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 SoRo - oh sister, we're two of a kind

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MessageSujet: SoRo - oh sister, we're two of a kind   SoRo - oh sister, we're two of a kind EmptySam 20 Juil 2013 - 2:31

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Le bruit de la porte qui claquait résonna longtemps dans le silence. Dans le hall d’entrée, Solal Moran haussa un sourcil perplexe. Il y avait à peine dix minutes qu’il était parti prendre l’air après l’overdose émotionnelle du tri de photos avec sa petite soeur. La porte était restée déverrouillée. Il osait espérer que Rose n’avait pas filé en douce, en laissant la maison grande ouverte pour tout cambrioleur de la maison - pas le genre de la famille, mais tout de même. Ce qui n’était pas non plus du genre de la jeune femme, c’était de rester tranquillement dans un coin sans venir lui demander d’explications à propos de son départ précipité. Du tout, du tout. Trois solutions: ou elle était morte, ou Pluto l’avait mangée, ou elle était en train de mettre au point un nouveau plan foireux pour son mariage. Il ne savait pas s’il devait espérer ou non la troisième solution. D’un côté, il n’aurait pas apprécié tant que ça la mort brutale de sa seule petite soeur - d’un autre côté, elle prenait son rôle d’organisatrice de mariage (un peu) (beaucoup) trop à coeur pour la santé mentale de son frère.
Il entra prudemment dans le salon. Dans son panier, Pluto leva les yeux vers son maître en agitant mollement la queue. Il n’avait pas l’air d’avoir dévoré de la chair humaine récemment, et les objets de valeur étaient toujours en place - il y avait donc de fortes chances pour que Rose soit tout simplement en train de se la jouer fourbe. Il secoua la tête, dépité d’avance. Soupira. Ferma les yeux, se tourna un peu. Quand il les rouvrit, ce fut pour voir sa soeur attablée dans la partie salle à manger. Non, elle ne travaillait pas à un gâteau douteux. Non, elle ne faisait même pas de plan de table. Pire que ça. Elle avait entrepris une composition florale - et dieu seul savait combien elle n’avait pas de talent inné pour ce genre de choses. Les épaules de l’aîné des Moran s’affaissèrent un peu - désespoir oblige. «Rose... non, sérieusement, non.» Il n’allait pas hurler. Non non, un Moran ne hurle pas. Mais là, on atteignait des sommets. C’était quoi, la prochaine étape? Essayer de le convaincre que Pluto pourrait très bien apporter les alliances? «Et puis, vraiment, tu ne trouves pas ça un tout petit peu égocentrique de mettre des roses dans le bouquet de la mariée? C’est... redondant. C’est un peu une grosse signature, avec des pétales. J’aurais l’impression d’épouser ma soeur.». Et puis il avait beau être végétalien, il compatissait également avec ces pauvres fleurs qui n’avaient rien demandé et se retrouvaient sauvagement coupées pour les expériences sordides de sa petite soeur. Pourquoi avait-il voulu se marier, déjà? Ah, oui, parce qu’il aimait Cleo et qu’il voulait faire d’elle une femme honnête - même si personne n’était dupe et qu’elle n’était plus vierge depuis un bon bout de temps. Et puis merde, ce ne sont pas vos oignons. Toujours était-il qu’il n’avait pas signé pour que sa cérémonie ressemble au festival de Cannes. Il avait une réputation à tenir, mine de rien - une réputation de mec qui faisait du yoga, vivait un long trip écolo et militait pour la sauvegarde de la planète. Combien de kilos de CO2 pour la cérémonie que sa petite soeur leur concoctait? Il se frotta les paupières, sous ses lunettes, non sans l’espoir de se réveiller d’un long cauchemar.
Il fallait prendre tout ceci avec philosophie. Il poussa un long soupir, et il était paré. Il traîna sa carcasse jusqu’à la table, posa une fesse sur l’angle de celle-ci. En face de lui, sa soeur, la langue coincée entre les dents sous la concentration. Certes. Rose Moran, trente-deux ans, mais oui madame. Il ne pouvait pas nier que l’image l’attendrissait un peu - est-ce qu’elle avait des pansements sur les doigts? Certes. Rose piquée par une rose. Ironique. Il pencha un peu la tête sur le côté, adopta un air interrogatif tout en sourcils: «Et puis j’avais même pas dit oui pour la composition florale. C’est une agression manifeste de l’écosystème». Non, il n’exagérait pas du tout. Du tout. Du tout. Mais il y avait des fois où il valait mieux exiger beaucoup pour être sûr d’avoir un petit peu - viser la lune pour atterrir dans les étoiles, tout ça tout ça (même si son côté professeur protestait énergiquement, et tenait à souligner que la Lune se trouvait techniquement beaucoup plus à portée que les étoiles, et puis voilà, les dictons ça pue la merde). Surtout avec sa soeur. Avec un peu de chance, il n’allait pas se retrouver avec les jardins de Versailles sur chaque table. Pris d’un soudain doute (et d’une grosse angoisse), il leva une main: «Rassure moi. Dans tes plans, y’a pas de... lâcher de colombes ou de reproductions en miniature douteuses de Cleo et moi en haut du gâteau... s’il te plaît...» Il tenta de visualiser le deuxième élément - et se rendit compte que non, vraiment, non, il n’y tenait pas: «Ils rateraient mes sourcils. Ils rateraient forcément mes sourcils!» C’est vrai ça: à petite échelle, il allait forcément avoir l’air d’un homme de cro-magnon. Qu’il n’était pas. Pour mieux appuyer ces supplications vaguement canines (entendez yeux de chiens battus, que même Pluto n’aurait pas fait mieux), il descendit de son perchoir et se glissa dans le dos de sa soeur, pour la prendre dans ses bras. Il cala sa tête sur son épaule, poussa un long soupir, entre le contentement et les dernières traces d’angoisse/agacement. C’était une façon muette de lui dire: je vais passer la pire journée de ma vie au mariage que tu es en train d’organiser, mais je t’aime quand même, et apparemment ça te rend heureuse alors mine de rien ça me rend un peu heureux moi aussi, mais je le dirai pas à haute voix parce que j’ai ma fierté. Mais il devait s’avouer que, de près, le bouquet de la mariée concocté par Rose était encore plus laid que ce qu’il avait pu le paraître de loin.
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MessageSujet: Re: SoRo - oh sister, we're two of a kind   SoRo - oh sister, we're two of a kind EmptySam 20 Juil 2013 - 17:36

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«Rose... non, sérieusement, non.» «Si, Solal, sérieusement, si.» Contra-t-elle avec un air enfantin. Quand elle s'y mettait, elle pouvait devenir une vraie gamine. De ses deux mains aux paumes ouvertes, elle fit remonter les fleurs qui tombaient un peu sur le côté, à l'imagine d'une coiffeuse regonflant un brushing pour lui donner un peu plus d'allure. Seulement, Rose n'avait pas plus de tellement en coiffure qu'en fleuristerie, malgré ce que son nom laissait entendre, et cela ne fit que désorganiser un peu plus la structure bancale de son bouquet. Enfin, son amas de fleurs, quoi. Pourquoi avait-elle décidé de faire un atelier floral ? Elle n'en avait pas la moindre idée, surtout que pour tout vous dire, les risques allergènes dus aux fleurs fraîches étaient tout de même un problème de taille, mais elle avait lue à la page 73 de "OUI Magasine" qu'un mariage sans fleur, c'était comme un Pape sans sa soutane. Tout de suite, ça avait moins de gueule. «Et puis, vraiment, tu ne trouves pas ça un tout petit peu égocentrique de mettre des roses dans le bouquet de la mariée ? C’est... redondant. C’est un peu une grosse signature, avec des pétales. J’aurais l’impression d’épouser ma soeur.» Continuait son frère, revenu de son petit tour à l'air frais pour se ressourcer dans la nature après quelques longues minutes où elle avait décidé qu'il était temps pour elle de passer aux choses sérieuses. Et les fleurs, c'était un truc sérieux, malgré tout le bien que Solal en pensait, c'est à dire, bien peu de chose en réalité. Toutefois, elle gardait son calme et sa placidité habituelle. Elle savait que la séance photo avait fait remonter quelques souvenirs chez son frère, qui n'aimait pas tellement montrer ses émotions, elle lui laissait donc le bénéfice du doute, même si elle comptait bien le rallier à sa cause... D'une façon ou d'une autre. «Tu veux qu'on bannisse la couleur rose, aussi ? Ou je pourrais aussi très bien ne pas venir... Ça te plairait ça, hein.» Elle prit un air faussement vexé. Loin d'elle l'idée de lui donner de mauvaise idée... Mais de toute façon, il n'avait pas le choix. Elle était le témoin de la mariée. Si il y avait bien une personne qu'il ne pouvait pas désinviter, c'était elle, en dépit du fait que, déjà, elle était sa soeur et n'aurait voulu rater la cérémonie pour rien au monde. Pas même pour assister à une séance de dédicace de Jean-Christophe Grangé, c'était dire. «Et puis j’avais même pas dit oui pour la composition florale. C’est une agression manifeste de l’écosystème.» Il changeait de tactique. Décidément, on ne l'arrêtait plus, mais Rose ne se laissait pas déstabiliser dans sa concentration, cherchant à marier plusieurs teintes de violet avec l'ensemble... «Rassure moi. Dans tes plans, y’a pas de... lâcher de colombes ou de reproductions en miniature douteuses de Cleo et moi en haut du gâteau... s’il te plaît...» Elle ne le regardait même pas, mais leva les yeux au ciel tout de même, pour la forme. Elle devait, avant de se laisser déstabiliser, d'abord réussir à faire tenir ces foutus bleuets qu'elle avait, pour tout vous dire, payé une petite fortune. Là, voilà, comme ça... Elle écarta les mains, fière de son oeuvre, mimant un TADAAAM muet alors que son rabat-joie de grand-frère continuait son numéro de Caliméro, dont la dernière réplique lui tira, tout de même, un petit pouffement discret. «Ils rateraient mes sourcils. Ils rateraient forcément mes sourcils!» Elle lui renvoya un air désarmé. «Des fois, je me demande si tu saisis bien le concept de ce qu'est un mariage. Mais je ne vais pas te faire une leçon sur l'importance des traditions, Monsieur l'instituteur, tout du moins... Pour certains.» Un simple regard en direction d'une photo du mariage de ses parents, qu'elle avait amené pour faire un petit clin d'oeil au début de son diaporama, ferait comprendre à son frère le sous-entendu qui composait sa phrase. Elle croisa les bras ensuite, en posant un sur celui de son frère, venu pour la serrer contre lui afin de tenter de l'attendrir. Cependant, songer que ce serait aussi simple aurait été bien mal la connaître... Laissant son dos choir contre le dossier de sa chaise pour se tourner un peu et pouvoir voir son visage, Rose plissa le nez. Ça y est, la Madame-je-sais-tout se réveillait en elle, et ça allait faire des ravages. «Un mariage sans fleurs, c'est comme une soirée dansante troisième âge sans chanteurs morts, tu vois : ça n'en serait pas une, puisque que personne danserait. Tu vois des vieux danser sur de la dubstep ?» Commença Rose pour donner le ton, avant de lever les yeux au ciel. L'image était parlante, mais elle n'avait pas fini. Elle avait encore tout un tas de contestations à faire passer, elle aussi, et cela commençait... dès maintenant. «Tu voudrais quoi, à la place ? Des légumes ? Qu'on sculpterait avant de les poser sur toutes les tables, venus directement des producteurs locaux et issus de l'agriculture bio ? J'y ai pensé, tu sais, mais on est pas en train de préparer Halloween... Ou, tiens, pourquoi pas des fleurs en papiers crépons, comme tu faisais avec tes gamins de maternelle il fut un temps ? Dommage, ce n'est pas non plus Carnaval... Et puis, j'oubliais, le papier, ça vient des arbres, alors quelque part, on serait responsable de la déforestation amazonienne... Il ne nous reste que le plastique, et là, c'est encore plus évident : ça vient du pétrole, et qui dit pétrole, dit pollution. Retour à la case départ.» Son laïus terminé, elle finit tout de même par s'adoucir, laissant sa joue choir contre l'épaule de Solal. Elle y était peut être allé un peu fort, mais c'était lui qui avait commencé. «Tu sais que je ferais n'importe quoi pour toi. Mais là, tu m'aides vraiment pas.» Elle eut une moue boudeuse avant de lâcher un profond soupir aux accents désespérés. Il n'imaginait même pas la pression que toute cette histoire lui mettait sur les épaules... Elle aussi aurait bien eu besoin de souffler. D'aller prendre l'air et de revenir comme une fleur - c'était le cas le dire - en voyant que les choses continuaient à avancer pendant son absence. Sauf que, ce n'était pas le cas. Si elle ne s'en occupait pas, personne ne le ferait. Et, quoi qu'on en dise, elle faisait de son mieux.
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MessageSujet: Re: SoRo - oh sister, we're two of a kind   SoRo - oh sister, we're two of a kind EmptyDim 21 Juil 2013 - 22:23

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«Des fois, je me demande si tu saisis bien le concept de ce qu'est un mariage. Mais je ne vais pas te faire une leçon sur l'importance des traditions, Monsieur l'instituteur, tout du moins... Pour certains.» C’était quoi ce topo? Il n’en avait strictement rien à faire, des traditions. Il levait les yeux au ciel quand on mentionnait les actuelles («Non James, pas de strip-teaseuse à mon enterrement de vie de garçon»), et regrettait régulièrement certaines anciennes («Comment ça, j’ai pas le droit de mettre cet élève au coin? Le bonnet d’âne ridiculisait la condition animale, ça je veux bien, mais mettre un élève au coin ça offense que l’élève donc on s’en fout, non?»). Il ne faisait pas partie des «certains». Et il ne pouvait pas s’empêcher d’avoir envie de rire et/ou de lever les yeux au ciel en s’imaginant ouvrir un bal, sabrer le champagne ou prendre des photos devant une pièce montée. Il aimait Cleo. Il voulait épouser Cleo. Pour tout le reste, il faisait des efforts. Pour sa fiancée. Pour sa soeur, aussi, mine de rien. Et pour ses parents, comme elle le lui avait discrètement signifié, tout en ne-suivez-pas-mon-regard. Hélas, il avait suivi son regard. Et il était de plus en plus mortifié en s’imaginant sur une même photo, à la place de son père. «Tu sais que techniquement on devrait même pas chercher du côté de la robe blanche pour Cleo? On trahit la tradition. Au risque de briser tes illusions, elle et moi nous vivons dans le péché.» Il fallait vivre avec son temps - même si les origines hispaniques / brésiliennes, l’éducation stricte et des années passées à se la jouer enfant de choeur avaient laissé des traces sur son caractère, et l’habitude de porter une croix. Ses parents, par contre, vivaient un peu moins avec leur temps. Et auraient fait un charmant remake du massacre à l’Eglise de Kill Bill en l’apprenant. Très peu pour lui. Oui non, ils allaient faire illusion et rester à la robe blanche - c’était plus sûr.
«Un mariage sans fleurs, c'est comme une soirée dansante troisième âge sans chanteurs morts, tu vois : ça n'en serait pas une, puisque que personne danserait. Tu vois des vieux danser sur de la dubstep ?» Pas tant que ça. Et ce qui l’inquiétait surtout, dans cette histoire de soirée dansante, de vieux, et de chanteurs morts, c’est qu’on y retrouvait souvent les mêmes chansons douteuses qu’aux mariages. Sauf que si quelqu’un l’obligeait à lever les bras en l’air pour les agiter au rythme d’un refrain mielleux, il risquait fort de devenir Hulk. Ou de se mettre à pleurer. Ou les deux. Il cligna une, deux fois les yeux, incrédule face à cette image mentale. Puis il regarda sa soeur au-dessus de ses lunettes. «On est d’accord hein. Si d’ici deux, trois jours tu réalises que t’as un dilemme de ce genre pour la soirée du mariage, je préfère la dubstep. Et de loin. Non, parce que si on me fait faire la Chenille j’aurai surtout envie de me venger façon The Human Cendipede. Je préfère prévenir.» Il disait ces mots d’une toute petite voix, un peu penaude, toujours niché contre sa soeur. Mais ça avait en quelques sortes valeur de menace. Il savait qu’elle savait qu’il était un peu un psychopathe sur les bords. Et puis il y eut, comme à charge de revanche, ce long développement inopiné sur ce qui apparemment posait le plus problème dans toute cette histoire - l’attachement de Solal pour les problématiques écologiques. Et puis merde, quoi! Il n’allait tout de même pas s’excuser pour tenter de sauver un tant soit peu la planète?! Il l’aimait bien, la planète. Elle était sympa à vivre. Il se renfrogna un peu, adoptant son air «nos-enfants-et-petits-enfants-et-petits-petits-enfants-nous-remercieront-de-leur-avoir-laissé-une-planète-plus-propre», aussi appelé l’air «une-vie-est-une-vie-qu’elle-soit-humaine-ou-animale-alors-passe-moi-le-quinoa-s’il-te-plait». Ces deux arguments auraient été tout particulièrement stériles - mine de rien, Rose avait de l’entraînement avec le temps. Alors il embraya. «Moi j'aime bien les légumes. C'est sympa, les légumes. On pourrait les cuire à la vapeur, et comme ça ils seraient comestibles, et tout le monde serait content… et puis même, ça ferait bien sur les plans de table. Il y aurait une table carotte… une table citrouille… une table patate… non? Non, c'est vrai, j'aimerais pas être à la table patate non plus. Mais on pourrait donner un chou fleur à Cleo à la place du bouquet. Ca serait original. Et écolo. Un mariage écolo. T'as du en voir, des mariages bêtes dans tes magazines… si on peut faire un mariage "princesse" ou "cinéma" ou "nudiste", je vois pas ce qui m'empêcherait de faire un mariage écolo.» Il y eut un temps de silence. Au loin, Pluto soupira. Profondément. Apparemment consterné. Alors Solal prit le temps de réfléchir un peu, et ses yeux tombèrent à nouveau sur la photo parentale. Papa-Maman-Moran avaient soudain l’air un poil plus renfrognés sur le cliché de leur mariage. «Ouais, non, eux ils m’en empêcheraient.». Consternation. Résignation. Grognement. Il tendit un bras pour toucher le bouquet du bout du doigt - histoire de vérifier qu’il n’avait pas halluciné cette horreur fleurie. Hélas, elle était palpable. Donc réelle. Et sur le coup il n’osait pas trop critiquer, parce que c’était sa petite soeur adorée, qu’elle s’était donnée du mal pour pondre... «ça». Mais il n’allait jamais, jamais cautionner de laisser ce genre d’alien végétal s’incruster dans son mariage. Ou alors il risquait de ne pas venir lui-même. Ce qui serait plutôt emmerdant, vu qu’en théorie il s’agissait de son mariage. Il eut une seconde l’envie de demander à Rose où est-ce qu’elle avait planqué le vrai bouquet. Mais elle se serait probablement mise à lui hurler dessus, et à agiter les fleurs sous son nez en le traitant d’imbécile. Et mine de rien, il aimait sa soeur... Alors il s’efforça d’oublier qu’il avait vu certains de ses élèves de primaire faire beaucoup mieux en cours de travaux pratiques. Ce n’est que quelques secondes plus tard, et d’une toute petite voix, qu’il osa glisser: «...Je t’aime quand même, tu sais. Beaucoup. Et je te suis reconnaissant d’organiser ce mariage. Beaucoup.» Parce que sans Rose, il n’y aurait probablement pas eu de mariage. Ou alors... une remise de contrat de mariage à la va-vite dans la boîte aux lettres de la mairie. Ce qui n’aurait pas tant dérangé Solal en soi - ce n’était pas la cérémonie qui l’intéressait. Mais Cleo lui en aurait probablement tenu rigueur, et il n’y tenait pas.
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MessageSujet: Re: SoRo - oh sister, we're two of a kind   SoRo - oh sister, we're two of a kind EmptyMar 13 Aoû 2013 - 4:58

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Solal et Rose avaient beau être frères et soeurs, des fois, on se demandait si ils sortaient vraiment du même utérus... Surtout vu la façon dont chacun réagissait face à la situation dans laquelle ils étaient. Un mariage. Un mariage attendu, désiré. Un mariage qui allait se concrétiser sous peu et dont ils seraient les pièces maîtresses... L'une hystérique, l'autre imperturbable, on pouvait difficilement faire plus éloigné. Et pourtant, ils partageaient bien les mêmes gènes, et sûrement, au fond, la même appréhension... Ils avaient cependant une façon très différente de le montrer. Rose s'enfouissait corps et âme dans les préparatifs tandis que Solal, lui, semblait survoler l'évènement tel un OVNI qui ne semblait pas prêt de se poser sur cette planète inconnue, j'ai nommé, WeddingLand. A chacune de ses remarques, Rose grimaçait, tantôt sérieuse, tantôt boudeuse, et bien souvent un mix entre les deux. Il fallait dire qu'elle aussi, se sentait propulsée dans quelque chose qu'elle ne maîtrisait pas, mais alors, pas du tout. Organiser un mariage... A la limite, écrire la rubrique dans un journal, pourquoi pas, mais tout planifier de A à Z... De suite, c'était autre chose. Surtout quand le marié s'obstinait à refuser en bloc toute tentative de mener la chose à bien en baragouinant des théories fumeuses écologico-improbables. Elle aurait d'ailleurs bien eu envie de l'attraper par les épaules, là, de suite, et de le secouer. De lui dire "Merde, Solal, déconne pas, tu sais pas la merde dans laquelle tu m'as foutu, là, alors s'il te plaît, n'en rajoute pas", mais n'en fit rien. Déjà, parce qu'il avait le chic pour la prendre par les sentiments, comme là, maintenant, alors qu'il avait serré ses bras autour d'elle et posé sa joue contre la sienne, et qu'il lui murmurait : «...Je t’aime quand même, tu sais. Beaucoup. Et je te suis reconnaissant d’organiser ce mariage. Beaucoup.» Mais aussi pour une autre raison... Elle était, quelque part, un peu résignée, consciente qu'il ne serait pas facile de faire entendre raison à son cartésien de frère que toutes ces futilités auxquelles elle s'attelait avaient la moindre importance... S'il s'était écouté, elle était sûre qu'il s'en serait tenu au strict minimum et aurait plié la chose en cinq minutes. Du style signé un post-it, comme dans Grey's Anatomy, ou dessiné une bague au marqueur indélébile au doigt de Cléo comme elle l'avait vu dans elle ne savait plus quel film. Un truc simple, quoi. Vite fait bien fait. Sans fioriture. Brut de décoffrage, quoi... C'est là qu'elle eut l'illumination, et se redressa alors d'un coup sur son siège pour lancer : «Et sinon, t'as pensé à te marier tout nu ? En plus d'être très mère nature, retour aux sources, à l'état originel, tout ça tout ça, ça réduirait carrément les dépenses, et ça me ferait beaucoup moins de choses à m'occuper. Et puis, peut être même que Papa et Maman accepteraient si on leur disait qu'on reproduit la scène du Jardin d'Eden. Prêt à te marier avec pour seul apparat une feuille de vigne sur les parties ?» Elle avait gardé un air sérieux en méditant la chose, bouche tordue, lèvres presque en cul de poule, tapotant sa lèvre avec un bleuet calé entre son index et son majeur, avant d'éclater de rire en relevant les yeux vers Solal. Son air était impayable. Il était sûrement prêt à tout entendre de sa part sauf ça... Un mariage façon nudiste... Rose elle-même ignorait comment une énormité pareille avait pu passer ses lèvres. Prise d'un fou rire de plus en plus conséquent, elle se mordit franchement la lèvre en se penchant en avant, se pliant en deux. Elle venait de songer qu'ils auraient même pu passer sur NuTV pour l'évènement, en plus, et cela décuplait son hilarité. Se tordant donc de rire sur sa chaise, elle tâcha de se reprendre, et c'est finalement après un gros effort de concentration qu'elle y parvint : «Regarde l'état dans lequel tu mets mes nerfs...» Réussit-elle à baragouiner, le rire encore au bord des yeux. «Je ne sais plus ce que je raconte, et je rigole pour rien !» Avec un profond soupir, elle secoua la tête, puis s'essuya les cils d'un revers de manche. Prenant un stylo dans son sac, elle sortit ensuite un petit bloc note qu'elle posa bien droit sur la table devant elle. Croisant les jambes, elle traça un trait pour faire deux colonnes avant de mordiller le bout de son stylo et de relever le menton : «Bon. Pour trancher, je propose que le menu soit bio, et que les serviettes soient en papier recyclé. Ensuite, on minimise les compositions florales, déjà parce que clairement c'est pas une bonne idée que je m'y colle» chose qui n'était plus à prouver «et en plus, c'est du gaspillage... Voilà. C'est déjà un bon début non ? On est d'accord là dessus ?» Elle releva son regard brun pétillant vers celui de Solal, l'implorant presque. Que n'aurait-elle pas donné pour avoir l'impression d'avancer dans les préparatifs... Plutôt que de, chaque fois qu'elle voyait son frère, reculer un peu plus et se sentir de plus en plus démunie et incapable d'y arriver... Sûrement pas grand chose. Elle aurait même accepté de céder sa collection de boutons, tiens, pourtant elle l'avait commencé en maternelle et elle avait une valeur sentimentale certaine, en plus de dépanner régulièrement quand elle en perdait un.
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MessageSujet: Re: SoRo - oh sister, we're two of a kind   SoRo - oh sister, we're two of a kind EmptyMar 27 Aoû 2013 - 14:47

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Les Moran avait une manière d’être bien à eux. Ils étaient un peu... comme les jumeaux bizarres qu’on voit à la télé, là, qui s’inventent un langage bien à eux & qui se contentent de l’autre pour remplir leur quota d’interactions sociales de la journée. Ils avaient grandi ensemble et forgé leur équilibre, ils étaient, hors des éléments extérieurs nommés «Cleo» et «James», les meilleurs amis du monde. Il y pensait, alors qu’il s’était niché tout contre sa soeur et en ronronnait presque du bonheur que lui procurait cette étreinte. Ils avaient beau se chambrer mutuellement, être consterné de l’attitude de l’autre, voire même se cracher des mots de haine en portugais (rare, mais ça arrivait. ça faisait très peur par contre), ils s’aimaient. Il n’y avait juste aucune limite à leur amour. Donc il arrivait que cette affection ressemble parfois, à s’y méprendre, à de la consternation. C’était naturel. Plutôt sain. Et ça allait à Solal - parce que les végétaliens aiment tout ce qui est naturel et plutôt sain, après tout.
Sauf que Rose venait de frôler les sommets en faisant ce qui était probablement la proposition la plus con de l’année. Il écarquilla les yeux, stupéfaits, avec l’impression étrange que l’on venait de lui foutre un crochet dans le ventre. Pendant une seconde, il eut envie de demander directement à Rose si elle se foutait de sa gueule. Or, il espérait que ça allait de soi - et que c’était tellement exagéré que ça ne pouvait être qu’une blague. Alors il tenta de suivre. Histoire de ne pas avoir l’air d’un con, genre le con de l’expression «t’es con, t’as pas marché, t’as couru», vous voyez? «C’est une super bonne idée Rosie!» cria-t-il presque en se redressant, avec de grands gestes de bras aussi, caricature vivante et fort peu crédible de l’enthousiasme - et Dieu seul savait combien ça ne lui allait pas d’avoir de telles expressions de corps et de visage. «T’es un génie. Aucun animal maltraité. La feuille de vigne peut être issue de l’agriculture biologique. Putain on peut même faire le buffet entier sans la moindre goutte d’huile de palme, avec un peu de chance! Tu crois qu’on peut tout faire provenir du commerce équitable?! Et puis c’est beaucoup trop contraignant, les costards, on sera mieux tout nus t’as bien raison. Et la référence biblique! Grande! Sublime! Stellaire! Croquons tous ensemble le fruit défendu!» Il s’arrêta soudain, laissa retomber ses bras, et repris sa place initiale - sa soeur entre ses bras, comme pour appuyer la suite de sa déclaration: «Tu serais la première à partir en courant en me voyant à poil. Je suis vraiment portugais sur le plan capillaire (et oui, il valait mieux en rire qu’en pleurer). Et puis où est-ce que James mettrait les alliances, hein?». Il regretta presque aussitôt d’avoir dit ces mots. Même si c’était une pure plaisanterie, un pur moyen de porter en dérision chaque détail de ce que Rose avait bien pu dire, la simple mention de James tout nu lui rappelait une certaine histoire passée, à laquelle il ne voulait plus repenser. Sa soeur et son meilleur ami. Une chose qui ne figurait pas au palmarès de ses plus beaux souvenirs - et c’était bien peu dire. Un bel euphémisme. Comme on n’en faisait plus. «On est d’accord là-dessus», dit-il simplement avec un léger sourire - non sans avoir ricané un peu à la mention du fait que les compositions florales n’étaient pas son fort.
Il savait que sa soeur se donnait du mal. Il l’aimait déjà plus que tout, mais son affection pour elle ne cessait de grandir alors qu’elle était rejointe par de l’admiration. Après tout, elle supportait vaillamment tout ses caprices d’écolo de base. Elle cherchait des alternatives, qui n’étaient d’ailleurs franchement pas stupides. Elle était vraiment une organisatrice en or - hors une évidente lacune sur le plan «main verte». Il n’avait pas envie de foutre tout ça en l’air en ravivant de vieilles rancunes, des histoires de jalousie et d’excès d’instinct fraternel. «On abandonne l’idée de se trimballer tout nus, alors?» conclut-il, d’un faux ton plaintif. «Ca veut dire que tu vas devoir te soumettre toi aussi à une tradition ridicule? Celle de la robe immonde de la demoiselle d’honneur? Histoire que Cleo paraisse encore plus à son avantage?» Quoi? Même lorsque cela n’était pas volontaire, c’était vérifiable. Toutes les demoiselles d’honneur de ce monde passaient par là - c’était une tradition, au même titre que les compositions florales douteuses, voire même au même titre que de mettre une bague au doigt de la mariée. On n’y coupait pas. Et non, ce n’était pas du tout parce que la même petite soeur l’avait contraint et forcé à regarder 27 robes il y a quelques jours - d’ailleurs, il n’avait pas d’allergies devant Katherine Heigl depuis, du tout. Mais dans cette sombre histoire de robe, il y avait une chose qui l’intéressait. Et c’était bien d’ailleurs la seule chose qui l’intéressait dans cette sombre histoire d’organisation, de clichés, de perfect wedding et de mauvais remake IRL d’émissions et de téléfilms pour ménagère de la cinquantaine. C’était la robe que Cleo allait porter. Quoi? C’était normal, non? Il allait se tenir là, devant l’autel, et elle allait avancer vers lui pour devenir sa femme, son épouse pour toujours - c’était un moment important, et le moment où elle allait lui paraître, plus que jamais, radieuse. Mais voilà. Autre tradition à la con. Il ne pourrait pas la voir avant la cérémonie. Ce qu’il pouvait faire, par contre, c’était tenter de soutirer des informations à sa pauvre petite soeur qui ne se doutait de rien.
Rire machiavélique intérieur.
«Qu’est-ce que Cleo a prévu pour la grande mission impossible qu’est de faire sembler Rose Perfection Moran à son désavantage? Couleurs pastels douteuses? Plumes rose bonbon dans les cheveux? En général ça dépend de la tenue de la mariée... non? Un petit indice?» Il tendit la main, faisant mine de mendier. «Une couleur? Un motif? Faut que j’assortisse ma cravate, merde! Regarde, je suis presque motivé. Crache le morceau et je t’aiderai à choisir les pliages de serviette.»


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