvoir se marier avec un homme aussi beau et fort que son papa. Evidemment, Faith ne s’imaginait que la vie d’adulte était bien plus compliquée. Elle ne voyait que le côté « rose et brillant » de la vie. Elle n’avait encore qu’une naïveté d’enfant. Une naïveté qui la poussait même à penser que sa maman allait revenir dormir dans leur maison. Elle ne comprenait pas pourquoi ses parents étaient séparés et ne posait pas plus de questions. Elle attendait, patiemment, mais plus le temps passait et plus la petite Jefferson se rendait compte que le visage de son papa changeait. Pas à chaque fois, mais elle le voyait parfois et le ressentait de temps en temps. A ce moment-là, elle ne pouvait s’empêcher de lui montrer à quel point elle l’aimait à l’aide d’un bisou par-ci, un câlin par-là. Elle se disait que c’est ce qu’aurait fait sa maman et puis même, la jeune enfant avait encore besoin de la présence et de la tendresse de ses parents. Elle n’était pas prête à entrer dans l’indépendance enfantine, elle était bien trop attachée à Eden et Marissa pour pouvoir s’en détacher comme l’était Jamie, par exemple.

Alors que Faith était descendue au rez-de-chaussée à la recherche de son papa afin de calmer ses peurs, elle finit par le trouver dans le salon. Tenant l’oreille de son éléphant en peluche, elle se retrouva vite fait sur les genoux d’Eden. Elle se sentait déjà moins angoissée de voir que lui-même n’avait pas peur. Si lui ne craignait rien probablement qu’elle non plus n’avait rien à craindre ? Et pourtant, le bruit était trop bruyant pour calmer la panique de l’enfant. Faith n’aimait pas les choses trop bruyantes. Elle n’aimait pas l’orage et elle n’aimait pas non plus entendre sa maitresse crier. Lorsque parfois, ses parents se disputaient pour X ou Y raison, Faith s’empressait même de monter dans sa chambre, afin d’éviter les cris qui la stressaient. Sa maman lui expliquait que c’était normal, chez les grandes personnes. Qu’on ne pouvait pas toujours être d’accord, mais malgré tout, Faith ne pouvait s’empêcher d’éprouver de la peur et de la tristesse en entendant son papa et sa maman se crier dessus. Finalement, elle se concentrait sur ses jeux, jusqu’à ce que la dispute prenne fin et curieuse comme pas deux, elle redescendait pour s’assurer que tout allait bien. Aujourd’hui, tout n’allait pas bien, et pourtant elle n’arrivait pas à le comprendre. Pour elle, c’était un peu le flou, mais ce qu’elle pensait, c’était que de toute façon, sa maman reviendra. Sur les genoux de son papa, ce dernier attrapa sa main et formait un poing. Elle le regarda faire et enfin, il lui expliqua une histoire qui l’intéressait au plus haut point. Elle n’avait pas compris ça comme ça, elle s’imaginait que les orages étaient des monstres et parfois même, elle hésitait avec le fait que des grosses pierres allaient lui tomber sur la tête. Ou peut-être encore était-ce des dinosaures qu’elle avait été voir un peu plus tôt dans la semaine avec sa classe. La dame leur avait expliqué qu’ils n’existaient plus, mais peut-être qu’elle s’était trompée ? Sauf que non, même son papa le lui disait et elle avait tendance à le croire plus que les autres. Les mots qui sortaient de la bouche d’Eden la rassuraient, tout ce qu’il lui disait n’avait rien d’effrayant. Elle trouvait les oiseaux jolis et les nuages, lorsqu’ils étaient blancs, elle aimait bien les regarder et voir ce qu’ils dessinaient parfois. Elle fut soulagée de savoir que tout ce bruit n’était pas des monstres mais bien des nuages. Faith avait souvent voulu aller dans les nuages, un peu comme les bisounours, à la télé. Ils vivaient sur des nuages et elle trouvait ça beau et rassurant. « Les gens dans des énormes avions, ils sont dans les nuages aussi alors ? Moi aussi je voudrais y aller » Elle continua à poser des questions à Eden, un peu trop curieuse. C’était probablement un de ses défauts, ou de ses qualités. En même temps, quel enfant ne l’était pas ? Mais Faith l’était vraiment beaucoup. Lorsqu’elle apprit que les nuages étaient tout doux, elle ne put s’empêcher de tourner son visage par la fenêtre, comme si elle pouvait les voir, mais il faisait bien trop noir. L’enfant ne pouvait voir que les éclairs qui n’étaient guère plus rassurants que le bruit, au final. Elle afficha une moue inquiète jusqu’à ce que son papa commence à la chatouiller. Faith se tortilla dans tous les sens laissant échapper un rire cristallin. Elle glissa petit à petit des genoux d’Eden, rigolant toujours jusqu’à atterrir doucement sur le sol. Faith regardait son papa, oubliant toutes ses peurs et puis s’empressa de remonter sur le divan. Elle hésita un instant avant de retourner sur les genoux de son papa, de peur qu’il la reprenne en charge avec ses chatouilles. Elle frotta ses yeux qui commençaient un peu à piquer avec la fatigue et finalement, retourna près d’Eden. Elle ne faisait plus attention à l’orage et n’y pensait même plus. Mais elle n’était pas sûre qu’une fois toute seule dans sa chambre, elle arriverait à se rassurer aussi bien que le faisait son père. L’enfant voulait rester en bas, elle s’y sentait plus en sécurité. Elle voulait regarder des dessins animés et probablement s’endormir devant. « Papa, je veux pas aller en haut. Je voudrais rester ici et regarder Raiponce » lui demandait-elle indirectement avec une petite moue triste. Elle accompagna sa demande d’un câlin afin de le faire plier plus facilement « Allez papa, s’il te plait, on regarde Raiponce? ».

L’orage se fit entendre à nouveau et inconsciemment, la jeune enfant plaqua ses deux mains sur ses oreilles, afin d’empêcher le bruit de l’effrayer. Elle repensa à se que son papa lui avait expliqué et elle ne pouvait s’empêcher d’imaginer que demain, quand elle se réveillerait, le ciel serait bleu et probablement qu’il y aurait d’autres nuages plus silencieux, mais eux seraient blancs. Une autre question lui venait en tête « Papa, pourquoi parfois les nuages sont blancs et parfois gris ? Moi je préfère les blancs, ils sont plus beaux. » Finalement, en attendant la réponse d’Eden, elle frotta son œil une fois de plus toujours en regardant par la fenêtre et puis, sa tête se poser sur le torse de son papa, fixant toujours la fenêtre. Elle pourrait même s’endormir là, les bras de papa c’était bien plus confortable et rassurant que son lit où elle se trouvait toute seule, face à ses craintes une nuit d’orage.

Que Faith ait peur des nuages, ça ne l'étonnait pas. A son âge, ce qu'on ne comprend pas, on l'imagine. Alors Eden devait essayer de rendre ça moins horrible et plus compréhensible pour elle. En grandissant, elle apprendrait la vérité, probablement en cours à l'école, mais là pour le moment il devait juste la rassurer. Depuis le départ de Marissa, le père de Faith savait parfaitement que les choses n'étaient pas très claire pour l'enfant et tout ce qu'il voulait pour sa princesse, c'était un environnement dans lequel vivre en toute sécurité. Bien entendu, elle avait remarqué le vide que Marissa avait laissé, s'était sa mère après tout. Mais Eden espérait sérieusement que les choses s'amélioreraient avec le temps. Que Marissa reprendrait une place dans sa vie et que l'enfant ne manquerait de rien. Parce qu'au fond Eden avait simplement peur que la jeune Faith manque d'amour. Il avait beau tout faire pour exceller dans son rôle de père, il savait que ce n'était pas un homme parfait et qu'il était, quelque part, responsable de ce qui arrivait à sa famille. Marissa n'était pas la seule avoir bousculé leur quotidien. Le premier, c'était bien lui. Il avait fait des erreurs, il le savait. Il avait l'impression que tout lui retombait dessus aujourd'hui. Mais le plus important, ça n'était pas forcément ce que lui ressentait, c'était plutôt que ce que l'enfant vivait. Sa priorité c'était elle. Alors forcément, même s'il était fatigué et que le travail lui pesait encore sur les épaules, il ne pouvait pas dire à sa fille d'aller se coucher sans la rassurer auparavant. Il était le genre de père attentif et présent. Il n'y avait pas d'urgence de toute façon, alors il la prendre dans ses bras et lui montrer que tout allait bien se passer et que rien ne grave n'allait lui arriver. Le monde dehors n'était pas si mauvais, l'orage n'avait rien de monstrueux.

Un éclaire frappa alors dehors, suivi d'un léger grondement. Mais Faith était dans les bras d'Eden qui usait de ses paroles pour lui expliquer les choses.

« - On ira dans les nuages un jour, mais pas ce soir. » Il aimait la curiosité de sa fille et ses grands yeux adorable qui ne témoignait que de l'innocence. Elle regarda dehors, comme si elle voulait voir les nuages et voir comment ils étaient, mais la nuit était tombée depuis bien longtemps alors à part les éclaires il lui était impossible de voir quoi que ce soit. Finalement, Eden lui fit des chatouilles, histoire de lui montrer qu'elle n'avait rien à craindre. Le rire de sa fille embellissait la demeure. Eden riait aussi, parce que le rire de sa fille était contagieux pour lui. « - Tu veux regarder Raiponce ? Mais il est tard. » Mais inutile de le dire, sa fille lui faisait déjà un câlin pour refaire sa demande qu'Eden ne pouvait pas refuser. Eden se leva, allant voir en dessous de la télévision laquelle des DVDs étaient celui de Raiponce. « - Raiponce, c'est bien la princesse avec les loooongs cheveux, c'est ça ? » Il attrapa ensuite le DVD Qu'il montra à sa fille, tout fièr de lui. Sans attendre, il sortit le CD de la boite et alluma le lecteur. Il pris ensuite la télécommande et retourna à sa place, attrapa la couverture qui était posée sur le fauteuil à côté. Alors qu'il alluma la télévision, un nouvel orage se fit entendre. Il se posa à côté de sa fille pour la rassurer alors que l'écran de la télévision affichait le début de DVD. Celle-ci lui posa une nouvelle question.

« - Les nuages gris ils sont tout tristes, tu te souviens ? Et bien les nuages blancs, ils sont tout contents. Tout simplement. » Il laissa sa fille se poser contre lui, elle était fatiguée, ça se voyait. Il plaça la couverture sur elle, alors que le film commença. Eden avait déjà vu le film, plus d'une fois d'ailleurs. Ils avaient même emmené Faith au cinéma lors de sa sortie, ça datait maintenant. Mais ça rappellerait surtout pas mal de souvenirs au psychiatre. Pas mal de moment à trois, entre Marissa lui et sa princesse. C'était difficile de se dire que peut-être plus jamais ils ne partageraient ce genre d'instant. Que Faith n'aurait sans doute plus de tel moment de bonheur, avec son père et sa mère réunit. Eden espérait d'un seul coup, plus que tout, que sa femme revienne un jour à la raison et que les choses soit de nouveau normal entre eux. Il était prêt à tout lui pardonner, si cela pouvait permettre à Faith de retrouver ses deux parents et si cela pouvait permettre à Eden de retrouver sa Marissa.

La petite Faith n’avait pas vraiment à se plaindre de la vie qu’elle avait. Elle vivait dans une grande maison, elle avait tout ce qu’elle désirait et jusqu’à maintenant, elle avait ses parents rien que pour elle. Du moins, ça c’était avant. Depuis un petit temps, la petite Jefferson vivait chez sa tante avec sa maman et ça, c’était un gros point d’interrogation pour l’enfant. Elle était encore trop jeune pour comprendre les histoires d’adultes, mais l’idée de vivre là plutôt que chez elle la dépassait totalement. De temps en temps, elle pouvait aller dormir quelques jours chez elle, avec son papa, ses jouets dans sa maison comme avant, ou presque. Lorsqu’elle s’y rendait, c’était sans sa mère. En fait, elle commençait à comprendre qu’elle ne vivrait plus avec ses deux parents, ensembles, dans la même maison et même si dans un premier temps c’était une solution qui ne la touchait pas vraiment, avec le temps elle savait que l’un ou l’autre allait lui manquer. Elle ne voulait pas voir ses parents alternativement, elle voulait les voir en même temps, mais ça s’annonçait beaucoup plus compliqué. Cette question, elle hésitait parfois à la poser. Elle voulait savoir pourquoi et surtout, si ça allait durer longtemps. Sa maman travaillait beaucoup, mais avait toujours réussi à trouver du temps pour elle tout comme son père. Faith avait la chance d’avoir Marissa et Eden comme parents qui, malgré leur situation de couple, étaient des parents qu’elle ne voudrait échanger pour rien au monde. Sa maman était son model, elle rêvait de lui ressembler plus tard, d’être aussi belle. Pour Faith, Marissa était la femme parfaite, la mère parfaite et rester séparée de sa maman l’attristerait de plus en plus. Son papa, c’était son héro ou comme dirait les jeunes filles de 18 ans, l’homme de sa vie. Plus tard, elle voudrait un mari comme lui, quoi qu’elle n’était même pas sûre de vouloir un mari, elle voulait juste son papa. Mais ça c’était les pensées d’une enfant de son âge. Sans doute que dans 10 ans, les conflits apparaitront parce qu’elle voudrait sortir en boite avec ses copines et qu’il ne lui donnerait pas l’autorisation. Ou peut-être même qu’il serait trop protecteur vis à vis des garçons. Tout ça, Faith l’ignorait encore et gardait en tête que plus tard, l’homme de sa vie resterait celui qui l’a toujours été : son papa à elle.

Alors qu’un orage éclatait au-dessus de leur maison, Faith profitait d’avoir un père comme le sien pour chercher de l’assurance et du réconfort. Les orages lui faisaient peur. C’était pas très beau, ça agissait surtout la nuit, lorsqu’il faisait noir et donc à ses yeux, c’était quelque chose d’assez fourbe. En plus de ça, ça faisait un bruit effrayant qui ne la rassurait pas du tout. En fait, elle ne comprenait même pas comment Eden arrivait à rester aussi calme face à cette situation et évidemment, ça faisait partie des choses qui faisaient qu’elle le prenait pour son héro. Avec lui, elle avait l’impression que rien ne pouvait lui arriver et ce, même si un orage l’effrayait au-dessus de sa tête. Lorsqu’il lui expliqua cette petite histoire sur les nuages, elle l’écoutait et naïve comme n’importe quel enfant de son âge, elle y croyait. Au moins, ça la rassurait et probablement que la prochaine fois, elle se rappellerait de l’histoire des nuages et n’aurait – presque – plus peur. Là, malgré tout, elle ne voulait pas retourner dans sa chambre, préférant de loin les bras de son père beaucoup plus rassurants que sa chambre rempli de peluches et de jouets. De plus, sa chambre se trouvait à l’étage du dessus et donc, beaucoup plus proche de cet orage que la pièce dans laquelle elle se trouvait actuellement. Non, non, non, elle ne retournerait pas dans son lit, pas maintenant et certainement pas toute seule.

Faith savait ce qu’était un avion et surtout, elle savait à quoi servaient les avions. Elle savait qu’ils devaient traverser les nuages pour aller quelque part. Elle n’y était jamais allée, mais elle voulait voir ce que ça faisait de monter dans les nuages et lorsque son papa lui affirma qu’un jour ils iraient, elle tourna furtivement la tête vers ce dernier. Elle ne croyait pas vraiment ce qu’elle entendait. « C’est vrai, papa !? Quand ? T’as déjà été dedans ? ». Faith réfléchissait à ce qu’elle avait pu déjà voir dans le ciel, lorsqu’elle l’observait avec ses copines. Il n’était pas rare qu’à l’école, elles s’installent sur un petit muret et observent ce qui les entoure. Les enfants qui jouaient, la maitresse qui surveillait chaque petite tête et même les nuages qui voyageaient dans le ciel. Tout ça, elle l’avait déjà remarqué et même qu’une fois, le ciel était tout rose avec des tons orange. Ce jour-là, elle avait trouvé ça drôlement beau et s’était toujours demandée pourquoi. « Papa, quand les nuages sont roses, c’est qu’ils sont amoureux ? ». L’enfant ne connaissait absolument rien à l’amour et était un peu trop petite pour ça, mais ça ne l’empêchait pas de se fondre aux stéréotypes des couleurs et pour elle, le rose était assez joli pour aller avec les sentiments des gens ou les animaux. Pour elle, des nuages c’étaient des animaux vivants et donc, ils pouvaient eux aussi être amoureux et la théorie que lui avait expliqué son papa confirmait ses pensées. Lorsque l’enfant sentit qu’il était temps pour elle de retourner dans son lit, elle tenta un léger caprice qui au fond n’en était pas vraiment un. Si elle montait dormir, sans doute que ses craintes allaient revenir et finalement, elle ne dormirait quand même pas. Elle referait le même cinéma et descendrait à nouveau pour trouver du réconfort. Faith demanda à son papa pour regarder la télévision. Raiponce, plus précisément. Elle aimait beaucoup ce Disney. La fille était très jolie, c’était plein de couleurs et puis Flynn Rider la faisait rigoler. « Oui c’est elle, Raiponce. Plus tard je veux des cheveux aussi longs qu’elle ! ». Pour les brosser, ça allait être toute une histoire et probablement que d’ici quelques années, elle trouverait ça horrible. En tout cas, on l’espérait pour elle et pour son entourage.

Lorsqu’Eden vint s’installer près d’elle, elle ne perdit pas vraiment de temps pour se coller à lui, non sans son petit éléphant en peluche qu’elle gardait contre elle. Il répondit à sa question concernant les nuages et comprenait mieux ce qu’il se passait au-dessus d’elle. En voyant cette histoire de roi et reine dans le dessin animé, elle reprit toujours aussi naïvement « Plus tard je voudrais être une princesse ! Une très jolie princesse et vivre dans un palais comme la princesse Jasmine. Ca serait chouette, non ? ». Faith se replongea dans son dessin animé sans savoir que pour posséder un palais, il fallait beaucoup d’argent. A la vue de Raiponce qui attendait vainement le retour de sa maman, l’enfant ne pouvait s’empêcher de penser à la sienne. Normalement, elle devrait être avec eux et pourtant c’était rare, ces derniers temps de se retrouver tous ensemble, à trois, comme avant. A cette pensée, Faith affichait une bouille triste et finalement, se décida à se lancer dans la question qui lui brulait les lèvres depuis un moment « Papa, pourquoi maman elle ne vient plus dormir avec nous ? Raiponce, sa maman elle revient à chaque fois. Moi, ma maman elle revient jamais ici, toujours ailleurs. »

Il lui suffisait de regarder Faith pour comprendre qu'il n'avait pas besoin de rendre sa vie plus compliquée. Qu'elle était l'unique raison pour laquelle il pourrait se battre. Faith avait le droit à une vie normal. Une vie simple où elle arriverait à évoluer. A comprendre ce qui était bien et ce qui ne l'était pas. Elle était encore jeune pour le moment, mais Eden savait que personne n'était trop jeune pour ressentir que les choses changeaient. Peut-être que Faith ne le subissait pas à la même échelle que les autres, mais elle ressentait sans doute l'absence de son père quand elle était avec sa mère et l'absence de celle-ci quand elle était avec son père. Il n'était pas spécialisé dans la psychologie des enfants, mais quand Marissa était tombé enceinte, il avait lu beaucoup à son sujet. Il se souvenait parfaitement de sa femme à l'époque, qui se moquait de lui et de sa peur d'être un mauvais père. Marissa avait toujours su trouver les mots pour le rassurer. Et cette Marissa lui manquait énormément. Désormais, il essayait de vivre avec l'idée qu'elle n'était pas là et qu'elle était prête à construire son univers avec un autre. C'était destructeur pour son coeur et il le savait, mais Faith était là. Elle lui permettait de garder la tête haute et de ne pas tomber. Il n'aurait jamais cru qu'avoir un enfant pouvoir conduire à ce type de relation. C'était tellement fort. Il espérait d'ailleurs être devenu un bon père et l'être encore à l'avenir si c'était le cas. Il était prêt à soutenir Faith durant les épreuves, parce qu'il voulait tellement son bonheur. La présence de l'enfant faisait des miracles dans sa vie. Elle était sa plus grande joie et la protection qu'Eden voulait lui offrir était sans limite. Quand elle n'était pas là, c'était horrible. C'était comme si on lui avait arraché quelque chose de vitale. Il savait pourtant quand grandissant, Faith allait un jour vivre sa propre vie, mais pour l'instant elle était jeune et elle était tellement importante à ses yeux. C'était sa princesse. Son bébé.

« - Je ne sais pas quand, mais bientôt. Je te ferais la surprise, d'accord ? » L'enthousiasme de Faith l'enchantait. C'était ce qu'il aimait le plus chez elle. Cette façon d'être curieuse de tout et de vouloir tout essayer. Elle avait l'oeil. Elle arrivait à remarquer les choses qui étaient différentes et elle avait le don de poser les questions auxquelles on ne s'attendait pas. Mais Eden était toujours prêt, comme s'il avait réponse à tout. C'était important pour lui d'avoir une conversation avec sa fille, même si pour le moment, c'était rarement très sérieux. Il aimait ces moment-là avec sa princesse et il n'aurait changé de place avec personne aux mondes. Il se mit tout d'un coup à rire face à la logique de Faith, répondant avec un sourire aux lèvres. « - Exactement ! Ma princesse est une fille très intelligente. Je suis fier de toi mon coeur. » Il déposa un léger baiser sur sa tête, imaginant des nuages roses tomber amoureux. Il savait que Faith avait peur de retourner dormir, c'était sans doute pour cette raison qu'il ne la força pas à retourner dans son lit. Si elle voulait regarder Raiponce, alors elle allait regarder Raiponce. Il préférait qu'elle s'endorme dans ses bras, en sécurité, plutôt qu'elle passe la nuit à trembler dans ses draps. De toute façon l'enfant savait parfaitement quoi faire pour convaincre son père qui était déjà debout avec le DVD dans les mains.

« - Si tu veux, ma princesse. Mais c'est Maman qui te coiffera, d'accord ? » Il se rendit compte qu'il parlait comme si Marissa était là, mais n'y pensa pas plus que ça, ne voulant pas que Faith lui pose des questions auxquelles il ne voudrait pas répondre. C'était l'habitude sans doute. C'était sa mère après-tout. Il retourna près de Faith, télécommande en main, prêt à faire démarrer le film. Même lui, en tant qu'adulte, trouvait le film d'animation fort sympathique.

« - Mais tu es déjà ma princesse ! » Il lui offrit son plus beau sourire, assez amusé par la situation. Après, il n'avait pas du tout les moyens d'offrir à sa fille un palais. Encore moins un pays entier pour qu'elle gouverne. Il resserra son étreinte tout en se concentrant sur le film avant d'entendre la voix inquiète de la petite Faith. C'était exactement le genre de question qu'il aurait aimé éviter, mais il savait qu'il ne pouvait pas ignorer l'enfant. Surtout maintenant. « - Ta maman est en colère contre moi. Je n'ai pas été très gentil. On a juste besoin d'un peu de temps et tout va s'arranger. Elle va revenir, tu verras. »

C’était important pour la petite Faith de passer des moments avec ses parents. Au mieux, elle préférait les avoir tous les deux en même temps, mais depuis quelques temps elle se contentait d’en profiter séparément. Ce soir, c’était au tour de son papa avec qui elle vivait, comme avant, dans la maison où elle avait grandi. Il y avait ses jouets en haut, ses peluches, ses poupées et elle la connaissait par cœur. Elle avait ses petites habitudes et pour un enfant de son jeune âge, vivre dans un endroit qu’elle connaissait était plus que rassurant. Parfois, ça camouflait presque la relation délicate que vivaient ses parents. Faith était curieuse et en même temps observatrice. Certes, elle préférait de loin s’occuper de savoir quelle robe elle allait mettre à sa poupée, ou encore quelle couleur utiliser pour colorier le château dans son livre de coloriage, mais parfois elle se posait des questions et ne pas avoir de réponses étaient de plus en plus déroutant au fur et à mesure qu’elle grandissait. Passer du temps avec son papa était important pour mini Jefferson. Il représentait beaucoup pour elle, tout comme sa mère, mais lorsqu’elle observait ses copines à l’école, elle savait que son père était le meilleur au point de lui sauter dans les bras à chaque fois qu’il venait la rechercher, comme si la dernière fois qu’elle l’avait vu remontait à des semaines. Faith aimait bien l’école, parce qu’elle avait ses copines et sa maitresse était gentille, mais elle préférait encore plus montrer à Eden ce qu’elle avait fait à l’école et passer des moments père-fille lui était vital pour son équilibre moral. A ses yeux, son papa représentait beaucoup plus qu’une simple personne ayant contribué à son éducation. Il était celui vers qui elle accourait lorsqu’elle avait peur ou encore avec qui elle voulait jouer et si son père avait le malheur de revenir trop tard, c’était tonton Eric qui devait supporter son interrogatoire ou son inquiétude. Et si son père ne revenait que dans une semaine, comme sa mère ? Et puis elle se rassurait en se disant que non, parce qu’il vivait dans la même maison qu’elle, alors que sa maman ne dormait plus là. La différence elle était là. Elle n’y connaissait rien aux histoires de grandes personnes et ne comprenait pas trop pourquoi elle devait attendre autant de jours pour voir Marissa, mais un jour elle réalisera et comprendra. Ca, elle en était sûre. En attendant, elle essayait d’être patiente et profitait pleinement de chaque instant aussi bien avec sa maman que son papa.

Ce soir, le temps était à l’orage et Faith n’avait jamais vraiment aimé ça. Quel euphémisme : ça l’angoissait complètement. Le bruit, les éclairs et en plus, c’était presque toujours la nuit, quand les enfants, comme elle, dormaient. Ca les tirait de leurs rêves pour les effrayer, du moins ça c’était ce qu’elle se disait et en tout cas, la concernant, c’était très efficace. Dès le moment où ce bruit sourd l’avait sortie de son sommeil, elle s’était empressée de chercher après la seule personne vers qui elle se tournait de ce genre de moment : son papa. Elle savait qu’il allait la rassurer, la protéger et sans doute lui donner des réponses à ses questions. En réalité, il allait agir en héro, comme elle aimait souvent l’appeler. Une fois au rez-de-chaussée, elle lui avait expliqué son problème et ici, c’était l’orage qui l’empêchait de dormir. C’était trop bruyant, c’était effrayant et la seule impression que Faith avait, c’était que le ciel était sur le point de lui tomber sur la tête. Rapidement, Eden lui expliqua toute une théorie qui aidait Faith à se réconcilier avec mère nature. La discussion avait même dévié sur les avions. Elle était rassurée, maintenant elle voulait voir de ses propres yeux et pour cela, il fallait prendre l’avion. Lorsque son père lui parla de la surprise qu’il lui ferait un jour, le visage de l’enfant s’émerveilla comme jamais : « C’est vraii ? Pour aller où ? » Faith avait saisi le but des avions : partir de quelque part pour aller à un autre endroit et ce, en traversant le ciel et donc, les nuages. Peut-être qu’elle rencontrerait des nuages amoureux, qui sait. En tout cas, elle l’espérait. « Moi, je trouve ça plus joli que des nuages blancs ou gris. Tu sais, une fois j’ai été avec mamie à la plage et au soir, il y avait des nuages roses et mamie, elle disait que c’était parce que le soleil allait se coucher. C’est vrai ? »

Faith s’installa près de son papa alors qu’il venait tout juste de mettre le DVD de Raiponce dans le lecteur. Pendant ce temps-là, elle lui avait parlé de son envie d’avoir des cheveux aussi longs que Raiponce et lorsqu’Eden lui proposa que Marissa se charge de la coiffer, elle réfléchit. Comment coiffer une fille avec des cheveux si longs ? Ca prendrait trop de temps et trop de place et puis dans la rue, probablement qu’on lui marcherait sur les cheveux aussi et ils finiront tout sales. Faith afficha une grimace suite à cette pensée « Non. Finalement je ne veux pas des cheveux aussi longs, ca va être trop difficile et pas pratique ». A la télé, c’était la chanson où Raiponce raconte un peu ce qu’elle fait de ses journées et lorsqu’elle compris qu’il lui arrivait de faire de la gym, Faith sourit. Elle adorait le cours de gym à l’école parce que ça lui permettait de se défouler. « Papa, je voudrais faire de la gym. Du tennis ou de la danse, comme à l’école ! Je peux ? » Lorsque ce dernier lui affirma qu’elle était déjà sa princesse, autrement dit, qu’elle n’avait pas besoin d’attendre d’être plus grande pour l’être, l’enfant rendit un sourire sincère à son père « Pour toujours ? ». Malgré le dessin animé, Faith réfléchissait parfois elle se concentrait sur l’histoire de Raiponce, mais parfois son esprit divaguait et des questions lui venaient, comme savoir quand sa maman allait revenir. Elle s’était posée cette question assez souvent et n’avait jamais trouvé la réponse. Alors qu’Eden lui expliquait la raison pour laquelle Marissa ne revenait pas, elle l’écoutait. Pour elle, son papa ne pouvait pas être méchant et elle ne voulait même pas chercher à savoir ce qu’il avait fait pour penser une telle chose. Peut-être qu’elle aurait dû lui en vouloir, mais même pas, parce qu’à ses yeux il était bien trop important pour elle. Elle lui adressa un sourire, contente de l’entendre dire que sa maman reviendrait bientôt « De toute façon, même si t’as été méchant, tu restes un héro et donc elle reviendra forcément super vite parce que je suis sûre qu'elle t'aime presque aussi fort que moi ». Naïve ? Oui peut-être, mais elle est encore jeune et en plus, elle voue un véritable culte à son papa, alors forcément…