Depuis mon arrivée dans cette ville j'avais été plutôt chanceux. Je ne savais pas encore trop bien combien de temps j'allais rester ici, un ou deux mois tout au plus, peut-être moins… Cela allait surtout dépendre des rencontres que j'allais faire, si jamais je venais à croiser la route de quelqu'un d'assez intéressant pour me faire rester plusieurs semaines, ce serait avec plaisir, mais si au contraire il n'y avait personne de vraiment passionnant alors j'allais vite reprendre ma voiture et filer vers le Nord. Cela dit, je devais d'abord me faire un peu d'argent, je voulais m'en mettre assez de côté pour atteindre le Texas. J'avais miraculeusement réussi à trouver un petit boulot dans un café du coin tenu par une fille adorable et incroyablement sexy prénommée Harper. Je devais simplement servir des cafés, débarrasser des tables, sourire aux clients et c'était à peu près tout. Pas très compliqué. J'appréciais quand même le poste parce qu'il me permettait d'entrer en contact avec la population locale et j'avais déjà pu rencontrer deux ou trois personnes sympas grâce à ça. En journée Huntington était un endroit vraiment bien sous tout rapport, j'avais un peu l'impression de me retrouver au milieu d'un plateau de télévision où tout est parfait et magnifique. On ne pouvait pas nier que c'était très beau, je trouvais même que c'était relaxant. Mais en même temps je trouvais que c'était un peu trop lisse. Heureusement, j'avais mis mes aprioris de côté pour découvrir la vie nocturne à Huntington Beach et laissez moi vous dire que si ça semble très calme en journée, le soir venu la ville se transforme et enfile un nouveau costume. Jusqu'à présent j'ai été relativement étonné, je n'aurais pas pensé m'amuser à ce point!

L'autre soir, j'étais dans un bar. Pourquoi changer les bonnes vielles habitudes? Seul comme un con, j'ai dû faire une ou deux parties de fléchettes avant de m'asseoir au bar. Sortie de nul part, il y a une fille qui est venu me proposer un verre. On a parlé, on a bu, et on a conclu. Définitivement, j'appréciais les filles de Huntington. Elle était plutôt mignonne, et une fois de plus j'essayais de ne plus penser à celle qui hantait mes nuits pour de vrai, celle avec qui j'aurais aimé coucher toutes les nuits des six derniers mois et celle avec qui j'aimerais coucher toutes les nuits à venir. Jagger. Bizarrement la journée je ne pensais pas trop à elle, peut-être parce que même lorsqu'on était ensemble on ne se voyait pas tellement lorsque le soleil brillait, mais la nuit son visage ne cessait de venir se dessiner devant mes yeux et toutes les filles se mettaient alors à lui ressembler. Naya, c'est le prénom de la fille qui m'a offert un verre, elle était jolie et sympa mais je ne m'étais pas vraiment intéressé à elle, en tous cas pas au départ. Je ne la voyais pas, je voyais celle que je voulais voir. Si on me mettait devant toutes les filles avec qui j'avais couché ces derniers mois, je serais incapable de les reconnaitre. A mes yeux, elles étaient toutes invisibles, parce que lorsque je passais une nuit avec elles, je passais une nuit avec Jagger. Dans ma tête en tous cas. Je sais que ça semble un peu fou, enfin non, c'est totalement fou,mais cette fille… Je n'arrive pas à l'oublier. Peut-être bien que je ne me force pas assez c'est vrai, peut-être bien que je n'ai pas envie de l'oublier mais quand même… Ce n'est pas normal de rêver d'elle, de voir son visage apparaitre sur le visage d'autres filles, ce n'est pas normal de murmurer son prénom lorsque je suis sur le point de le faire avec une autre… Et pourtant c'est exactement ce que je fais. En six mois j'aurais déjà dû tourner la page mais honnêtement, si vous l'aviez vu, si vous aviez connu ce que j'ai connu avec elle, vous pourriez comprendre de quoi je parle et surtout pourquoi il m'est impossible de passer à autre chose.

Naya avait donc fait l'affaire pour une nuit. Je ne comptais pas l'importuner d'avantage, je ne comptais surtout pas le revoir, mais le matin après notre petite soirée bien arrosée elle m'avait fait une proposition intéressante. Elle n'avait rien à voir avec les cruches que j'avais pu rencontrer jusque là. Elle se proposait de m'aider. Je lui avais un peu parlé de ma situation, comme quoi je voyageais et que je n'avais pas d'endroit où dormir à part ma voiture, le côté globe-trotteur ça fait toujours tomber les filles comme des mouches, elles trouvent ça sexy. En tous cas ça lui a donné une idée. Elle m'a proposé de vivre avec elle le temps que je reste sur Huntington. Un peu hésitant au départ je me suis dit que c'était peut-être pas une si mauvaise idée que ça. Elle était cool et elle n'avait pas l'air trop chiante. Et puis son canapé me paraissait toujours plus confortable que la banquette arrière de ma voiture pourrie. J'avais donc accepté et voilà que maintenant on cohabitait dans son appart de Pacific Lane. J'essayais de me conduire en invité modèle. Je ne laissais rien trainer, je n'utilisais pas son gel douche (surtout que s'en était un avec une senteur pour les filles), je faisais gaffe à ne pas fumer à l'intérieur et dès que j'utilisais un verre ou une assiette ou quoique ce soit du genre je le nettoyais immédiatement après. Ce matin, je ne l'avais pas encore croisé. J'étais parti assez tôt pour faire un footing sur la plage, à mon retour une heure plus tard j'étais allé prendre ma douche sans savoir si elle était toujours là. Aussi, lorsque j'eu fini de m'observer dans la glace dans une crise de narcissisme aigüe, je sortis torse nu, une simple serviette autour de la taille. Quelle soit là ou pas de toute manière ça ne changeait rien. Premièrement, je ne suis pas pudique, d'autant plus que durant quelques semaines j'ai vécu dans un camping sauvage et naturiste alors me balader à poils ne me gênait pas et deuxièmement, il n'y a rien qu'elle n'aie pas déjà vu sous cette serviette… Alors que j'arrivais dans le salon, je la vis se tenir debout au milieu de la pièce. "Salut" lui lançais-je joyeusement. "Bien dormi?" J'avais l'impression de crécher chez un pote, ou plutôt une pote en l'occurrence. Autant vous dire que j'étais à mon aise. Je me dirigeais vers un de mes sacs tout en ajoutant à son attention: "J'ai un truc pour toi". J'attrapais une enveloppe que je lui tendis. "C'est pour la bouffe, l'eau chaude, et tout le reste." Il y avait près de $250 dans l'enveloppe, j'espérais que ce serait assez pour le moment car de toute façon je ne pouvais pas me permettre de lui donner plus mais je ne tenais pas non plus à ne pas participer aux frais. Je n'allais pas me faire entretenir par une étudiante tout de même!

Alors que j'étais en pleine forme, requinqué par ma bonne petite douche après un footing bien crevant, je me sentais d'attaque pour une journée productive. J'aurais même pu lui nettoyer l'appart' si elle me le demandait. J'étais motivé pour n'importe quoi! De son côté, elle avait apparemment mal à la tête. Elle s'était sans doute un peu trop amusée hier soir et elle en payait le prix aujourd'hui. Je rigolais un peu, ce n'était absolument pas méchant, de toute façon ce n'est pas comme si je n'avais pas le droit moi non plus à une bonne gueule de bois de temps en temps, en plus elle irait sans doute mieux rapidement, elle n'avait pas l'air d'être dans un trop sale état. "J'espère que ça va vite passé!" Je lui lançais un petit regard en coin. Naya était le genre de fille avec du caractère, j'aimais bien ça. Avec moi elle était sympa mais quelque chose me disait que si elle le voulait elle pouvait être la pire des garces. Je préférais donc l'avoir de mon côté plutôt que contre moi. Elle me demandais justement si ma douche avait été bonne ce qui me fit sourire. J'ai toujours trouvé ce genre de questions plein de sous entendus. En général ce n'était pas n'importe qui, qui demandait ça. Par exemple, un pote ne m'aurait jamais demandé si j'avais apprécié l'eau brûlante sur mon corps nu, mais lorsqu'une fille le faisait c'était acceptable, surtout s'il y avait un truc entre nous. Entre Naya et moi il n'y avait rien, c'était purement amical, un peu sexuel aussi mais aucun sentiment. Cela dit, je me demandais quand même si elle n'avait pas d'arrières pensées en me demandant ça. "Moi ça va, je suis en pleine forme! Et oui, une bonne petite douche et je suis prêt à attaquer la journée. T'as des trucs de prévus?" Moi je n'avais rien planifié de spécial mais je voulais m'amuser un peu. MAis avant d'aller faire quoi que ce soit, j'avais une putain d'envie de me fumer une clope. Il fallait encore que je m'habille et ensuite je n'avais qu'à aller sur le balcon pour m'en griller une.

Je lui tendais l'enveloppe et elle l'attrapa au passage. Elle était étudiante, elle ne devait pas rouler sur l'or. En réalité je n'avais pas vraiment parlé de l'état de ses finances, j'avais d'autres chats à fouetter que de m'inquiéter de ça, elle n'avait pas l'air pauvre mais rien ne m'indiquait qu'elle était riche non plus et quand bien même ça aurait été le cas, je n'étais pas le genre de mec à vouloir se faire entretenir par qui que ce soit. Elle semblait plutôt satisfaite de mon geste et ce qu'elle me dit me confirma que j'avais bien fait. "Je suis désolé, c'est pas grand chose mais quand j'aurais ma paie je pourrais t'en donner d'avantage. En tous cas le temps que tu m'héberges, je tiens à participer aux frais." Je lui fis un sourire j'essayais juste de me montrer charmant. Je me tournais à nouveau vers mon sac dans lequel je fouillais un peu pour trouver un caleçon et un jean. Tournant le dos à Nayan, je laissais tomber ma serviette sur le sol, lui offrant un vue privilégiée sur mon postérieur magnifique, il faut l'avouer, en tous cas je n'en ai jamais entendu du mal et au contraire même je reçois régulièrement des compliments. J'enfilais calmement mon caleçon, puis mon jean avant de finalement attraper mon paquet de clopes qui trainait sur le haut de mes affaires. Je ramassais la serviette pour la poser sur mon sac et l'enlever du passage. Puis, je me tournais pour lui faire face à nouveau. Un sourire colgate accroché à mes lèvres, j'agitais le paquet devant ses yeux. "Ça te dérange si je fume sur ton balcon?" Je haussais les épaules. J'étais toujours torse nu et je ne prévoyais pas d'enfiler de t-shirt pour l'instant. "T'en veux une?" lui demandais-je dans un élan de partage et en ouvrant mon paquet de cigarette pour une prendre une.