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 It's impossible... | Pv: Luka

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MessageSujet: It's impossible... | Pv: Luka   It's impossible... | Pv: Luka EmptyLun 18 Aoû 2014 - 12:15

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Je n’aime pas penser que c’est un soir comme les autres. Ça revient à dire que c’est une soirée banale, normale, ennuyeuse. Chiante si vous voulez le terme familier. Depuis que je suis à Huntington Beach, peu de choses se passent. Le quotidien est devenu répétitif. Mais ce n’est pas pour autant que moi, je ne dois relâcher mon attention. Je n’ai pas le droit à l’erreur. Je n’en ai plus le droit. Se créer une vie, mentir sans s’arrêter, ne pas créer des incohérences. C’est un sport psychologique. J’ai crée Art Hemingway. Personne ne connait Sergei Lolkov. J’sais que je ne pourrais pas ressortir mon vrai moi. Qui je suis vraiment. Je ne peux pas me permettre de faire tomber les masques. Je n’ai plus le droit à ça. Souvent j’me demande ce que j’ai fais pour mériter ça.
C’est une question conne.
J’ai fais énormément de choses, que je ne pourrais pas me pardonner. Énormément de choses que j’aimerais bien oublier. Mais comment puis-je oublier quand je me rappelle pourquoi j’suis en train de mentir à tout le monde, même à mes nouveaux amis. Même à Edward. Ce soir, je ne suis pas allé au casino comme je le fais tout les soirs. Parce que j’ai été convié au Wildjam pour une affaire privée. J’avoue que je serais bien dans le bar du casino à observer les joueurs de poker au loin. Parler avec Jadzia ou Edward. Ce serait moins chiant que de rester assis au Wildjam à attendre mon rendez-vous. Ce n’est pas un rendez-vous galant je vous préviens les jeunes. Ce n’est pas un endroit idéal pour ça. Même si j’aime ce que ça vend et l’ambiance. Je ne peux plus me permettre de commencer les relations à longues durées. C’est trop tard pour ça. Je ne me sens pas capable de mentir tout le temps, sous mon toit. Des fois j’aime avoir des pauses. J’aime devoir dire stop putain de merde. Je n’en peux plus. Bien sûr, j’ne peux pas le dire à haute voix. C’est impossible. Je ne peux pas arrêter ce jeu et je sais que quelque part je suis surveillé. Chaque de mes gestes sont observés et ils n’hésiteront pas à me sauter dessus à la moindre erreur. Je soupire et bois le whisky qu’on m’avait servi. Je suis au fond de la pièce, une place discrète et pratique si on ne veut que personne ne vienne nous déranger. J’attends encore cinq minute et j’vois une personne entrer. J’fais signe de la main et il me voit. Il commande au serveur qui passe un verre et s’assoit en face de moi. Nous commençons à discuter.
J’me demande pourquoi je n’étais pas au casino pour discuter avec lui. Edward ne voulait pas d’ennuis. Hier cette personne était censée de venir nous voir. Mais il était venu bourré et a apporté le trouble dans le casino. Il n’est pas très bien vu de tout le monde, surtout de Jadzia qui n’est au courant de rien. Cet homme était là pour nous fournir les drogues. Normalement c’était Andy qui s’occupe de cette sale besogne mais il est parti on ne sait où. C’est pénible des fois… Alors nous discutons et essayons de passer un accord. Assez discrètement. C’est la première fois que je fais ça et la dernière fois. Après que nous ayons réussi à trouver un terrain d’entente. On était en train de se faire un plan pour demain. Mais je n’ai pas suivi attentivement ce qu’il me disait. Parce que j’viens de voir une personne entrer dans le Wildjam et venir au comptoir. J’ai peut-être une vue qui déconne mais.
C’était lui ?
Ce n’était pas possible. J’écoute mon interlocuteur. Des fois mon regard se porte sur la silhouette, je ne vois que son dos. Je prends mon verre pour boire une gorgée. Je le regarde. L’homme au comptoir tourne la tête et j’ai manqué de m’étrangler dans mon verre. Je reprends mon calme pour rester dans la conversation avec le fournisseur. Mais maintenant c’est devenu difficile parce que j’ai besoin d’être sûr.
Que c’était lui.
Je ne pensais pas qu’il viendrait jusqu’ici. Non. Je ne devrais pas l’aborder, parce que si c’était vraiment lui. Il serait le seul à connaître ma véritable identité. Et s’il en fait une scène devant tout le monde. Ça ne passera pas inaperçu. Je continue de parler avec le fournisseur. Notre discussion se termine et il s’en va. Moi je reste où j’suis et j’observe l’homme qui était au comptoir. Ce dernier s’en va quelques minutes après. Je finis mon verre et paye. Je sors aussi et regarde des deux côtés. De quel côté il est parti ? Je le retrouve. Je marche. J’sais ce qu’il faut faire et je ne devais pas me montrer trop flagrant. La personne peut vite sentir qu’elle est suivie. Je remarque que le temps se fait plus frais que tout à l’heure. Ça commence à se faire presque sombre. Je commence à entendre le bruit de la plage.
C’est là où il va ?
Ça me semble logique. Il n’a jamais vu la mer si je ne me trompe pas. Moi non plus quand j’étais arrivé à Huntington Beach… J’étais captivé et j’aimais l’écouter. Mais avec le temps j’ai fini par m’en lasser et… Était-ce vraiment Luka ? Mon petit-fils ? Ça me semble impossible. Je ne pense pas qu’il arriverait à venir jusqu’ici. Qu’il puisse trouver ma trace. Non… Alors c’est dangereux pour moi de devoir lui parler. Je marche sur le sable et regarde de tout les côtés. Il n’y avait personne sur la plage. Il s’est arrêté au milieu. Les mains dans les poches j’viens le voir. J’ne peux pas reculer maintenant parce que je pense que d’ici là, il a remarqué ma présence. Je prends un accent Russe que je n’ai plus utilisé depuis… Trop longtemps. D’une voix sûre, j’lui demande
« Luka Novikov ? »
Est-ce que je me trompe ? D’une part j’espère que oui, d’une autre j’espère que nous.
Ça me semble totalement impossible à le retrouver ici. Dans Huntington Beach… J’ai du mal. J’ai vraiment du mal…
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MessageSujet: Re: It's impossible... | Pv: Luka   It's impossible... | Pv: Luka EmptySam 23 Aoû 2014 - 21:56

C’était un autre continent. Des milliers et des milliers de kilomètres. Entre le pays où il avait grandi, la ville qu’il avait appris à aimer puis à haïr, se trouvaient des terres à perte de vue, et puis l’océan. Le monde était différent, là où il se tenait aujourd’hui. Il n’avait rien à voir. D’autres couleurs, d’autres odeurs, d’autres accents, d’autres visages et d’autres voix. Autant que Luka était concerné, il avait changé de monde – pour le meilleur et pour le pire. Il avait saisi sa chance de s’en aller, était parti à l’aventure, et dès lors la vie avait pris un autre sens. Ce sens-là, était-il meilleur, était-il pire ? Il ne le savait pas vraiment encore – tout ce qu’il savait, et tout ce qu’il sentait, c’est qu’il était différent.
Et qu’il ne retournerait plus jamais en arrière.
La distance était aussi physique que psychologique ou morale. C’est à dire, presque infranchissable. Il était ce garçon qui avait grandi avec son grand-père et sa mère, dans un monde à part – il était aujourd’hui un homme qui vivait avec un père qui jusque là avait non seulement été un inconnu, mais aussi un mirage. Non, il n’y avait plus de retour en arrière. Son physique n’avait pas vraiment changé, son nom non plus, mais il n’était plus le même. Tout ce en quoi il avait cru avait été bafoué, métamorphosé, changé, et il s’était fait à cette idée tant bien que mal. Le passé était plus révolu pour Luka Novikov qu’il ne l’était pour la plupart des êtres qui peuplaient cette terre, c’était un fait.
Et pourtant…

L’une des premières choses qu’il avait appris en arrivant ici ? Comment commander une vodka dans un anglais correct et intelligible. Probablement que la moitié de sa promotion de droit n’y aurait pas cru, que l’autre moitié se serait imaginé une bonne blague, et que sa mère l’aurait regardé avec une profonde déception dans les yeux. Boire. Il était arrivé sans repères dans ce pays, avait retrouvé son géniteur, avait retrouvé un semblant de famille, mais lui était resté un trou dans le cœur – un trou qui faisait qu’il n’était plus, et ne serait plus jamais, le gentil garçon qu’il avait été à une époque. Ces temps d’insouciance étaient résolus. Il le savait.
Ce jour là, quand il entra dans le Wildjam, il se dirigea droit vers le comptoir et demanda directement au serveur – à moins que ça ne soit le patron ? Il lui semblait avoir vu ce type louche plusieurs fois, et parfois dans des états d’alcoolémie plus avancés qu’une bonne partie de sa clientèle – un verre de sa meilleure vodka. Il buvait seul. Il n’avait pas honte. C’était une façon comme une autre de passer le temps, quand il ne travaillait pas – mal intégré comme il l’était à cette petite ville qui ne lui ressemblait pas. Il avait son petit rituel. Il réceptionnait son verre, faisait doucement rouler le liquide au fond de celui-ci, patiemment, et puis le descendait d’une traite ou deux, savourant la brûlure le long de son œsophage. Les prix ici étaient affolants. La part russe de lui-même s’en offusquait, régulièrement, trop habituée à un pays où cet alcool coulait comme de l’eau – mais elle se taisait vite, parce qu’il faisait ceci en partie pour se rapprocher un peu d’elle. Il ne prêtait jamais grande attention aux gens qui l’entouraient, conscient qu’il y avait à peu près une chance sur un milliard pour que ceux-ci le reconnaissent et viennent entamer une discussion avec lui. Non. Il buvait sa vodka, un rituel comme un autre, et puis il réglait, et, quelques dizaines de minutes à peine après être rentré, quittait le pub comme il y était entré – sans un mot.
Ensuite, il allait à la plage.

Luka avait pour cet endroit toute la fascination d’un enfant qui ne l’a jamais tout à fait connu. Il pouvait y passer des heures, sans rien faire, sans rien dire, sans même s’affoler de perdre ainsi son temps. Il regardait les rouleaux qui s’écrasaient à ses pieds, et c’était comme se retrouver face à un monstre mystique. Le Wildjam, la vodka, la plage – c’était son rituel, et tant pis s’il était absurde pour un gamin de son âge. Il tenait à ces petites habitudes, elles le rattachaient à la vie. C’était un semblant d’existence normale – si l’on considérait qu’une existence normale se résumait à une routine. Rien ne pouvait venir briser ce petit train-train quasi-quotidien. Il était bien rodé. Les habitués avaient pris l’habitude de le voir errer par là, et il y avait bien longtemps qu’ils ne s’en formalisaient plus. Il était le gamin russe. Le fils de St-James, celui qui était venu de nulle part. Un point, c’est tout.
Et pourtant…

Ce jour là, une présence.
Il s’était tendu, presque instinctivement. Il avait dans ce genre de moment l’attitude propre à un gamin qui a passé trop de temps dans la rue, et qui a eu à se battre pour survivre – ni plus, ni moins. Une présence. Il n’avait pas encore regardé derrière lui, peut-être parce qu’il n’en avait pas envie, peut-être parce qu’il ne voulait pas être distrait par un visage si on en venait à être hostile avec lui. Appelez cela de la paranoïa. Il était simplement habitué à ce que le destin se foute ouvertement de sa gueule. Et pourtant… cette fois-ci, il ne s’y attendait pas. Parce que c’est une voix, haute et claire, qui énonça son nom dans le plus parfait accent russe. Il n’y avait guère que son père, ici, pour prononcer ces syllabes ainsi – c’est à dire correctement. Ce n’était pas son père. Ce n’était pas Aleksey. Non.
Mais il connaissait cette voix.
Il tourna enfin la tête. Et alors, il vit rouge.

Un instant à peine et il tenait un col dans son poing – un instant à peine et il avait pesé de tout son poids, de toutes ses forces, étonnantes pour un gamin de son âge et de sa taille, pour renverser l’autre homme dans le sable. Un instant à peine et la candeur naturelle de son visage avait disparu – et laissé la place à une rage, sèche. Sa voix avait retrouvé le russe de sa naissance et de ses origines, quand il énonça, fermement : « NON. »
Et son poing s’abattit sur un visage. Celui de son grand père.
Il ne comprenait même pas ce que l’autre faisait ici. Putain. Non, il ne comprenait pas. « Qu’est-ce que tu fous là ?! » dit-il. Puis à nouveau : « Qu’est-ce que tu fous ici, putain ?! ». Il avait resserré sa prise sur le cou, sur la gorge, maintenant cette dernière contre le sable. « T’as rien à foutre là ! T’en as pas assez fait ?! Disparaît, tu m’entends ?! VA-T-EN ! » Il n’y avait aucune douceur – ce n’étaient pas de belles, de gentilles retrouvailles. C’était la violence, la frustration, la haine de quelqu’un qui a tout perdu – et qui voit le responsable réapparaître dans sa vie. Et il avait une teinte de désespoir dans la voix, quand il répétait, presque d’une façon incantatoire : « T’as pas le droit d’être ici ! T’as pas le droit ! »
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MessageSujet: Re: It's impossible... | Pv: Luka   It's impossible... | Pv: Luka EmptyDim 24 Aoû 2014 - 0:09

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Et cette personne que je croyais avoir reconnu s’est retournée.
Nos regards se croisent. Le silence devient douloureux et mon coeur s’est figé. Je n’ai plus entendu la mer, les vagues. Mon coeur a manqué quelques battements en le voyant là. P’tain, je ne me suis pas attendu à le voir sur la plage.  ‘Fin au bar avant mais ça reste pareil. Je ne suis pas du tout attendu à le revoir un jour. Je pensais ne plus jamais le revoir. Il a reconnu ma voix et mon accent. Je n’ai pas tant perdu la maitrise de cette langue, après tout c’est ma langue natale. J’ne sais pas comment je fais pour rester calme. Je sens moi, que je ne vais pas le rester pour longtemps, que je vais céder dans une colère, le suivre dans sa colère. Cette tension. Cette tension qui monte et les traits de Luka changer. Parce que oui. C’est bien Luka la personne qui se tient devant moi. Ce n’est pas possible. Pourquoi il vient maintenant? Perturber ma - fausse - vie tranquille ? C’est impossible… Je me répète ces mots encore et encore dans ma tête. Je les fais tambouriner et j’essaye de me dire que c’est un rêve, une blague, une illusion dû à mes abusions à l’alcool… Sauf que j’ai pas forcé dessus et j’suis bien debout, devant lui. Je sors mes mains de mes poches quand j’le vois s’approcher rapidement vers moi, la main sur mon col. Je tiens fermement son poignet mais il me plaque contre le sol sablé. Je ne cache pas ma surprise sur mon visage de savoir que je me fais plaquer à terre, par une force que je n’ai jamais soupçonné mon petit-fils en posséder. Je sens l’hostilité et la violence dans ses gestes. J’ne vais pas me laisser faire. Mais sa voix Russe. L’entendre pour la première fois depuis des années, j’suis resté figé un instant. J’aurais dû contre-attaquer mais je me rends compte que c’est mon petit-fils, quelqu’un de ma famille et que si je me laisse emporter dans la violence moi aussi, tout comme lui… Ça va réveiller le vrai Sergei qui est en moi, enfoui dans le plus profond de mon être. Qui va enfin sortir après quelques années. Le Russe qui me revient totalement.
Le poing qu’il me donne. Le poing qu’il vient de me donner. Il vient de réveiller tout ça. La douleur vive vient de me réveiller. Je peux laisser Art Hemingway de côté. Luka n’est pas là pour lui, il ne le connait même pas. Il est là pour le Sergei Novikov que j’ai été. Le grand-père qui l’a abandonné à ses yeux. Je n’ai jamais pensé avoir l’occasion de ressortir ce que j’ai été dans le passé. D’un côté j’aurais voulu le garder dans l’ombre et continuer à mentir. D’un autre, j’ai besoin de me retrouver. Qu’est-ce que je fous là ?! « _ Bordel de merde ?! Qu’est-ce que j’fous là ? C’est à moi de poser cette putain de question ! » Ça y est, ma vulgarité de l’époque revient. C’est le coup de l’émotion ça mais j’vais pas me faire chier avec ces trucs. Tout le monde dit des familiarités et c’est pas la mort d’homme. Je resserre de ma main le poignet de Luka. J’essaye de me relever mais il me maintient au sol. Je n’ai pas beaucoup connu le fils de Vladlena. Mais je le connais suffisamment pour dire qu’il n’est pas violent d’habitude comme il l’est.
Toute cette haine qu’il éprouve. C’est normal. Je ne suis pas surpris. Mais je devrais essayer de garder mon calme, de ne pas perdre le contrôle des choses.
J’ai presque du mal à respirer par le coup des émotions qui se mêlent, qui se forment en un tourbillon. Par ce qu’il m’empêche de respirer. Je n’ai rien à foutre là ? Que j’en ai pas assez fait ? Il pense que j’suis venu à sa recherche ? Il pense que j’suis venu pour lui dire bonjour ? Je n’ai pas le droit d’être ici ? Que je suis venu pour lui apporter des soucis encore ? Merde à la fin ! Si je vis ici c’est pour en fuir !  Ma colère prend le dessus. C’est lui qui est venu dans cette putain de ville ! De ma main libre, je rassemble le sable dans mon poing et le balance dans la figure de Luka, visant les yeux particulièrement. Je profite de la prise à mon col qui est devenue faible pour m’en défaire. Sans contrôler mon coup et mes émotions. Parce qu’il m’avait frappé, je le frappe sur le visage sans vraiment contrôler ma force. Je le fais chuter sur le sable dans mon élan et en utilisant tout mon poids. J’ai attrapé fermement son col à mon tour pour le décoller légèrement du sol et suspend mon poing en l’air. J’ai arrêté mon geste à temps et je l’observe. Je me rends compte ce que j’suis en train de faire. « _ P’tain. »
Je relâche son col et le laisse tomber sur le sol sablé. Je me relève et souffle. Je le laisse allongé au sol. Je rejoins les deux mains sur ma taille et m’éloigne un peu de lui. Je regarde autour de moi, je vérifie s’il y a vraiment personne. Je sais que la plage de Huntington Beach est un endroit le plus fréquenté. Je sens toujours mon coeur battre à un point qu’il veuille sortir de la poitrine. Ça fait mal. Ça fait mal de me retrouver à frapper Luka. Lui aussi il m’a frappé. Et en premier. J’avais oublié dans l’élan de ma colère quand il m’a dit que je n’ai pas le droit d’être ici, que je devrais quitter cet endroit au plus vite. Je cherche mes lunettes que j’ai perdues quand il m’a donné un coup de poing. Je grimace à la douleur: bonjour le bleu demain… Y en aura qui vont se poser des questions. Faites que mes putains de lunettes ne soient pas cassées… J’lui pardonnerais pas. Je me retourne vers lui « _ Je ne peux pas quitter cette ville ! » Ce n’est pas parce que j’ai des amis ici, que je suis populaire. Je n’ai pas le droit de partir d’ici, je suis coincé dans cet endroit. « _ J'espère pour toi que tu ne te retrouves pas dans cette ville par hasard ! Le hasard moi j’y crois pas ! Il y a des villes que je ne peux pas compter et on se retrouve ici ! Tu m’as retrouvé ou quoi ? » Je ne me suis pas rendu compte et je n’ai pas besoin de faire attention que je parle dans le Russe impeccable. La langue que je n’ai pas parlé depuis longtemps… Le Russe qui me fait penser au passé. Je suis en colère aussi, ça fait longtemps que je ne l’ai pas été. Ces sentiments négatifs qui m’envahissent. Je suis en colère qu’on se retrouve comme ça et c’est de ma faute. Je suis conscients que c’est de ma faute et que ce poing je le méritais. Je lui tourne le dos et cherche mes lunettes. Dans le noir ce n’est pas facile et avec ma vue qui est légèrement brouillée. P’tain. Je me retourne encore vers lui pour l’observer, ce qu’il va faire.
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MessageSujet: Re: It's impossible... | Pv: Luka   It's impossible... | Pv: Luka EmptyMar 16 Sep 2014 - 22:30

Avant, il était un enfant. Il n’avait de haine pour personne, de ressentiment pour personne. Il traversait la vie et puis tant pis, rien ne pouvait jamais l’inquiéter – les autres n’avaient pas de prise sur lui. Et puis un jour, quelqu’un avait décidé de détruire intégralement son existence. Il avait tout perdu. Tout. Et de la pire des façons. Sauf que ce « quelqu’un », aujourd’hui, se trouvait juste face à lui. La seule personne pour laquelle il n’éprouvait qu’une colère brute – proche de la répugnance.
Une seconde à peine et l’instinct le plus primaire avait parlé, il avait abattu son poing sur le visage de l’autre homme et ne ressentait ni scrupule, ni regret – juste la haine. De toutes façons, entre eux, c’était œil pour œil et dent pour dent – il le réalisa à l’instant où une poignée pleine de sable fut balancée dans ses yeux, et où il fut contraint de lâcher prise pour mieux se prendre un coup lui aussi. Sonné, il y eut un instant où il ne put plus agir – jusqu’au moment où il sentit la prise sur sa gorge se desserrer, et son corps retomber sur le sable. Il resta une seconde allongé, tentant de reprendre son souffle, les yeux rivés sur le ciel. Il lui fallait du temps. Il avait besoin de temps. Juste un tout petit peu de temps, histoire de comprendre – comprendre ce que l’autre homme faisait ici, comment il avait pu le retrouver, de quel droit il se permettait de souiller son dernier sanctuaire. Il porta une main à son front. Aouch. La douleur, sourde, allait jusque dans son cerveau. Il avait appris à se battre, pourtant – et plus encore il avait appris à se relever. Vivre dans la rue pendant trois ans, ça vous donne au moins cette chance là.
Et puis il se mit à rire. Incontrolablement, un rire terriblement amer, quand il entendit l’autre homme lui répondre enfin. Il ne pouvait pas quitter cette ville ? Quelle nouvelle fabuleuse. Parce qu’ils étaient deux dans cette situation, coincés comme deux fauves dans une cage, qui ne peuvent s’empêcher de se battre l’un contre l’autre. En tous cas, lui, c’était comme s’il ne pouvait s’empêcher d’attaquer – parce qu’il ne pouvait pas s’empêcher de haïr. « Parce que tu crois que j’avais envie de te retrouver ? » dit-il, dans son russe impeccable. « Parce que tu crois que j’avais envie de te revoir ? J’avais envie de te tuer, au début. Mais j’ai dépassé ça. Parce que tu me dégoûtes. Simplement. » Il rit à nouveau, se redressant dans le sable. Assis. Il réalisait qu’il y avait quelque chose de profondément absurde à parler russe dans cette ville – surtout si souvent, entre son père et son grand-père. Réunion de famille inopinée de l’autre côté du monde ? Quoique. Il ne considérait ni l’un, ni l’autre, comme réellement des membres de sa famille. Et à bien y penser même Aleksey était plus proche de la description que cet homme là. « Je peux pas partir non plus », finit-il par dire, quand il parvint enfin à ne plus rire. A la place, il avait recommencé à lutter pour que son souffle reprenne un rythme normal – et planté ses yeux dans ceux de l’autre homme, comme s’il le défiait farouchement. « Et je suis ici parce que j’ai retrouvé mon père. » Il avait ajouté ces quelques mots sèchement. Parce que Sergei pouvait comprendre l’absurde de la situation. « C’est fou, hein ? Qu’un type qui m’ait jamais connu, qui ait jamais été au courant de mon existence, soit le seul à se soucier de mon existence. » Un temps. Un rire. Léger. Il pencha légèrement la tête, joignant ses jambes pour tranquillement s’installer en tailleur. Il avait un air… étrange. Narquois. Que Sergei ne lui connaissait probablement pas. Un air que lui-même ne se connaissait pas, à vrai dire – parce qu’il n’avait jamais autant haï une personne qu’il ne haïssait la personne juste en face de lui. « Qu’est-ce qu’il y a ? T’es déçu ? Tu pensais que j’étais mort, que t’étais débarrassé de moi ? » Un temps. « Et d’ailleurs pourquoi t’es ici ? Tu te planques parce qu’ils te cherchent encore ? C’était pas assez pour eux, tuer ma mère, il faut qu’ils t’aient aussi pour tout le fric que tu leur as volé ? » Un énième léger rire. Il se redressa un peu, peut-être pour se donner plus de stature, ou peut-être pour lui donner à voir l’homme qu’il était devenu – un adolescent sur le tard, fatigué par les trois dernières années de sa vie, fatigué par toute la violence dont il avait bien pu être témoin. « S’ils te retrouvent, tu vas leur dire que je suis là aussi histoire de finir le boulot ? »
Il ne pensait pas en dire autant. Il ne pensait pas avoir tant de choses sur le cœur, à lui cracher enfin au visage – tant de colère. Lui-même était stupéfait de sa propre attitude. Mais l’homme en face de lui, il avait détruit sa vie. Il était le seul à avoir les réponses à ses questions, les réponses au genre de « pourquoi » qui font l’essence même d’une existence. Alors oui, il était en colère. Et oui, il ne pouvait s’empêcher de parler. Parce que cet homme, en face de lui, était son grand-père – et il avait le sang de sa mère sur les mains.
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MessageSujet: Re: It's impossible... | Pv: Luka   It's impossible... | Pv: Luka EmptyMer 17 Sep 2014 - 22:00

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P’tain. C’est quoi ce bordel vraiment ?
J’pensais vraiment pas le retrouver à Huntington Beach. Non pas après ces années de recherches, en vain. Je ne pensais pas le retrouver au Wildjam. À la plage. Je ne pensais pas le retrouver ici. C’est impossible. Je ne pensais pas qu’on serait là à disc.. Se disputer, se hurler dessus. C’est la première fois que je me dispute avec lui. C’est la première fois que je le vois autant si violent. Vladlena est partie, Luka qui a toujours grandi à ses côtés, qui a toujours été là pour veiller sur lui, elle est partie et c’est de ma faute. Je suis bien conscient et je ne passe pas une seule journée sans penser à elle. « _ Je ne te crois même pas capable. Ça m’aurait carrément surpris. » fais-je avec un sourire ironique. S'il m'aurait retrouvé, les Russes qui me cherchent m'auraient déjà retrouvé depuis longtemps. Je secoue la tête. Je soupire quand j’entends le mot “tuer“ Oh il voulait me tuer à un moment. Quel dommage. À son rire, je réponds. « _ Oh c’est parti pour un petit tour. Le petit garçon égaré devenu un adulte - enfin il était temps - avait l’idée de vouloir me tuer. » J’exagère légèrement sur le ton de ma voix. Je retrouve mes lunettes, je m’accroupis pour les ramasser et les observer. « _ De toute façon, t’en aurais pas été capable. » Ouais, je sais que trois ans auraient été suffisants pour changer Luka sur la façon de voir les choses. Il se serait bien entrainé pour tuer afin de survivre même si cette idée me dérange beaucoup: je ne le vois pas tuer une personne Luka. Moi aussi je me suis entrainé pour survivre, je suis mieux entrainé que lui et j’vis encore. Je suis qu’une mauvaise plante qui persiste à rester malgré tout. Qu’on essaye de m’arracher, je resterais toujours là. Qu’on essaye de me tuer, je m’en sortirais toujours. S’il avait essayé de me tuer sans me dévoiler son identité, je l’aurais tué par réflexe. Les idées noires c’est souvent ma spécialité, ‘fin surtout en ce moment-là. Je ne ferais jamais ça, les membres de famille c’est sacré même si l’amour venant d’eux n’est pas réciproque. J’apprends qu’il ne peut pas partir lui non plus « _ Tu peux pas partir non plus. Oh mais c’est merveilleux… » fais-je dans un soupir agacé dans la plus grande ironie totale.  Me retournant vers lui, me retrouvant face à face. Les lunettes à la main « _ Et pourquoi donc ? » fais-je le désignant du menton. Ce serait bien fâcheux parce qu’il compromettrait totalement ma couverture. Totalement et en plus de me faire tuer par les Russes qui me recherchent, j’me ferais tuer par les gens du Casino. En général personne n’agit bien quand ils apprennent qu’on leur a menti pendant longtemps. Je remets mes lunettes après avoir vérifié qu’elles ne sont pas cassées. Je vois mieux là et j’apprends la nouvelle. Je reste un instant silencieux et je laisse échapper un rire. Un rire ouais. « _ Aleksey ? » finis-je par dire après avoir exagérément quelques secondes, pas possible. Je secoue la tête, avec un air de ne pas le croire du tout. Cet homme que j’avais jadis cherché dans le passé pour le mettre au courant de la situation, de la merde où il venait de mettre Vladlena. Et en conséquent moi. Je ne l’ai jamais retrouvé et c’est Luka qui le retrouve ? Ah décidément, les fils retrouvent toujours les pères. Pas les pères qui retrouvent les hommes qui ont couché une soirée avec leur fille en les mettant enceinte. J’ai utilisé tout les moyens que j’avais à l’époque pour retrouver cet homme et apparemment il ne venait jamais en Russie ou rarement. J’connais sa description physique que Vladlena m’a donné et son prénom. Le prénom que Luka portait en second. S’il se retrouve dans cette ville, s’il est la raison qui empêche Luka de partir. Je n’aurais pas de mal à le retrouver alors, j’ai mon mot à lui dire et quelques explications à lui faire. Je devrais tenir vigueur de ce qu’il vient de me dire mais je comprends que ça ne sert à rien. C’est la colère qui parle, la colère qu’il a intériorisé pendant trois ans. Longues années pour lui. Et pour moi qui vivait dans les questions, toujours à me demander comment il va. Le temps qu’Aleksey ne sache pas qu’il avait un fils, je me suis soucié de son état. Mais je n’étais pas là pour le montrer, ni pour les dire. « _ Tu devrais arrêter de dire des conneries. Il n’a pas été le seul. »
Silence.
J’entends les vagues de loin, elles m’apaisent en temps normal. Mais elles ne servent à rien dans cette situation là, je reste silencieux, j’essaye de faire le point de cette situation. De comprendre. De me reprendre. Je regarde Luka qui est assis, avec un air que je n’ai pas vu depuis.. je n’ai jamais vu cet air. Aleksey son père est ici, il vit ici depuis combien de temps ? Est-ce qu’il est mon voisin ? Non ce n’est pas possible, je connais mes voisins et il n’y en a pas un qui s’appelle Aleksey. Quand même je n’en reviens pas, il est ici depuis tout ce temps. Je l’ai croisé sûrement… P’tain. Je regarde Luka, pour la première fois depuis trois ans. Nos retrouvailles sont violentes, normal… Je mets mes mains sur mes hanches, soupire quand il reprend la parole. Je secoue la tête, levant la main pour faire un geste complètement vague lui disant d’arrêter là. Je le laisse parler, ça ne sert à rien de lui répondre. Ces mots me font rappeler la situation dans laquelle j’ai laissé Luka, quand je l’ai loupé. Une parcelle de seconde, le moment où je me suis retourné pour vérifier le train de Vladlena, quand Luka est passé devant moi, le dos tourné. Prêt à prendre le train pour retourner chez lui. « _ Deviens pas con. » retour à la réalité, la réponse directe quand il me pose la dernière question.
J’essaye de rester calme, je ne devrais pas péter les câbles. Je ne devrais pas m’énerver. Luka a le droit aux explications, il a le droit aux réponses. Les réponses, il ne les avait pas eu depuis trois ans. Ces réponses que je vais lui donner, ne feront pas revenir Vladlena. J’ai et j’aurai toujours du sang sur mes mains. Tout comme j’ai du sang pour d’autres gens. Je les ai tué en tant que quelqu’un assoiffé par la vengeance. Dont certains par accident. J’ai trop de sang sur mes mains. Trop de sang qui y coule… « _ Nous étions censé de se retrouver dans la gare, j’étais censé de te retrouver et te prendre avant que tu montes le train pour rentrer. On était censé de prendre le train avec ton oncle pour quitter vite fait la Russie. Ta mère était censée de nous retrouver à la gare. Elle n’est jamais arrivée et je n’ai pas su pourquoi elle n’a pas suivi mes indications à la lettre. Et il a fallu que ça soit le moment où j’ai tourné le dos vers l’autre direction quand tu es passé pour monter dans le train. » fais-je calmement. Je mets ma main sur mon front et le masse avant de reprendre, marchant un peu. Tournant un peu en rond. « _ J’ai dénoncé la Famille où je me trouvais aux autorités locales, ils les ont arrêtés. Mais l’un d’entre eux a pu passer le message à un groupe qui s’est occupé de Vladlena. Le temps qu’ils devraient arriver, elle serait déjà partie. Je ne rejette en aucun cas la faute sur elle. Je ne me permets pas. L’idée que je t’ai raté et que tu es allé là-bas. » Je montre du doigt ce qui devrait être la direction de notre ancienne ville, le doigt vers l’horizon de la mer. « _ Ça m’a rendu fou. Ça peut te surprendre, mais.. Je n’ai pas cessé de te chercher par tout les moyens possibles bien que je n’étais plus en Russie. Mais j’avais des relations et ils m’ont aidé à te chercher. Mais voilà… » je secoue la tête complètement exaspéré. Montrant mes mains comme si je me suis bien retrouvé désemparé, parce que je l’étais à cette époque. « _ Tu as disparu de la circulation. Je me suis dis que tu as dû changer d’identité ayant compris le danger. Je ne t’ai jamais cru mort. Pas une seule fois. Alors si tu répètes encore une fois que je suis déçu que tu sois encore vivant..» J'arrête la phrase. Une pause. J’écoute les vagues… « _ Mais je n’ai pas cessé de te chercher. Prenant moi-même les risques. Je me retrouvais en Autriche. À force de te chercher sans résultat, ils m’ont retrouvé, j’ai réussi à m’en échapper encore. J’ai encore tué malgré moi des innocents.. » une pause.  Je réprime ma légère grimace quand les souvenirs de Vienne reviennent à la surface. « _ Je me suis fais aidé et je me suis retrouvé dans cette ville, maintenant depuis deux ans. À jouer la personne que je ne suis pas. » Je détourne le regard de Luka et finit par regarder les vagues. « _ Au fond je suis déjà puni de ce que j’ai fais dans le passé. Tu crois me connaitre Luka, mais il n’en est rien. Je n’ai jamais pris le temps de te connaitre davantage. Je n’ai jamais été souvent là quand il le fallait. Mais je sais que tu as changé et que tu as ta façon de voir les choses: je suis l’assassin de ta mère. Ce n’est pas la peine de me le rappeler, je le sais très bien et je ne passe pas une journée sans y penser. » Un temps de pause je cherche dans mes poches pour sortir un paquet, je prends la cigarette qui reste et me mets à l’allumer avant de ranger le tout dans la poche. Je prends une bouffée et y expire quelque secondes après. « _ C’est pas une histoire concernant que du fric. Je me planque dans cette ville en attendant qu’ils me retrouvent - parce que je sais au fond qu’ils finiront par me retrouver - et jamais je ne dirais que tu es là. Tu devrais profiter de vivre ta vie. »
Luka ne m’a jamais entendu autant parlé. Je n’ai jamais tenu une conversation bien plus longtemps avec lui. Je n’ai jamais été là pour lui assez longtemps. J’ai été un fantôme pendant un temps. Un fantôme qui a tué sa mère, la personne qu’il chérissait le plus au monde. Rien que le voir maintenant ça me rassure. Il a retrouvé son père, il va se trouver une femme qu’il aime, il va vivre sa vie loin de tout ça. Loin de moi. Même si… On est tous les deux plus ou moins bloqué dans cette putain de ville. Comme des animaux en cage. Mais s’il continue vraiment à me juger comme s’il me connait très bien, je ne lui permettrai pas de faire ceci. Il ne sait presque rien de moi. Je ne sais pas ce que Vladlena a dû lui raconter mais elle a dû en cacher pas mal de choses. Je continue de fumer ma cigarette, je ne sais pas si lui dire tout ceci m’aide à aller mieux. Mieux que les lettres.
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MessageSujet: Re: It's impossible... | Pv: Luka   It's impossible... | Pv: Luka EmptyMer 1 Oct 2014 - 7:26

C’est étrange, la coexistence d’une envie violente de s’enfuir et de la certitude que l’on n’a plus aucun endroit où aller. Huntington Beach était son ultime refuge – une chance si folle que l’on ne peut espérer en rencontrer une seconde du même acabit au cours d’une seule existence. Voilà que ce refuge était détruit, intégralement détruit par la présence de la seule personne en cet univers pour qui il éprouvait une haine brute et totale – mais qu’aucun autre lieu ne lui venait à l’idée, pour s’enfuir. Il ne parvenait toujours pas à considérer Aleksey comme son père, mais le fait était qu’il était la seule personne qui lui restait – la seule à savoir qu’il était encore bien vivant, la seule personne à se soucier de lui, et la seule personne qui ne l’avait jamais consciemment trahi. C’était fou, en arriver à considérer le père absent comme le seul être à qui l’on soit encore lié, et pourtant… il ne pouvait pas s’enfuir, parce que Aleksey existait. Et ce malgré le retour de Sergei. L’homme détesté. L’homme qui avait ruiné sa vie. Il n’avait pas réellement pardonné à Aleksey, mais au moins il avait accepté sa présence – probablement qu’il emporterait son ressentiment pour son grand-père dans la tombe.
Alors il rit. Il eut un nouvel éclat de rire, un peu fou, quand l’autre homme lui dit qu’il s’était soucié de son existence. Effectivement. Belle façon de faire. S’enfuir, le laisser pour mort, sublime façon de faire. Peut-être bien qu’il s’était soucié de son existence – mais seulement dans le sens où il s’était soucié de sa mort, l’espérant secrètement pour régler sa dette de sang. La chose ne serait peut-être pas hilarante pour le commun des mortels, mais lui il se trouvait l’ironie de la situation spécialement mordante, proprement exquise. Et puis, à nouveau, il se renfrogna. Les dents serrées, il regardait droit devant lui. La présence à ses côtés, elle était presque intolérable. Chacun de ses nerfs était à vif, il était sur le point d’imploser, ou alors peut-être de s’écrouler nerveusement. Les explications de Sergei, on-ne-peut plus bancales, ne firent qu’ajouter à cet état de nerf. Il posa un regard sur ses mains, réalisa qu’elles tremblaient. Il avait envie de hurler. Une part de lui, aussi, avait envie de pleurer – mais ce côté là il était parvenu à le faire taire il y avait des années de cela. La haine avait à cet instant pris la forme d’une boule brûlante au fond de sa gorge, d’une sorte d’amertume qui ressortit dans sa réponse quand enfin l’autre homme cessa de déblatérer ses mensonges : « T’as eu tout le temps du monde, hein. Pour te peaufiner une petite histoire, juste au cas où. » Un nouveau rire, léger, mais toujours glacé. « Tu te faisais chier, un soir, et tu t’es dit « tiens ! inventons une petite histoire au cas où quelqu’un comprendrait un jour que j’ai laissé tuer ma fille et mon petit fils, et viendrait me demander des comptes. », ou alors tu t’es dit que puisqu’on avait jamais retrouvé mon cadavre tu allais prévoir le coup. Comme ça. » Un silence, il secoua légèrement la tête, avant de répéter: « Juste au cas où. » Juste au cas où il le retrouvait. Et tentait de le tuer. Parce que pendant plusieurs années, ç’avait été une idée fixe. Il n’en dormait plus la nuit, bouffé par l’envie de se venger, de faire quoi que ce soit pour que la mort de sa mère ne reste pas impunie. Il avait échoué. Même là, alors qu’ils se retrouvaient enfin, il avait échoué. Il sent une odeur parvenir jusqu’à son nez, celle de la cigarette. Il avait envie de fumer, lui aussi. Il ne demanda rien à Sergei. Pas à cause d’une espèce de pudeur qui veut que l’on n’empreinte jamais, ô grand jamais ce genre de chose à l’homme qui nous a élevé – plutôt parce qu’il n’aurait jamais pu supporter de lui devoir quoi que ce soit, même une chose aussi minime. « T’en as jamais rien eu à faire. J’ai jamais été stupide. Tu en as voulu à ma mère pour Aleksey… et tu m’en as voulu à moi d’exister. Tu as poussé le numéro du père déçu jusqu’au bout. On a jamais été une famille. » Il haussa brièvement les épaules. Il avait passé des années dans cette pensée que beaucoup aurait trouvé cruelle, ou ignoble – le seul amour familial qui lui ait été offert venait de sa mère. Elle avait joué tous les rôles. Tout donné pour qu’il soit heureux. Lui, il lui avait répondu de la seule manière possible – en lui donnant tout l’amour dont il était capable, au point d’être piégé dans un interminable deuil. « Essaye pas de me faire croire à cette connerie. T’en as eu assez. T’as pensé à toi-même. Le reste ? Bon débarra. » Sa mâchoire s’était douloureusement crispée, c’était entre des dents serrées qu’il prononça quelques derniers mots. Son regard était toujours obstinément fixé sur l’océan. Huntington Beach. Non, il n’abandonnerait pas ce relatif calme, à défaut du bonheur, qu’il parvenait peu à peu à atteindre ici. « Tu m’as raté sur le quai de la gare ? Tu as essayé de prévenir ma mère, mais elle n’est simplement pas venue ? Tu as vendu tes petits copains ? Sérieusement ? Tu as cru que je pourrais croire à ces conneries ? » Un dernier rire. Pendant une seconde, ses yeux se posèrent sur le visage de son grand-père – l’un de ses rares repères, par le passé. « Tu as raison. J’ai ma façon de voire la chose. Tu es l’assassin de ma mère. Et je sais que j’ai raison. Sauf que tu es aussi un lâche, qui l’a faite tuer en s’enfuyant tranquillement. Tu… me dégoûtes. » Son poing s’était serré. « Ouais. Tu me dégoûtes. Et tu n’as simplement… pas le droit d’être ici. »
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MessageSujet: Re: It's impossible... | Pv: Luka   It's impossible... | Pv: Luka EmptyJeu 23 Oct 2014 - 21:31

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« _ Juste au cas où ? » Je hoche légèrement la tête, je laisse échapper un petit rire. Que cette phrase est drôle. La cigarette coincée entre mes doigts, je la mets rapidement à mes lèvres pour tirer. Il prenait comme ça. C’est la haine qui parle. Oui. C’est la haine qui parle, sa colère. Je comprends ce qu’il peut ressentir, parce que j’ai presque vécu la même situation. Mais Luka est vraiment paumé et se trompe lourdement de cible. Et ça, ça va être délicat à le lui faire comprendre. Je laisse échapper la fumée « _ Tu es devenu bien plus con que je ne l’aurais cru. Ta haine te rend moins intelligent. T’as l’impression de tout comprendre, de tout savoir de moi… Mais il n’en est rien. En réalité, ça t’empêche de voir les choses correctement. » soupire-je. Et je sais de quoi je parle. J’ai vécu dans la haine. J’ai été nourri pendant la moitié de ma vie par la haine. Et elle s’est éteinte quand j’ai enfin accompli ma vengeance. J’ai vraiment passé ma vie consacré à ça. À détruire, encore et encore sans pour autant penser à construire. Vladlena, Luka. Ils étaient ce que j’avais construit malgré moi. Je ne peux pas cacher que j’ai jamais voulu l’existence de Vladlena, ni celui de Luka. S’ils n’avaient pas été là, je n’aurais pas été allé trahir la Famille Dmitriev. Peut-être que je serais mort à l’heure où il est. Si Luka n’avait pas existé, je n’aurais pas été repéré par d’autres Russes quand j’étais à Vienne. En bref, s’ils n’avaient pas existé, je n’aurais jamais été Art Hemingway. « _ Oh mais tu vas me la fermer là ? T’vas pas commencer à me faire ton caliméro… J’ai perdu ma mère parce que mon grand père est un lâche, qui nous a abandonné en partant avec de l’argent. Que c’est nous qui en retirons les bénéfices alors que nous respirions la joie de vivre, que nous avions rien fait. » Je m’énerve un peu en ironisant sur la version de Luka, je devrais me calmer un peu. Mais comment faire quand on parle a un mur devant soi au lieu du petit fils ? Je continue de fumer. Que j’en ai jamais rien eu à faire de ma famille, je n’ai pas eu le choix de montrer comment je me comporte avec eux aux yeux de tous. Pour que mes ennemis ne pensent pas directement à eux pour essayer de m’atteindre. Je leur ai clairement bien fait comprendre que s’ils pouvaient essayer de les atteindre, ça ne me fera rien. Mais personne n’a jamais osé, parce qu’ils connaissaient déjà ma réputation. Je rompt le silence, le bruit des vagues qui couvrent légèrement ma voix. « _ Oui. J’en ai voulu à ta mère pour Aleksey parce qu’elle n’a pas fait comme il fallait. Se marier, partir avec un homme, s’éloigner de moi. Ce qu’elle a fait, c’est de rester à mes côtés et te mettre au monde pour me mettre dans une situation encore plus merdique qu’elle l’a fait. Elle était quand même consciente que vivre à mes côtés, ce n’est pas bon pour elle. Je le lui ai dis mais elle est restée. Tu ne m’as jamais davantage connu et ne parle pas comme si tu me connais. Tu n’as jamais su pourquoi je fais tout ça. » Et j’ai l’impression que ça tourne en un cycle qui ne s’arrêtera jamais. J’ai ressenti de la haine pendant des années, cette haine qui m’animait. Qui était la seule raison pour vivre. J’ai repoussé toutes les mains qu’on m’avait tendue. Je ne me rendais pas compte du mal que j’ai fais. Non. J’ai été un petit con impulsif qui se marrait de voir comment les gens crevaient - car ils mourraient différemment on le sait tous ça… « _ Mais je suis d’accord avec toi. On n’a jamais été une famille. Un grand-père absent qui est dans une Famille Mafieuse. Une mère qui respire la joie de vivre et qui pensait qu’elle était en sécurité en restant à mes côtés. Le père que je n’ai jamais vu qui est venu dans la ville et a couché avec la fille avant de repartir. Qui est parti sans jamais revenir en laissant un fils innocent qui ne connaissait absolument à rien de ce que c’est la vie dure. » Je finis la cigarette et la jette d’une pichenette dans le sable de la plage. Je détériore l’environnement ? Pas mon problème, quand la planète ira mal. Je ne serais plus là. Puis j’ne suis pas le seul à faire ça.
Je laisse échapper une petite moue pour l’inciter à continuer. J’ai pensé à moi, que je ne devrais pas essayer de lui faire croire à cette connerie. Il a encore quelque chose à dire. Je l’encourage à continuer. Je relève la tête quand il réagit à mon histoire. Pour lui, tout est tiré par les cheveux. Rien n’est vrai. Dans l’état actuel des choses, il ne me croira pas du tout. Je ne réponds pas, je reste silencieux. Par contre la suite me plait moins. Je sens la tension monter. Elle ne s’améliore pas du tout. C’est en essayant de rester calme. Le calme que je m’impressionne posséder et que je ne pense pas le contenir longtemps. Je me pince les lèvres et de prendre une inspiration pour terminer dans un soupir. Je sors à nouveau le paquet de cigarette et le briquet qui va avec. Je commence à fumer tranquillement et je commence à parler d’une voix assurée, toujours en Russe depuis tout le début. « _ Malheureusement, tu n’es pas le maitre de cette ville. Tu ne peux pas décider qui a le droit d’être ici ou qui n’en a pas le droit. Tu ne vas absolument rien changer et je ne repartirais pas d’ici. Alors arrête de te focaliser que je n’ai pas le droit d’être ici. Tu n’y changeras pas grand chose. » Une pause de quelques secondes le temps que je tire. Je hausse les sourcils et montre la main « _ À moins que tu n’ai une idée de comment me faire dégager d’ici ? Parce que bonne chance pour ça. Si j’avais eu l’occasion de me barrer, crois-moi je l’aurais fais depuis longtemps. » Rester dans cette même ville où rien ne se passait. Où ma surveillance est serrée, qui aurait rêvé d’y rester en tant que témoin protégé ? « _ Tu sais que tu as raison. Je sais que je dis la vérité. » Je fume encore et reprends « _ J’ai tué ta mère à cause de mon imprudence. Je ne nie pas ce que j’ai fais. Mais elle savait ce qu’elle avait à faire. Si tu n’avais jamais été au courant de rien, c’était la volonté de ta mère. » Je coince la cigarette entre les doigts et le désigne « _ Par contre, je t’interdis de me juger sans pour autant me connaître. » Et tu ne voudras pas me connaître.
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