Eden & Leah

« We're falling apart and coming together again and again. We're growing apart but we pull it together. Don't let me go. Under your command I will be your guardian. When all is crumbling I steady your hand. »

Accoudée au comptoir de la cuisine, je fixais le pot de glace dans lequel je venais d'enfoncer mon énorme cuillère. Les cheveux pas coiffés et vêtu d'un short ultra court, d'un vieux t-shirt et de ma robe de chambre préféré, j'avais quand même l'air d'une clocharde. Moi qui était pourtant toujours très soignée, très coquette, limite à me prendre trois douches par jour, je passais ma vie à me brosser les cheveux et mon maquillage était toujours impeccable, là j'avais vraiment touché le fond. J'avais passé une nuit de merde, impossible de fermer l'oeil évidemment, je n'avais pas cessé de ressasser ma dispute avec Marissa, je rejouais la scène en boucle dans ma tête et j'avais beau faire replay encore et encore, ça me semblait toujours aussi irréaliste. Heureusement, j'avais le réfrigérateur et les placards remplis de cochonneries pour me remonter le moral. A voir la cuisine, j'allais sans doute peser un peu plus lourd la prochaine fois que je monterais sur la balance. Il y avait des paquets de pop corn, de chips et des pots de glace éparpillés aux quatre coin de la pièce. Autant dire que je m'étais empiffré comme une grosse vache et ce n'était pas beau à voir. Je n'avais même pas pris la peine d'aller promener mon chien qui se trouvait quelque part dans l'appartement et qui apparemment mettait un point d'honneur à rester loin de moi, à croire que lui aussi été fâché après moi. De toute façon, reste-t-il encore quelqu'un qui ne soit pas fâché ou qui ne me déteste pas? Pas sûr! J'avalais une autre cuillerée de glace, je devais vraiment faire pitié à voir. Le pire c'est que je n'en pouvais plus de manger, j'allais finir par exploser. J'entremêlais ces espèces de crises de boulimie avec des crises de larmes, j'avais vraiment la sensation d'être folle. Folle désespérée surtout. Je n'avais cherché à prendre contact avec personne, au fond je n'avais pas envie de voir qui que ce soit et personne n'avait cherché à me joindre non plus, ou du moins je le supposais puisque j'avais explosé mon portable la veille au cours de ma dispute avec ma soeur et je ne savais pas s'il fonctionnait toujours. Je m'en fichais royalement pour tout vous dire. Encore un peu de glace et j'allais revomir. Non seulement je me dégoûtais moi-même mais en plus je me sentais vraiment mal et je ne faisais rien pour y changer quelque chose. Pour être honnête j'étais au niveau zéro de la motivation, je n'avais envie de rien et je me foutais vraiment de tout. Il pourrait y avoir un débarquement de martiens juste devant chez moi que je ne bougerais sans doute même pas. Me redressant un peu, je pris la direction du canapé, croisant mon reflet dans l'un des miroirs du salon, je n'osais même pas me fixer plus de quelques secondes. Je sentis une salle envie de pleurer refaire surface, je me demandais sérieusement comment c'était possible de pleurer autant. J'allais donc m'écrouler violemment sur le sofa où je décidais d'enfouir ma tête dans les coussins pour pleurer et crier à ma guise sans trop alerter les voisins. Une vrai tarée, je vous le dis! Mais il fallait que ça sorte, j'avais un peu trop de sentiments refoulés en moi, de la frustration aussi et je n'allais vraiment mais alors vraiment pas bien. Si je n'avais envie de voir personne, j'aurais tout de même bien voulu parler à Noah mais me montrer devant lui serait impossible, pas dans cet état. Je ne voulais pas qu'il me voit ainsi, ni même lui raconter tout ce qui s'était passé avec Marissa et pourquoi nous nous étions disputées. J'avais tellement honte… Mais il me manquait et je savais que tôt ou tard j'allais devoir l'affronter lui aussi. Mais le pire pour le moment c'était ma famille… Je me demandais comment mes parents allaient réagir face à la nouvelle concernant Marissa et sa tromperie, et notre dispute, sans parler d'Emma… Comme s'il n'y avait pas déjà assez de problèmes dans notre famille pour qu'on en rajoute. Un bruit étrange me fit m'arrêter de pleurer. Je relevais la tête de parmi les coussins pour écouter attentivement. Fixant la table basse je pouvais voir mon téléphone vibrer faiblement. Oh et bien apparemment il était toujours en vie. J'hésitais avant de m'en saisir mais je finis par tendre le bras pour l'attraper. L'écran était complètement fissuré et les coins cabossés. Je le déverrouillais pour trouver un texto provenant d'Eden. Il était apparemment devant ma porte et disait avoir besoin de moi. Poussant un long soupir, j'allais taper deux ou trois fois ma tête contre les coussins. "Fait chier!" lâchais-je en colère. Malgré tout, je me plaçais dans une position assise pour sécher mes larmes, j'avais les yeux rougis à force de pleurer et je n'étais vraiment pas en état de recevoir des invités mais Eden c'était un peu comme un frère, je n'avais pas besoin de m'habiller comme une reine, ni de porter dix couches de maquillage devant lui puisqu'il s'en foutait bien de la tête que j'avais et surtout à l'instant présent il devait avoir d'autres chats à fouetter que de connaitre ma tenue du jour. Mais ce n'était pas le problème, j'hésitais à me lever pour aller lui ouvrir parce que même si j'avais pris sa défense hier, il m'avait énormément déçu. Marissa m'avait dit qu'il l'avait frappé après qu'elle lui aie avoué la vérité… Je ne savais quoi penser de ce geste mais forcément ça avait du mal à passer. Qu'il soit en colère c'est une chose, mais qu'il lève la main sur ma soeur, ce n'est pas acceptable! Et pourtant… savoir qu'il était juste dehors ne me laissait pas indifférente. J'avais atrocement besoin d'un câlin, Eden étant l'une des personnes les plus proches de moi, je ne pouvais pas résister plus longtemps à l'envie de retrouver une présence rassurante. Au point où j'en étais, je ne savais même plus si quiconque serait capable de me faire aller mieux. Me dirigeant vers la porte, je ne vérifiais même pas avant de l'ouvrir. Cela faisait une éternité que je n'avais pas ouvert ma maison sans m'inquiéter comme une folle, mais au pire même si c'était mon agresseur qui se trouvait derrière, il n'aurait qu'à me tuer pour de bon cette fois, ça me soulagerait et tout un tas d'autres gens également! Repoussant une mèche de cheveux rebelle sur le haut de ma tête, j'ouvris doucement la porte. Je pensais rester immobile quelques instants avant de le laisser entrer sans dire un mot mais au final en le voyant se tenir devant moi je ne pu m'empêcher de me réfugier dans ses bras sur le champs. Il disait avoir besoin de moi mais il n'avait aucune idée d'à quel point moi aussi j'avais besoin de lui. "J'ai tout gâché" lâchais-je alors que les sanglots commençais déjà à m'étrangler. Je cru le serrer contre moi pendant une éternité, la vérité c'est que je n'avais pas envie de le lâcher, il m'offrait une étreinte rassurante et connue, j'en avais tellement besoin à l'heure actuelle. Nous étions tous les deux dans un sale état et j'ignorais si j'aurais la force de le consoler et pourtant j'espérais que lui saurait trouver les mots pour m'aider à me relever. Finalement, je m'écartais de lui pour rentrer à l'intérieur de chez moi tout en me frottant les yeux. J'avais l'air d'une gamine, déjà que je faisais plus jeune que mon âge à la base, là je devais vraiment ressembler à celle que j'étais au lycée. Je laissais Eden refermer la porte derrière lui, moi j'étais trop épuisée pour le faire. J'allais m'appuyer contre un mur de la pièce, je ne savais pas quoi lui dire, par où commencer, j'ignorais s'il voulait parler ou si je devais le faire. Les yeux dirigés vers le sol, je pensais à Marissa. Ma Marissa. Si seulement elle était là, et si seulement nous ne nous étions jamais engueulé… Elle me manquait déjà terriblement et j'étais à peu près sûr qu'Eden était dans le même état.