« Tu l’as pousse ta voiture ou tu veux un coup de main ? » Un coup de klaxon, un soupire et cette file de voiture qui semblait ne jamais s’arrêter. C’était officiel Noah était maudit ! Il avait rendez-vous avec Neela et leur fille, seuls tous les trois et cette rencontre lui faisait énormément plaisir mais ça le stressait également. Neela le stressait. Noah n’était pas quelqu’un de nature stressé, il était un avocat et le stress n’avait pas de place dans ce milieu. Il avait toujours été confiant, sûr de lui et personne ne pouvait le mettre en difficulté. Personne sauf la femme qu’il avait aimé et avec qui il avait eu un enfant, une petite fille adorable. Leur fille. L’amour qui unissait Neela et Noah était mort, pas parce qu’ils ne s’aimaient plus à cause du temps ou autre bêtise du genre, mais parce que Noah avait fait du mal à la jeune femme, commettant l’erreur de lui faire perdre toute confiance. La confiance, c’était la clé d’un couple, malheureusement l’avocat l’avait perdu et franchement la confiance ça ne s’achète pas ! Même si la situation était difficile, même si voir Neela lui faisait du mal parce que dans ses yeux il voyait de la haine ni plus ni moins, il n’était plus rien à ses yeux et elle avait une vision de ce dernier qui était la pire de toute. Difficile à croire qu’un jour il y avait eu de l’amour entre eux. Noah aimerait toujours la jeune femme, il ne pouvait pas renier cet amour, leur histoire et il avançait, parce qu’il le devait, il ne pouvait pas croire à un potentiel retour de leur couple. C’était terminé et pour avancer, il avait dû se faire à l’idée que Neela était à présent son ex petite amie, la mère de sa fille. Tout simplement. Pour le bien de Maya ils devaient trouver un terrain d’entente. Noah était prêt, respecter ce qu’on lui demandait et attendait sagement d’avoir sa fille avec lui, en tête à tête. Neela de son côté ne semblait pas du tout prête à une telle chose, il devait attendre, il le faisait, difficilement mais il le faisait, parce qu’il s’agissait de sa fille. « Vous plaisantez ? J’ai juste eu la bonne idée de doubler pour sortir de cet embouteillage ! Pour doubler il faut forcement forcé un peu ! » L’agent de police continuait de remplir l’amende que venait de prendre Noah, il avait profité de l’arrivé d’une ambulance pour se frayer un chemin et malheureusement avait été arrêté au bout de la ligne par cet agent. Noah observait l’heure commençant à perdre patience, mais voyant la tête peu aimable de l’homme il prit sur lui, se saisissant à la fin de l’amende avant de repartir direction le centre-ville. A croire que tout le monde voulait que Neela lui en veuille, à commencer par ce couple de retraité qui avait causé un accident, puis les automobilistes qui au lieu d’avancer s’arrêter pour regarder l’accident et maintenant le policier qui lui mettait une amende. Noah n’était franchement pas aidé !

Une fois la voiture garé, il partit en courant un sac à la main en direction du café que lui avait indiqué la jeune femme. Une fois prêt du café, il reprit une marche plus normale, passant une main dans ses cheveux avant de remettre sa chemise comme il faut. Il passa la porte du café, saluant la gérante avant d’apercevoir Neela et la poussette. A cette vision un sourire se dessina sur son visage, il sentit son cœur s’emballait. Il était tellement heureux d’être papa d’une petite fille, même si la situation n’était pas géniale il ne voudrait pas échanger ce qu’il ressentait le moins du monde. Il s’avança vers la jeune femme et à peine arrivé elle pointa son retard, bon ça commençait bien même pas un bonjour. Il avala difficilement sa salive. « En effet… il y avait un accident sur le chemin, je suis désolé. » Il n’y était franchement pour rien mais il préférait s’excuser avant d’entendre une autre remarque. Il posa son regard sur Maya, ses yeux semblaient pétiller à la vue de cette adorable petite bouille. « Coucou ma puce. » Il sentit ses mains avancer vers sa fille, prêt à l’attraper pour la serrer dans ses bras mais il se recula aussitôt, ne sachant jamais vraiment ce qu’il avait le droit de faire ou non. C’était tellement compliqué, il se sentait jugeait à chaque pas. Il tira une chaise prenant place se rendant compte qu’il tenait toujours le sac dans ses mains, il le tendit à Neela prenant la parole en même temps. « C’est deux petites tenues pour Maya… et un jeu d’éveil. » Il retira sa veste la posant sur le dossier de la veste, sentant soudainement la chaleur l’envahir, le stress toujours et encore !

« Je m’excuse d’être en retard, tout simplement. » Génial, ça commençait bien. Si ses paroles et gestes étaient interprétés un par un ça allait être drôle. Il préférait se concentrer sur Maya, c’était pour elle qu’il était là, c’était pour elle qui prenait les remarques de Neela sans prendre la mouche. De toute façon il n’avait rien à dire, c’était ainsi quand on faisait du mal aux gens et que l’on essayait de se faire pardonner, on devait se taire, agir et attendre. Noah n’était pas à l’aise, il n’avait plus sa place aux côtés de la jolie Indienne et il était comme un adolescent qui ne savait jamais où se mettre. Il se sentait mal à l’aise. C’était sa fille mais il ne pouvait pas agir librement, il aurait aimé la prendre dans ses bras sans devoir demander ou attendre une quelconque approbation mais Noah comprenait. Même si il n’aimait pas cette situation il comprenait le comportement de Neela, il lui avait fait du mal beaucoup trop de mal pour qu’elle l’autorise à refaire surface avec un grand sourire et un pardon. Il observa sa fille alors que la maman de cette dernière lui parlait de ce qu’il venait d’acheter, il sourit, naturellement sans vraiment le remarquer, mais c’était bien ça le plus magique avec les enfants. En un regard ils pouvaient vous faire sourire, même quand vous n’en aviez pas la force. Il releva la tête vers son ex petite amie « Bonne idée… merci. » Ce que lui proposait Neela lui plaisait bien, il avait même l’impression que ça allait mieux, à vrai dire même la chose la plus infime soit elle positive il serait content.

Il observa sa fille et Neela ensemble, il était heureux, même si il n’aurait jamais une telle chose surtout pas que ça se passe ainsi il était heureux. Il était père d’une petite fille et cela le comblait. Il savait que Neela était une bonne mère, c’était une femme exemplaire, une amie dévouée alors en tant que mère elle serait parfaite il n’en doutait pas. Il ne savait pas comment évoluerait leur relation, il espérait un jour qu’ils seraient comme ces couples séparaient qui restaient amis. Ils avaient été amis par le passé. L’avocat avait bien conscience que le chemin serait long mais il l’acceptait, et il voyait déjà du résultat. C’était la première fois qu’ils étaient tous les trois ! Et à présent Neela lui proposait de prendre leur fille, ce dont il mourrait d’envie depuis son arrivée. Il sourit, heureux comme un gamin. « Volontiers ! » Le père qu’il était ne se fit pas prier davantage et se pencha vers sa fille pour la prendre dans ses bras, l’attrapant doucement il la mit contre son torse lui déposant un bisou sur son front. « Regardes moi comme tu es déjà grande. » Il souriait, heureux. Posant sa fille sur ses genoux de sorte à ce qu’elle puisse toujours voir sa mère qui se faisait servir un cheeseburger. Noah eut un sourire au coin des lèvres, se souvenant de combien c’était important pour Neela ! L’Indienne reprit la parole et franchement il aurait préféré qu’elle s’occupe de son cheeseburger plutôt que de lui. Il baissa quelque peu le regard observant sa fille qui attrapait sa main, jouant avec elle. « C’est… » compliqué, non il ne pouvait dire cela. Il releva le regard vers la jeune femme, répondant alors avec franchise, jouant carte sur table. « Quand je suis revenu en ville, je m’y suis arrêté, je voulais boire en paix et c’était le meilleur endroit qu’il soit pour faire une telle chose. Personne ne me connaissait réellement là-bas, pas de risque de tomber sur une connaissance et entendre des reproches, là-bas les clients ne viennent pas observer le bar. Je pouvais descendre le nombre de verre que je voulais sans qu’on ne m’observe. » Il marqua une pause. « Un soir en partant j’ai appris qu’ils allaient fermé, personne ne souhaitait racheter cet endroit, puis j’ai croisé une danseuse, paumée… je ne sais pas pourquoi j’ai eu l’impression que je serais enfin utile, parce que tu vois tout le monde juge les danseuses tout comme on me juge en permanence, et c’est très con mais j’ai cru que là-bas j’y avais toute ma place, on ne me jugeait pas et je voulais offrir quelque chose de meilleur à ses filles. Elles ne sont pas de la vulgaire marchandise. Ce n’est pas un bordel et ça n’en sera jamais un. » Le Penthouse ne l’avait pas sauvé, ce n’était pas une connerie de ce genre, il s’y était juste senti chez lui aussi étrange que cela pouvait paraître. « Je veux faire autre chose du Penthouse, ça ne restera pas une boîte de striptease. » Malgré la bonne réputation de cet établissement, on ne pouvait pas se défaire de l’image qu’avaient les gens sur le striptease en lui-même.

Il était évident que sa boîte n’était pas une école de danse, les filles ne finiraient jamais dans un opéra ou établissement du genre. Elles resteraient sur scène tant que leur corps leur permettrait et elles ne connaîtraient jamais l’admiration que l’on pouvait avoir pour une danseuse. C’était vrai. Cependant Noah avait une affection pour chacune d’entre elles, il les connaissait toutes par leurs prénoms, il savait tout d’elles ou presque. L’avocat savait par exemple que Rebecca était âgée de vingt-trois ans, qu’elle était mère d’un petit garçon de cinq ans, beaucoup plus intelligent que la moyenne mais il n’aurait pas le droit d’aller dans des grandes écoles parce qu’elle n’aurait jamais assez pour lui payer de telles études, il y avait aussi Vicky, bientôt la quarantaine, payant les dettes de son mari qui était en prison, son fils aîné suivait ses traces d’ailleurs. Il y avait aussi des filles qui avaient atterri ici on ne savait pas pourquoi, Tracy, qui était promu à une grande carrière, elle avait trahi son père, assez pour qu’elle se retrouve à la rue sans un sous en poche et il y avait la petite Sawyer, elle avait un entourage et pourtant elle était là, nue sur scène et en parlant d’elle l’avocat se demandait si il n’était pas tant de l’avouer à Neela, qui la connaissait un peu. Elle allait le tuer ? Sûrement. En attendant l’heure de vérité il écoutait son ex petite amie, fronçant les sourcils quand Maya entra dans la conversation. « Mais ça ne va pas ! » Elle était folle, le cheeseburger venait officiellement de lui monter au cerveau ! Noah ne voulait pas imaginer une telle chose, il ne pouvait pas penser à sa fille sur une scène nue, non ce n’était pas pensable il était son père, c’était sa petite princesse et franchement… beurk, il préférait arrêter de penser à cela. Secouant sa tête comme pour chasser toute image dégueulasse. « Arrêtes. » Non mais franchement qu’on lui redonne un burger et des frites parce qu’elle était en plein délire… ou pas. Neela n’avait pas tort, une boîte de strip-tease n’avait rien de respectable, que ce soit le bordel le plus glauque au monde ou le lieu le plus classe et propre qu’il soit, ça restait un lieu où les femmes étaient nues et étaient observés par des hommes. « D’accord, tu as raison. » Elle était contente ? Sûrement. « Je ne dis pas que mes danseuses seront respectés parce que ce lieu est plus luxueux, j’ai bien conscience que les clients ne sont pas des amateurs de danse mais des amateurs de femmes… nues. » C’était des pervers après tout. « Je veux juste quelque chose de meilleur pour elles… je ne peux pas les laisser. Tu peux trouver cela bête, douteux ou autre mais je ne vais pas renvoyer toutes ces femmes, elles ont une vie, une vie beaucoup moins drôle que la nôtre. J’ai merdé, je n’aurais pas dû essayer de sauver cet endroit, j’aurais dû proposer autre chose mais je ne l’ai pas fait. Comme toujours, c’est bien moi après tout non ? Le mec qui foire tout ! » Si Neela en était à parler de cela c’était sûrement parce qu’encore une fois pour elle Noah était un gros con qui n’agissait jamais comme il le devait ou comme elle le désirait plutôt. « Avant que tu ne me balances une frite au visage j’ai autre chose à dire… sur une danseuse. » Il tendit le doudou à sa fille qui semblait le réclamer, il lui donna en lui adressant un tendre sourire. De quoi détendre un peu la situation. « Quand j’ai repris l’établissement, j’ai gardé toutes les danseuses… et j’ai… » Il avala difficilement sa salive. « J’ai découvert que Sawyer… la fille de Heath, en était une. » Ca avait fait un sacré choc à Noah, surtout qu’il l’avait découvert un soir, trois jours après son achat, à moitié nue sur la scène et franchement il s’en serait bien passé. Il avait interdit à Sawyer de continuer, lui proposant de servir au bar plutôt, puis Heath était décédé quelques jours après et il avait gardé cela pour lui jusqu’à aujourd’hui. « Je voulais le dire à Heath… mais il est décédé quelques jours après et Sawyer refusait que je le dise. J’ai rien dis, elle va tellement mal depuis ce jour que j’ai préféré attendre… » Ca faisait un petit moment qu’il n’avait pas vu Aleksey, il voulait lui en parler également, parce qu’il savait le lien qui unissait ces deux-là et que seul lui arriverait à calmer la jeune fille mais le temps passe et Noah ne l’a toujours pas vu.

Si la situation avait été différente et si leur relation avait été toute autre Noah aurait souri de bon cœur. C’était pour cela qu’il avait toujours aimé la jeune femme, que ça soit en tant qu’amie ou petite amie. Neela faisait partie de ces personnes, trop rare dans ce monde, qui pouvait vous faire comprendre rapidement que vous merdiez. Elle n’avait pas peur, c’était une femme de caractère qui n’attendait pas d’être dans votre dos pour dire ce qu’elle pensait. Quand Neela parlait elle avait le même effet qu’une personne qui vous secouez par les épaules. Bon sang que c’était dur de devoir être si loin d’elle, de ne plus pouvoir espérer une amitié avec elle. Quel connard, il avait tout gâché. Plus elle continuait et plus il restait là silencieuse, il la fixait comme il l’avait fait par le passé lorsqu’elle parlait, partait dans des monologues et qu’il finissait par avoir un petite sourire aux coins de ses lèvres l’admirant tout simplement. C’était exactement ce qui se passait à ce moment précis. Mais avait-il le droit de sourire ? Le « pauvre petit Noah » eut raison de lui et de son sourire qui apparut aux coins de ses lèvres. Il avait pensé à s’excuser avant d’y renoncer, pourquoi le faire ? L’aurait-il fait auparavant ? Non. Alors il afficha ce petit sourire continuant de l’écouter parce qu’elle n’avait pas terminé ! « Une médaille en chocolat pourquoi pas ! » Ce n’était peut-être pas le moment de plaisanter mais franchement ça faisait du bien, parce qu’à chaque fois ils n’arrivaient pas à se poser comme deux adultes et à parler comme deux parents qu’ils étaient. Il y avait Maya au milieu d’eux et franchement il ne voulait pas que ça continue ainsi, il n’avait pas envie d’être le père qui garait sa voiture devant la maison de la mère et qui attendait que son enfant monte à l’intérieur. Il voulait échanger avec Neela, il voulait partager ce qui concernait leur fille et il voulait que tout ceci cesse. Il avait du travail à faire il le savait, et il le ferait parce qu’il devait le faire pour ses enfants avant tout. « Merci Neela… vraiment. » Ses conseils étaient et seraient toujours bons à prendre. « Tu as raison. Garder cet endroit ne rendra pas la vie de ses femmes meilleure, ce n’est pas en le rendant plus luxueux, plus propre et en créant des règles qu’elles changeront ce qu’elles sont pour tous ces hommes. J’aurais beau chercher des raisons à tout ceci et me chercher des excuses pour cet achat au final ce qui compte aujourd’hui c’est ce que je compte faire pour elles, pour cet endroit et pour l’avenir. » Alléluia, fêtons ceci avec un bon whisky… ah non l’alcool était interdit pour l’avocat. Noah avait toujours eu un grand cœur, il avait toujours donné pour les associations, n’avait pas hésité à donner lors d’événements tragiques pour soutenir des populations, il avait soutenu des campagnes et avait toujours aidé son prochain. Il était évident qu’il devait faire ce qu’il avait toujours fait, garder cet endroit comme boîte de nuit ne l’aiderait pas à avancer. Il aimait cette boîte, parce que ce lieu était l’endroit qu’il avait fréquenté à son retour sans avoir un seul jugement, il y buvait ses verres et ça n’avait jamais posé de problème à personne. Avec le temps il avait pris tout ceci très à cœur, comme si ce lieu le représentait, lui, l’homme brillant que soudainement tout le monde avait jugé, le salaud du coin, le connard, le briseur de cœur voir même de rêve… tellement de jugements, tellement de critiques qu’il avait voulu défendre ce lieu, lui aussi critiqué.

« Oui Sawyer… la petite Sawyer. » Enfin plus si petite que cela. Noah se souvenait de sa première rencontre avec elle, de son sourire naturel, sa timidité, sa fragilité touchante et puis il l’avait vu sur scène. Il était parti aussitôt en coulisse, demandant à l’équipe de la ramener tout de suite, il l’avait traîné dans son bureau. Il était fou, en colère de découvrir cette jeune femme ici dans ce lieu, elle qui avait tout pour être heureuse. Puis il l’avait écouté, il l’avait observé et il avait compris que quelque chose n’allait pas. Il lui avait refusé l’accès à la scène immédiatement. Heath était mort, elle avait quelque peu disparu de la boîte de strip, il avait ses affaires à régler avec Neela et Leah et le temps passait. « Non, j’ai appelé mais on n’a pas réussi à se recontacter depuis et… je voulais lui dire en face. Il faut que j’aille le voir. » Tout le monde avait des problèmes, tout le monde avait sa vie et malheureusement on ne pouvait pas toujours tout gérer. Noah essayait de se reconstruire, il tentait de renouer un contact avec Neela, il se montrait plus présent avec Leah, il apprenait à découvrir ses deux enfants, il passait du temps également avec Jamie et sa mère. Alors oui il n’avait pas encore appelé Aleksey mais pouvait-on réellement lui en vouloir ? Non.