NOUS AVONS TOUS UN PASSE, UN PRESENT ET UN FUTUR.
chapitre un, « you know my name, not my story »
Le sable glissant entre mes doigts, l'air iodé et l'eau turquoise, un endroit paradisiaque, c'était la définition parfaite de l'île d'Hawaii. Cet endroit où des millions de personnes souhaitaient y venir en vacances, arpenter les sublimes plages de sable fin, visiter ses monuments si particuliers. Toujours est-il que la personne qui a un jour dit qu'on ne faisait plus attention à la beauté des choses car on la voit tout les jours avait faux. Parce que pour y être née et y avoir toujours vécue, je ne me suis jamais lassée de cette magnifique île. Ces paysages m'ont toujours impressionné et ils le font encore, Hawaii regorge d'une certaine magie, elle hypnotise chaque personne qui pose un pied sur ses terres. Je suis Avera Linnéa Keha Nichols, trois prénoms qui ont chacun une signification. Avera signifie en hawaiien, les dernières lueurs du soleil, ou rayon de soleil, voyez-le comme vous le voulez. Keha signifie la dignité en hawaiien. Et puis Linnéa est un prénom suédois, en rapport avec les origines familiales du coté de ma mère. D'ailleurs quitte à tenir compte de la signification des prénoms, mes parents auraient du m'appeler Vaehina, qui signifie la princesse des eaux, mais bon, ce qui est fait, est fait. Passé l’anecdote des prénoms, il n'y a plus grand chose d'intéressant à connaître sur mon cas. Enfin si, ma sœur jumelle, mais ce n'est pas vraiment moi que ça concerne, disons que ça a … influencé ma vie ? Oui voilà, influencer est le bon terme.

Lani, ma sœur jumelle, née six minutes avant moi. Les gens disent qu'il faut se battre pour entrer dans ce monde, pour mériter sa place, que la vie est un combat permanent, enfin tout est relatif hein ! En dépit de son arrivée la première sur terre, on ne peut pas vraiment dire qu'elle ait hérité de tous les atouts ni même de toute la chance disponible lorsqu'on vient au monde (est-ce qu'on hérite de chance lorsqu'on nait ? Pff probablement pas). Au départ pas de complication majeure, on était deux petits nourrissons adorables à qui tout le monde aimait faire des grimaces pour voir des sourires apparaître ou pour entendre des rires, les moments où on vous tire les joues aussi, vous savez, ces moments bien traumatisants ? On était arrivées à un moment propice dans la vie de nos parents, plutôt bien réputé sur l'île et même aux Etats-Unis, la famille Nichols était connue pour son entreprise qui ne signait des contrats qu'avec des grands noms et notre arrivée avait fait un peu de bruit. Nos parents étaient heureux, avoir des jumelles était le rêve de maman je crois bien, mais s'il y avait une chose qu'ils avaient oublié, c'était que la nuit, lorsqu'un bébé pleure, et bien forcément il réveille l'autre et c'est là descente aux enfers commence progressivement. Non en fait, les nuits, c'était rien, tout à vraiment tourné à l'horreur lorsqu'un cancer a été diagnostiqué à Lani. C'est à partir de la que tout à changé, et pourtant nous n'étions pas très vieilles, bien au contraire.

Les gens ont toujours pensé que vivre dans un monde ou l'argent coule à flot peut régler absolument tous les problèmes et offrir une vie parfaite. Ca peut-être aider, mais en aucun cas ça ne l'apporte, bien au contraire. Je me souviens de cette amie au lycée, sa famille ne roulait pas sur l'or mais était pourtant beaucoup plus proche et unie que la mienne, ils se comprenaient, s'aidaient, s'épaulaient, ils avaient la valeur de l'argent aussi. Et puis quand je rentrais chez moi, j'avais l'impression d'entrer dans un monde opposé. L'intérieur de la villa familiale était digne d'un magazine de décoration d'intérieur, une vue impressionnante donnant sur la plage où les vagues s'échouaient. Des chambres spacieuses et aménagées avec des meubles designs et des derniers accessoires et gadgets technologiques. Au fond, est-ce que l'argent pouvait acheter l'amour ? Certains se donnaient bonne conscience en se disant que oui, mais en réalité, c'est tout bonnement faux, rien ne peut remplacer l'amour dont on a besoin pour grandir et s'épanouir.

chapitre deux, « change the game, don't let the game change you »
Avoir une jumelle, c'est quelque chose de particulier, quoi qu'on en dise ! C'est un peu votre moitié, vous êtes prêt à tout pour elle, la voir heureuse, sourire, rigoler. Et durant toute ma vie, cette attention c'est prouvée. Lani et moi n'étions pas pareilles, on était pas identique comme tout le monde le pense. A partir du moment ou vous êtes le portrait craché de votre sœur, son reflet, les gens pensent que vous fonctionnez et pensez de la même façon alors qu'en fait pas du tout. On est tout ce qu'il y a de plus différentes, peut-être pas opposées non plus mais on se complète à la perfection. Je me souviens encore de ces jours ou on se disait que le sort s'acharnait sur notre famille comme-ci c'était hier, ces souvenirs horribles marqués au fer rouge. On n'était que deux enfants, ne s'attendant pas à l'horrible réalité de la vie, mais Lani fut vite ramenée sur terre, nous entrainant avec elle au passage face à la réalité des choses. Ce cancer avait tout changé, les deux filles qui allaient jouer dans le jardin innocemment sous les yeux protecteurs de leurs parents et qui s'amusait à faire toutes les bêtises possibles et inimaginables du monde étaient bien loin désormais.

FLASHBACK.
J'étais assise sur l'un de ces sièges en fers dans un couloir uniquement peint de blanc, ce blanc digne des hôpitaux, à vous en mettre le cafard, ce milieu qui se veut stérile pour éviter de transmettre les bactéries aux malades. Balançant mes jambes dans le vide,  je ne touchais pas le sol, étant trop petite. Lani était à coté de moi et elle avait l'air inquiète alors que Papa et Maman étaient dans un bureau, juste en face de nous, la porte était fermée. Je savais qu'ils avaient rendez-vous avec le médecin à propos de ma soeur, c'était un cercle vicieux, quoi qu'on fasse, Lani était toujours malade, et on avait peur que ça empire. Je m'ennuyais comme pas possible, il n'y avait rien à faire ici. De toute façon, les hôpitaux, c'est pas connu pour être joyeux. De temps à autre on voyait une infirmière passer en courant, un médecin marcher tranquillement dans le sens inverse. Et puis on a entendu du bruit provenant du bureau, avant de voir la poignée s'abaisser et la porte s'ouvrir. Papa sortait en premier, la mâchoire serrée, le visage fermé, rongé par l'anxiété et maman avait les yeux rouges mais aucune larme ne se laissait percevoir sur son visage, elle avait sans aucun doute pleuré avant et avait séché ses larmes pour rester forte devant nous. Aucune bonne nouvelle à l'horizon, il ne fallait pas être intelligent pour le deviner. Instinctivement je me tournais vers ma soeur qui avait maintenant les yeux embués et la serrais dans mes bras « Tout ira bien, un jour tout ça, ne sera qu'un souvenir. » je voulais la convaincre que ce que je disais était vrai, mais moi aussi par la même occasion, la perdre serait la pire chose qu'il existe au monde. Nos parents et notre frère qui était parti s'acheter quelque chose aux distributeurs se dirigèrent vers nous, cette épreuve s'allongeait mais jamais nous ne lâcherions, Lani méritait plus que quiconque de vivre normalement.
FLASHBACK.

Les gens portaient un regard accusateur sur la maladie de ma sœur, surtout les enfants, critiquant et parlant d'une chose dont ils ne savent rien, ça avait le don de m'énerver. Lani n'avait jamais rien demandé à personne, elle n'avait pas choisi d'être malade, elle qui ne pouvait pas vivre les expériences de son âge durant l'enfance, aller courir au parc avec des amis, se goinfrer de sucreries, faire des sorties scolaires. Elle n'avait pas le droit à tout ça et je détestais que les gens se permettent de parler alors qu'eux n'aurait jamais supporté un dixième de ce qu'elle vivait. Et peut-être trop blessée ou trop faible, elle se démotivait et laissait faire, chose sur laquelle je ne pouvais pas passer,. Alors je prenais sa défense, quitte à finir dans le bureau du directeur parce que j'avais frappé ou insulté un élève, qu'importe, personne ne pouvait se permettre de la toucher ou de la critiquer, tout simplement, parce qu'elle était parfaite. Je voulais qu'elle vive, qu'elle ne cesse de voir que le monde déprimant des chimios et autres cures qui l'affaiblissait de plus en plus, je voulais y croire, je savais qu'elle était bien plus forte que les gens ne pouvaient le penser. Alors j'allais puiser au fond d'elle cette force enfuie, je la poussais à faire des activités dont elle n'avait pas envie, je voulais lui faire découvrir mon monde, celui qui était aussi le sien malgré la maladie.

Lani était la plus fragile de la maison, tous les regards étaient tournés vers elle, sur son état de santé, au point qu'un jour j'ai eu l'impression de ne plus exister. A chaque fois que j'allais demander quelque chose à mes parents, ils me rabâchaient sans cesse à quel point j'étais chanceuse d'être en bonne santé et qu'ils avaient plus importants à faire. J'en suis même venue à ressentir de la jalousie, j'avais l'impression d'être le vilain petit canard de la maison, j'avais beau ramener les meilleures notes possibles, ça ne changeait rien si les docteurs disaient que Lani allait mieux, je pouvais ramener la pire note du monde qu'ils n'y prêtaient pas attention. Je me trouvais égoïste de penser une telle chose, et je ne pouvais pas en vouloir à ma jumelle non plus, elle n'avait rien fait pour que tout se passe comme ça. Alors je ne disais rien, je m'effaçais, il ne me restait plus que cela. Et puis à l'adolescence, Lani fut guérie, les chimios et tout le tintouin avaient enfin servis à quelque chose, c'était comme un renouveau, une nouvelle chance.

chapitre trois, « if you want to do something, Go for it you’ve got nothing to loose »
J'ai cru pendant un moment que tout rentrerait dans l'ordre, que chacun aurait sa place dans la famille, mais de façon équitable vous voyez ? Et bien j'avais faux, trop stupide que j'étais, pourquoi ça aurait changé, depuis mes trois ans tout avait toujours été de cette façon là à la maison, ça n'allait pas changer de sitôt. L'adolescence se réfère toujours au lycée, et ça ne fut pas une exception pour moi. Disons qu'avec Lani on n'est pas passées par la case nouveau qui risquait de se faire maltraiter, non, nous on est arrivée par la grande porte, notre grand frère nous avait déjà préparé le terrain. On nous avait mis dans la case ''populaire'' sans qu'on ait rien fait. Etre sous le feux des projecteurs commençait à devenir habituel, à ma plus grande déception, suite à l'état de santé de ma sœur jumelle adorée, les parents reprenaient les affaires et se re-concentraient sur leur carrières. Ils étaient fier de montrer la famille Nichols dans toute sa splendeur à différentes soirées ou galas, montrant ainsi que tout allait parfaitement. Des soirées ennuyantes où ne trainaient que des adultes frimant sur les voyages qu'ils avaient fait l'été dernier. Des soirées qui ne me ressemblaient tout simplement pas, je ne voyais pas ce que je faisais là, j'avais l'impression de faire parti du décors, comme un meuble, on te pose à un endroit et tu ne fais rien. Ca résumerait bien ma vie. Toujours est-il qu'au début de mon adolescence, je me suis découverte attention non pas une, ni deux mais trois passions, tant qu'à faire... En premier il y avait le surf, habiter à Hawaii sans savoir surfer, c'est un crime et c'est tout bonnement (ou presque) impossible, j'étais même allée à en faire en compétition, ensuite il y avait la guitare, j'avais appris à en faire et maintenant je m'amusais à composer, ça me vidait la tête et puis au lycée j'ai rejoins l'équipe de natation. Contrairement aux idées pré-faites, il n'y a pas que l'équipe de cheerleaders. Enfin bon, je m'occupais, j'essayais de trouver qui j'étais et finalement sans grand résultat.

Lani avait totalement changé, l'adolescente n'avait plus rien à voir avec l'enfant qu'elle avait été. Elle était pleine de vie, elle sortait tout le temps, passait sa vie à rigoler, c'était comme une autre personne, à croire que tout ce que j'avais essayé de lui faire faire lorsqu'elle était petite faisait parti de son quotidien maintenant. Elle allait peut-être même trop loin à mon goût, elle ne prenait plus conscience du danger des choses. Pourtant la voir pleine de vie me rendait heureuse, elle vivait enfin comme tous les jeunes de son âge, elle profitait de la vie à fond. Et le lycée fut aussi un lieu de rencontre plutôt intéressant. Là bas, tout le monde est différent et tout le monde traine par groupe surtout. On va passer des populaires, aux geeks, au intellos. Ca fait stéréotypé mais malheureusement, c'est vrai … Lani et moi, on ne trainait pas avec les mêmes personnes, ce qui nous a d'une part un peu éloignées, avant nous étions les deux inséparables, au lycée, on se faisait des petits sourires et chacune passait son chemin. Elle suivait son groupe d'amis, quitte à mettre sa vie en danger et après le lycée, rien n'avait changé.

J'ai débuté l'université sans vraiment m'y plaire, j'étais pourtant une bonne élève mais j'en avais marre de rester assise sur une chaise devant un prof à noter ce qu'il nous dit, j'avais envie de voir le monde, de vivre d'autres expériences, alors j'ai arrêté les cours à l'université, ce qui a déclenché une crise à la maison. C'était horrible pour mes parents, pourtant je savais très bien qu'avec ou non plus d'années universitaires, ça ne changerait rien à ma vie future dans la profession que je prévoyais. Organisatrice événementielle, par le bouche à oreille et par la popularité de notre famille, j'avais déjà fait mes preuves à quelques soirées, j'étais lancée alors pourquoi en faire tout un cirque ? Me plonger dans ce milieu là me permettait aussi de revoir les trois quarts du temps le seul garçon que j'avais toujours aimé, le coup de foudre de jeunesse qui ne vous décolle pas quoi que vous fassiez.   Et voir la tête des gens qui arrivent sur le lieu de l'évènement, les yeux pleins d'étoiles, scotché par le décors et qui viennent vous féliciter, dans ces moments là, j'avais l'impression d'être reconnue à ma juste valeur, d'être moi tout simplement.

Seulement un soir, Lani a fait débordé le vase, je n'en pouvais plus, elle jouait avec le feu et ça m'énervait, elle ne se rendait pas compte de la chance qu'elle avait de pouvoir encore être en vie, sur cette terre, et au lieu de ça, elle faisait tout et n'importe quoi. Alors j'ai fait mes bagages sans rien dire à personne et au moment ou la maison était vide, j'ai emporté le minimum, pas besoin de plus, mon compte en banque personnel ferait le reste et je réservais un vol vers le continent. Juste avant de quitter cette île pourtant si chère à mes yeux, j'attrapais un bout de papier et écrivais dessus un mot pour Lani, une énième dispute, une limite franchie et c'était fini. « J'ai peut-être fait une erreur en voulant à tout prix te donner le goût de vivre à nouveau, parce que si je ne l'avais pas fait, tu serais peut-être quelqu'un de déprimé ou de renfermé mais ou moins tu prendrais conscience de la chance que tu as de pouvoir revivre normalement sans être obligée de risquer ta vie tout les soirs pour une stupide fête. » Désormais, Huntington Beach me voilà ! Pourquoi Huntington Beach ? Peut-être tout simplement parce que j'y étais allée pour participé à une compétition de surf  et que la ville m'avait plut. Je commence une nouvelle vie là bas et cette fois-ci, c'est la mienne.